La vraie hantise des plateaux médias : la question… après la réponse


Accepter une invitation sur un plateau politique ou économique est une belle opportunité. Mais il faut être lucide : le piège ne se situe pas dans la première question que l'on pose — souvent attendue et bien préparée — mais dans celle qui vient immédiatement après ta réponse.
Celle qui rebondit, cherche la faille, et peut te déstabiliser.



Ce que beaucoup de débutants sous-estiment

Quand on se prépare pour un entretien télévisé ou radiophonique, on passe des heures à imaginer "les grandes questions".
On se prépare sur le fond, on anticipe les thématiques générales, parfois même on écrit des éléments de langage.
Mais ce n'est pas sur la "première frappe" que les journalistes comptent. Leur métier, c’est de réagir à ton discours, de trouver ce que tu as omis, exagéré, mal formulé ou laissé flou. Et c’est là que vient la question imprévue. Celle qui te prend au mot, qui demande de préciser un chiffre, d’assumer une contradiction, de te projeter sur une conséquence non prévue.

Exemple courant :

    Question : "Pensez-vous que votre parti doit se renouveler ?"
    Réponse préparée : "Oui, nous avons entamé une profonde réflexion sur notre organisation."
    Question juste après : "Pouvez-vous donner un exemple précis de ce renouvellement ? Un nom, une date, une action concrète ?"
    Et là, si tu n'as que du flou à offrir, tu perds immédiatement en crédibilité.

Pourquoi cette "seconde question" est si redoutable

Parce qu’elle :

    T'oblige à improviser sur un terrain que tu n'as pas entièrement balisé ;
    Peut te pousser à une maladresse (contradiction, flottement, aveu de faiblesse) ;
    Évite les discours généraux pour forcer des engagements, des détails, des choix précis.

Sur un plateau, ce n’est pas ta grande idée qui est jugée, c’est ta capacité à tenir sous pression, à incarner ce que tu dis dans des exemples et des décisions.

Comment s'y préparer intelligemment

Anticipe les relances en te posant toi-même les questions "après réponse".
À chaque affirmation que tu comptes faire, demande-toi : "Et si on me disait : donnez-moi un exemple ? donnez-moi une date ? qui est responsable ?"

Prépare des exemples précis, même si la question de départ semble large. Un chiffre, un nom, une action concrète doivent toujours pouvoir suivre ta réponse.

Entraîne-toi à reformuler calmement, même si la relance est agressive. La maîtrise de soi est aussi importante que le contenu.

Ne cherche pas à tout dire en une seule réponse. Mieux vaut laisser des portes ouvertes que de t'égarer dans des détails que tu maîtrises mal.

Accepte parfois de dire : "Je préfère ne pas m'avancer sur ce point sans vérifier." L'aveu d'humilité est parfois plus fort qu'un bafouillage.


Adnane Benchakroun :

La hantise des plateaux n’est pas la question. C’est la question après ta réponse.
Celle qui ne pardonne pas les improvisations creuses. Celle qui révèle ton authenticité ou tes failles.

Se préparer aux plateaux, c’est se préparer non pas à parler, mais à résister.
Par ton calme, ta capacité à illustrer tes propos, ta manière d’assumer ce que tu dis, sans fuir la précision.


Mercredi 30 Avril 2025

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