Le Sahara dernière colonie d’Afrique, une arnaque sémantique enfin révélée à l’international


Par Bargach Larbi

La charmante ville d’Oran a accueilli, fin novembre 2025, une conférence internationale dédiée aux méfaits criminels de la colonisation. Identifier les crimes et leurs responsables est une affaire d’historiens, exiger des réparations relève des politiques.

Après tant d’années, c’est probablement le moment d’aborder le sujet dans la sérénité et la responsabilité, sachant que les responsables directs des crimes sont, pour la plupart, disparus.



Cette rencontre, organisée sous l’égide de l’Union africaine (UA), est tombée à point nommé pour permettre à la diplomatie algérienne de sortir de la confusion dans laquelle elle s’est enfermée à la suite de son vote controversé en faveur de la résolution américaine sur Gaza.

Personne ne doute de la sincérité du soutien algérien à la cause palestinienne, mais le vote en faveur du désarmement du Hamas contredit le roman officiel algérien d’un soutien permanent et inconditionnel des mouvements de résistance.

Ce vote a pourtant une logique géopolitique, soulignée par la plupart des observateurs de la vie politique algérienne, celle d’une tentative d’un rapprochement spectaculaire avec les États-Unis de Donald Trump.

Si des liens avec la partie démocrate de l’échiquier politique américain semblent naturels, John Kennedy a été parmi les premiers, du monde occidental, à soutenir le FLN ; avec les républicains, la proximité est, a priori, moins évidente.

Ce n’est pas la première fois qu’un tel rapprochement est enregistré : sous George Bush junior, les relations entre Alger et Washington se sont considérablement améliorées grâce au lobbying de Christopher Ross et du défunt sénateur Jim Inhofe.

Ce rapprochement avait l’avantage de mettre en difficulté la diplomatie marocaine, en froid avec l’administration Bush Jr pour son refus de participer à la coalition contre Saddam Hussein lors de la deuxième guerre du Golfe.

Ces rapprochements avec l’Amérique, quasi contrenature, ont un seul objectif : entraver la dynamique positive dans laquelle s’est inscrite la diplomatie marocaine sur la question de l’intégrité territoriale du Maroc.

Cette dynamique, entamée en 2007 avec la proposition marocaine d’assurer l’autodétermination des populations sahraouies à travers une véritable autonomie sous souveraineté nationale, a été couronnée par la validation de la proposition du Maroc lors du vote de la résolution numéro 2797 du 31 octobre 2025, par le Conseil de sécurité de l’ONU.

Ce vote à l’ONU consacre un travail de fond considérable des affaires étrangères marocaines. La diplomatie a un statut spécial dans la gouvernance d’une nation.

Les ministres des Affaires étrangères sont, en général, des personnalités dont la notoriété est supérieure à celle de tous leurs collègues ministres, y compris les premiers d’entre eux.

C’est normal, ils incarnent la partie opérationnelle et visible de l’efficacité et du leadership de leurs pays respectifs. D’où l’importance des victoires diplomatiques.

Refusant d’acter un changement de trajectoire de la communauté internationale sur la question du Sahara, et de profiter du vote onusien pour s’offrir une sortie honorable, sous couvert du droit international, la diplomatie algérienne a cherché une victoire ailleurs.

Un retour vers l’Afrique et l’UA, seule institution internationale à reconnaître le Polisario et sa république fantoche, s’est imposé naturellement comme alternative.

La diplomatie algérienne pensait que la conférence qu’Alger vient d’organiser à Oran, officiellement consacrée aux crimes des pays colons, allait offrir une opportunité pour remettre le dossier du Sahara sur de nouvelles rails et avec de nouveaux acteurs.

Bien au contraire, cette initiative a brouillé les cartes, et la conférence s’est terminée en queue de poisson sans communiqué final, signe d’un désaveu sur la scène africaine.

Alger voulait imposer le rajout d’une résolution sur ce qu’elle appelle, avec un culot abusif, « la dernière colonie d’Afrique » ; cette tentative n’a, pour le moins, pas reçu l’adhésion des pays africains.

Cet échec diplomatique constitue un revers majeur pour l’Algérie qui a manqué une occasion de s’affirmer comme leader crédible sur la question des réparations dues aux anciens pays colonisateurs.

Il est doublé d’un autre : les pays africains commencent à intégrer l’idée qu’ils ont été embarqués, par la diplomatie algérienne, dans une des plus grosses arnaques des cinquante dernières années.

C’est encore une fois dommage, sachant que la diplomatie algérienne a longtemps été brillante grâce à des diplomates et des juristes de talent dont les plus célèbres sont :

•Abdelaziz Bouteflika, le défunt président de la République algérienne.
•Lakhdar Brahimi, connu pour son exceptionnelle carrière aux Nations Unies.
•Mohamed Sahnoun, fonctionnaire international longtemps incontournable au sein de l’OUA.
•Mohamed Bedjaoui, juge à la Cour internationale de justice, dont il deviendra le président entre 1994 et 1997. Ce monsieur a, en tant que juge, servi les intérêts de son pays dans l’affaire du Sahara comme personne avant et après lui.

Son rôle a été déterminant dans la rédaction de l’avis consultatif de la CIJ sur la question des liens entre le sultan de l’Empire chérifien marocain et les populations sahraouies avant la colonisation du territoire par l’Espagne.

Il a en effet réussi à introduire la confusion dans la réponse sur la confirmation des liens d’allégeance des populations concernées en suggérant l’organisation d’un référendum de confirmation de ces liens.

C’est finalement M. Bedjaoui, aujourd’hui en exil, qui a donné corps à cette arnaque qui, au final, est en train de plomber le régime algérien dans une spirale dont il peine à sortir.

Le Royaume du Maroc en a souffert aussi. Il a subi un chantage régulier des « Institutions Internationales », notamment l’Union européenne.

M. Bedjaoui a entraîné Alger dans une démarche diplomatique qui a fait de la question du Sahara l’alpha et l’oméga de toute la politique étrangère de l’Algérie.

Il est important de préciser que, pour défendre cette cause, Alger a fonctionnarisé un grand nombre de personnalités, pour la plupart des Mauritaniens, des renégats marocains de l’intérieur (l’ancien président de la RASD, Mohamed Abdelaziz, en fait partie) et des Sahraouis dont un grand nombre est retourné depuis, au Maroc dans le cadre d’une grâce royale générale émise par feu Sa Majesté Hassan II.

Le plus actif d’entre eux, Bachir Bouchraya, prétendument représentant du Polisario en Europe, est mauritanien. Il a été recruté pour la qualité de ses interventions sur les chaînes internationales.

Il s’est récemment attaqué à LFI pour son abstention dans le vote de l’Union européenne sur la question des produits issus du Sahara.

Cette nouvelle déconvenue algérienne en Europe, après l’UA et l’ONU, a en effet été rendue possible par ce vote LFI. Mais l’attaque est malvenue et brouille encore plus l’image de la diplomatie algérienne et ceux qui sont à son service.

LFI est le seul parti, représenté au parlement en France, qui condamne fermement Israël génocidaire. C’est le seul parti ouvertement pro-Gaza, et ce pour des raisons historiques et politiques.

Gaza fait partie de la Palestine, telle qu’elle est reconnue par la communauté internationale, qui la place aux côtés d’Israël. Idem pour le Sahara qui a toujours été marocain.

C’est la colonisation qui a créé les frontières artificielles qui plombent Palestine et Maroc.

Les deux pays ont accepté la perte de territoire pour se conformer à la nouvelle donne géopolitique née de l’après-guerre, et les deux refusent leur démantèlement avec l’appui de cette même communauté internationale (voir les votes onusiens).

Sur ce registre, on peut dire qu’il est tout de même étrange de constater que l’Algérie, qui consacre des budgets énormes pour dénoncer la colonisation, se mobilise avec encore plus d’énergie pour défendre le tracé des frontières issues du colonialisme.

Par Bargach Larbi


Lundi 8 Décembre 2025

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