Le commerce extérieur marocain à l’épreuve d’un nouvel ordre mondial
Trump n’a pas besoin de tweets pour perturber les économies. Il suffit de cent jours à la Maison-Blanche pour que les signaux commerciaux changent de ton – et le Maroc commence déjà à en ressentir les secousses.
Le dernier rapport de l’Office des Changes sur les échanges extérieurs marocains à fin mars 2025 sonne comme une alerte pour les économistes réalistes, ceux qu’on pourrait appeler les "économistes du bon sens". Hors énergie et hors phosphates, les chiffres révèlent une dynamique préoccupante : la demande adressée au Maroc semble sérieusement affectée.
Exportations : une croissance fictive ?
Officiellement, les exportations marocaines ont progressé de +1,5 % à 116,1 milliards de dirhams par rapport à la même période de 2024. Mais si l’on isole les phosphates et dérivés — en hausse spectaculaire de +18,2 % (soit +3,1 milliards DH) — le tableau s’assombrit nettement.
Sans cet effet dopant, la croissance des exportations chute virtuellement à zéro, voire devient négative sur des secteurs stratégiques :
Automobile : -7,8 % (perte de 3,1 Mds DH), principalement sur le segment de la construction (-23,7 %).
Électronique : -11,6 %, avec un effondrement des composants électroniques (-49,1 %).
Agroalimentaire : -7,7 % pour l’industrie de transformation.
Textile et cuir : -1,4 %, un secteur qui peine à retrouver son souffle.
Hormis l’aéronautique, qui enregistre un léger rebond (+15 %), et les ventes agricoles brutes (+7,5 %), la demande étrangère pour les produits industriels marocains s’érode clairement. Cela pourrait indiquer un retournement de cycle dans les chaînes de valeur mondialisées, sous pression des relocalisations et des nouvelles barrières commerciales américaines.
Importations : croissance mais essoufflement hors énergie
Les importations ont augmenté de +6,9 %, atteignant 187,7 milliards de DH. Mais ce chiffre est à nuancer : la facture énergétique est quasi stable (+0,5 %), ce qui signifie que l’essentiel de la hausse provient de produits manufacturés ou alimentaires.
Et là aussi, l’évolution intrigue :
Produits alimentaires : +9,4 %, avec un bond des achats de maïs (+58 %) et d’animaux vivants.
Produits bruts : +27,6 %, dont soufre et minerais (matières premières non transformées).
Produits d’équipement : +6,1 %, mais concentrée sur quelques machines spécialisées.
Produits finis de consommation : +8,7 %, notamment en pharmaceutique et mobilier.
Mais derrière cette dynamique, on observe aussi une forme de "réassurance" de la consommation intérieure, potentiellement liée à des anticipations d’instabilité. La hausse des importations de médicaments et de matières premières pourrait être interprétée comme une volonté de sécuriser les chaînes d’approvisionnement dans un contexte géopolitique devenu plus incertain.
Un déficit commercial qui se creuse
Le déficit commercial bondit de +16,9 %, atteignant 71,6 milliards de DH contre 61,2 Mds un an plus tôt. Le taux de couverture s’effrite à 61,8 %, contre 65,1 % l’an dernier. Autrement dit, malgré des exportations légèrement en hausse, le Maroc importe toujours bien plus qu’il n’exporte, et l’écart se creuse.
Trump, dédollarisation, et demande mondiale : un effet combiné ?
La nouvelle politique américaine, à coups de sanctions, de hausse de droits de douane, et de repli sur l’emploi local (Buy American Act, relocalisations incitées), impacte clairement les chaînes d’approvisionnement mondiales.
Les tensions monétaires n’aident pas : avec la perte progressive d’influence du dollar dans certaines zones, et la volatilité croissante des marchés, les importateurs internationaux privilégient des fournisseurs plus proches ou plus stables.
Le Maroc, exportateur extraverti mais peu diversifié, se retrouve ainsi plus vulnérable aux soubresauts de la demande internationale.
Le dernier rapport de l’Office des Changes sur les échanges extérieurs marocains à fin mars 2025 sonne comme une alerte pour les économistes réalistes, ceux qu’on pourrait appeler les "économistes du bon sens". Hors énergie et hors phosphates, les chiffres révèlent une dynamique préoccupante : la demande adressée au Maroc semble sérieusement affectée.
Exportations : une croissance fictive ?
Officiellement, les exportations marocaines ont progressé de +1,5 % à 116,1 milliards de dirhams par rapport à la même période de 2024. Mais si l’on isole les phosphates et dérivés — en hausse spectaculaire de +18,2 % (soit +3,1 milliards DH) — le tableau s’assombrit nettement.
Sans cet effet dopant, la croissance des exportations chute virtuellement à zéro, voire devient négative sur des secteurs stratégiques :
Automobile : -7,8 % (perte de 3,1 Mds DH), principalement sur le segment de la construction (-23,7 %).
Électronique : -11,6 %, avec un effondrement des composants électroniques (-49,1 %).
Agroalimentaire : -7,7 % pour l’industrie de transformation.
Textile et cuir : -1,4 %, un secteur qui peine à retrouver son souffle.
Hormis l’aéronautique, qui enregistre un léger rebond (+15 %), et les ventes agricoles brutes (+7,5 %), la demande étrangère pour les produits industriels marocains s’érode clairement. Cela pourrait indiquer un retournement de cycle dans les chaînes de valeur mondialisées, sous pression des relocalisations et des nouvelles barrières commerciales américaines.
Importations : croissance mais essoufflement hors énergie
Les importations ont augmenté de +6,9 %, atteignant 187,7 milliards de DH. Mais ce chiffre est à nuancer : la facture énergétique est quasi stable (+0,5 %), ce qui signifie que l’essentiel de la hausse provient de produits manufacturés ou alimentaires.
Et là aussi, l’évolution intrigue :
Produits alimentaires : +9,4 %, avec un bond des achats de maïs (+58 %) et d’animaux vivants.
Produits bruts : +27,6 %, dont soufre et minerais (matières premières non transformées).
Produits d’équipement : +6,1 %, mais concentrée sur quelques machines spécialisées.
Produits finis de consommation : +8,7 %, notamment en pharmaceutique et mobilier.
Mais derrière cette dynamique, on observe aussi une forme de "réassurance" de la consommation intérieure, potentiellement liée à des anticipations d’instabilité. La hausse des importations de médicaments et de matières premières pourrait être interprétée comme une volonté de sécuriser les chaînes d’approvisionnement dans un contexte géopolitique devenu plus incertain.
Un déficit commercial qui se creuse
Le déficit commercial bondit de +16,9 %, atteignant 71,6 milliards de DH contre 61,2 Mds un an plus tôt. Le taux de couverture s’effrite à 61,8 %, contre 65,1 % l’an dernier. Autrement dit, malgré des exportations légèrement en hausse, le Maroc importe toujours bien plus qu’il n’exporte, et l’écart se creuse.
Trump, dédollarisation, et demande mondiale : un effet combiné ?
La nouvelle politique américaine, à coups de sanctions, de hausse de droits de douane, et de repli sur l’emploi local (Buy American Act, relocalisations incitées), impacte clairement les chaînes d’approvisionnement mondiales.
Les tensions monétaires n’aident pas : avec la perte progressive d’influence du dollar dans certaines zones, et la volatilité croissante des marchés, les importateurs internationaux privilégient des fournisseurs plus proches ou plus stables.
Le Maroc, exportateur extraverti mais peu diversifié, se retrouve ainsi plus vulnérable aux soubresauts de la demande internationale.
Un signal faible à ne pas négliger
Ce rapport n’est pas un électrochoc, mais plutôt un signal faible qui, si l’on n’y prend pas garde, annonce une tendance lourde. Les chiffres — débarrassés de l’effet des phosphates — montrent une stagnation, voire un recul de la performance exportatrice marocaine.
À l’heure où les grandes puissances rebattent les cartes de la mondialisation, le Maroc ne peut plus se contenter d’être un acteur passif. Il lui faudra diversifier ses débouchés, monter en gamme et surtout repenser son modèle commercial face à un monde de plus en plus instable et fragmenté.
À l’heure où les grandes puissances rebattent les cartes de la mondialisation, le Maroc ne peut plus se contenter d’être un acteur passif. Il lui faudra diversifier ses débouchés, monter en gamme et surtout repenser son modèle commercial face à un monde de plus en plus instable et fragmenté.
Anticiper pour ne pas subir : une cellule de crise export et une veille stratégique avec l’ASMEX s’imposent
Face aux signaux de ralentissement de la demande extérieure – hors phosphates – et à la montée des incertitudes liées à la politique commerciale américaine, le gouvernement marocain se doit de réagir sans attendre. Il est impératif de mettre en place une commission de veille stratégique conjointe avec l’ASMEX (Association Marocaine des Exportateurs), chargée d’analyser en temps réel les dynamiques des marchés internationaux, identifier les secteurs en tension, et proposer des mesures correctives rapides.
En parallèle, la création d’une cellule de crise dédiée à la résilience des exportations s’impose : elle permettrait d'accompagner les filières les plus touchées (automobile, électronique, textile…), sécuriser les carnets de commandes, activer des soutiens ciblés, et explorer de nouveaux débouchés. Dans un monde où la géopolitique rebat les cartes du commerce mondial, le Maroc ne peut plus se permettre de naviguer à vue. Il doit anticiper les chocs plutôt que les subir.
En parallèle, la création d’une cellule de crise dédiée à la résilience des exportations s’impose : elle permettrait d'accompagner les filières les plus touchées (automobile, électronique, textile…), sécuriser les carnets de commandes, activer des soutiens ciblés, et explorer de nouveaux débouchés. Dans un monde où la géopolitique rebat les cartes du commerce mondial, le Maroc ne peut plus se permettre de naviguer à vue. Il doit anticiper les chocs plutôt que les subir.