Le délai était un mirage : Washington entre en guerre sans prévenir

Les États-Unis aux portes d’un conflit majeur : promesse de délai ou calcul stratégique ?


Rédigé par La rédaction le Dimanche 22 Juin 2025

Trump a ordonné des frappes contre les sites nucléaires iraniens, malgré sa promesse d’un délai. Une stratégie surprise qui fait basculer le Moyen-Orient dans l’inconnu :
Trump frappe l’Iran malgré ses propres annonces de temporisation
Une guerre ouverte se profile après des frappes coordonnées sur les sites nucléaires
La stratégie de surprise américaine bouleverse l’équilibre régional



Guerre en trompe-l’œil : le « délai » de Trump n’était qu’un écran de fumée

Donald Trump a beau multiplier les postures provocantes et les déclarations théâtrales, rares sont les observateurs qui s’attendaient à ce que le président américain ordonne des frappes massives contre les sites nucléaires iraniens à peine 48 heures après avoir promis à Téhéran un « délai de deux semaines » pour désamorcer la tension. Ce qui ressemblait à une fenêtre diplomatique s’est révélé être, en réalité, une ruse stratégique bien huilée. L’administration américaine, loin d’improviser, semble avoir orchestré une offensive préparée de longue date, habilement dissimulée derrière une façade de retenue diplomatique.

Dans la nuit du 22 juin, les États-Unis ont frappé trois sites nucléaires iraniens : Fordo, Natanz et Ispahan. Fordo, considéré comme l’un des bastions souterrains du programme d’enrichissement d’uranium iranien, est construit à flanc de montagne, précisément pour résister aux frappes aériennes classiques. Mais les bombes américaines de type GBU-57, surnommées « busters de bunkers », sont conçues pour perforer plus de 60 mètres de béton renforcé. L’effet psychologique est à la hauteur du dispositif militaire : le message est clair, aucun sanctuaire n’est à l’abri.

Le ministre iranien des Affaires étrangères, Abbas Araghchi, n’a pas tardé à dénoncer cette attaque comme « un acte de guerre à conséquences durables ». Et de fait, l’Iran a répliqué dans la foulée en lançant une salve de missiles vers Israël, notamment en direction de Jérusalem, plongeant la région dans une incertitude explosive.

Ce basculement brutal vers l’intervention militaire soulève une question fondamentale : Donald Trump agit-il sous l’effet de l’émotion ou poursuit-il un agenda bien défini ? Si ses propos contradictoires laissent parfois planer le doute, les faits trahissent une planification méticuleuse. Selon le Wall Street Journal, Trump a discrètement préparé ses partisans à l’idée d’une guerre contre l’Iran, prenant soin de distinguer cette action ciblée de l’invasion de l’Irak en 2003 à laquelle il s’était opposé.

La fameuse promesse d’un « délai de deux semaines » apparaît rétrospectivement comme une diversion stratégique : un leurre diplomatique destiné à tromper Téhéran et à éviter une préparation défensive trop visible. Le président américain a visiblement préféré l’effet de surprise à la logique de l’ultimatum.

L’implication directe des États-Unis dans ce conflit représente un revirement majeur dans la politique étrangère de Donald Trump. Lui qui, depuis son élection, n’a cessé de dénoncer les « guerres inutiles » au Moyen-Orient, semble désormais prêt à engager son pays dans un conflit aux ramifications incalculables. Pour L’Orient-Le Jour, Trump joue un coup de poker diplomatique : frapper fort, sans aller jusqu’à l’annihilation totale, pour contraindre l’Iran à la table des négociations.

Cette stratégie, à mi-chemin entre démonstration de force et calcul géopolitique, pourrait être qualifiée de « guerre pour la paix ». Mais elle comporte un risque majeur : en poussant Téhéran dans ses retranchements, elle pourrait précipiter une escalade incontrôlable qui déborde largement le cadre bilatéral américano-iranien.

Du côté iranien, l’onde de choc est palpable. Le régime de la République islamique, déjà affaibli sur le plan interne, se retrouve face à un dilemme stratégique : riposter frontalement au risque de provoquer une intervention plus massive, ou temporiser pour préserver ses capacités et son influence régionale. Comme l’écrivait déjà Al-Jazeera à propos de la crise post-Soleimani, l’Iran pourrait opter pour une réponse asymétrique et limitée, comme des attaques indirectes par ses réseaux alliés (Hezbollah, milices chiites irakiennes, Houthis au Yémen…).

Mais cette fois, l’équation est plus périlleuse. En touchant des sites nucléaires jugés intouchables, Washington a franchi un seuil symbolique. Téhéran ne peut plus se contenter d’un simple jeu d’apparence : il lui faut réaffirmer sa puissance sans offrir le prétexte d’une guerre totale.

Dans cette dynamique, Israël apparaît à la fois comme l’initiateur et le bénéficiaire stratégique de l’escalade. Le Premier ministre Benyamin Nétanyahou n’a pas caché sa satisfaction, saluant une « alliance historique » avec Washington et remerciant Trump pour « avoir brisé le tabou ». L’attaque conjointe américano-israélienne contre les sites iraniens vient concrétiser des années de tensions et d’opérations clandestines contre le programme nucléaire iranien.

Mais l’euphorie pourrait être de courte durée. Si l’Iran décide d’activer ses réseaux régionaux en réponse, Israël se retrouvera en première ligne de représailles imprévisibles.

Ce qui se joue aujourd’hui dépasse largement les seuls États-Unis, Israël et l’Iran. Le spectre d’un embrasement régional n’a jamais été aussi tangible. Les voisins du Golfe, la Turquie, l’Égypte, mais aussi la Russie et la Chine, pourraient être contraints de réagir, ne serait-ce que pour protéger leurs intérêts stratégiques et économiques. Le sort du Liban, de la Syrie, ou même de l’Irak pourrait à nouveau basculer.

Dans cette poudrière diplomatique, l'Europe reste pour l'heure silencieuse, comme paralysée par l’ampleur de la crise. Quant au Maroc, fidèle à sa posture de non-ingérence et de défense du multilatéralisme, il observe avec inquiétude ce glissement vers un conflit ouvert dont les conséquences économiques et énergétiques pourraient se faire sentir bien au-delà de la région.

Le délai évoqué par Trump n’était pas une ouverture, mais une manœuvre. Derrière la façade d’une diplomatie dissuasive, c’est une logique de confrontation qui s’est mise en marche, au risque de faire basculer tout l’échiquier moyen-oriental. Le Moyen-Orient, habitué aux menaces diffuses et aux frappes ciblées, entre peut-être dans une ère nouvelle : celle d’une guerre ouverte mais aux contours flous, où le réel se confond avec l’effet d’annonce, et où chaque calcul diplomatique peut devenir une erreur fatale.

Trump, Iran, Israël, guerre, nucléaire, Moyen-Orient, Fordo, frappe, Natanz, diplomatie





Dimanche 22 Juin 2025
Dans la même rubrique :