Le risque technocrate




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PLAN DU DECONFINEMENT
 
Les élus locaux et régionaux, déjà absents lors du confinement, n’ont pas l’opportunité de retrouver quelque visibilité dans la transition ouverte par le déconfinement.
 

Nous y voilà, donc! C’est le plus délicat! Le processus de déconfinement se met en place, comme l’a annoncé le Chef du gouvernement devant le Parlement, le mercredi 10 juin. Si le dispositif de confinement a globalement bien fonctionné sur le terrain, rien n’est acquis par avance, semble-t-il, pour ce que l’on appelle dans le jargon officiel la phase 3. L’état d’urgence sanitaire déclaré le 20 mars est prolongé jusqu’au 10 juillet 2020. La mise en oeuvre du plan agressif d’allégement des restrictions du confinement suivant la situation épidémiologique des régions et des provinces se fait à compter du jeudi 10 juin courant. Des évaluations hebdomadaires seront faites par des comités ad hoc baptisés de veille et de suivi.
 

Qu’en penser? L’absence des élus des collectivités locales. Difficile de retenir l’on ne sait trop quel argumentaire d’éventuelle justification. Ces comités ont une mission d’évaluation. A cette fin, leurs membres ont un statut dans l’administration et dans l’appareil d’Etat. Ils ont accès à des informations recoupées établies par leurs services respectifs; personne ne peut en disconvenir. Mais les citoyens où sont-ils? Qui les représente? Qui porte leur parole, autrement dit leurs contraintes, leurs besoins et leurs attentes?
 

L’on a déjà vu, depuis près de trois mois, la place et le rôle des agents auxiliaires de l’administration territoriale -les moqadems. Ils étaient le pivot, le relais du dispositif de confinement sur le terrain, dans les villes et les villages, dans les quartiers même.

 

Nul ne peut contester leur mobilisation, leur dévouement, leur disponibilité ainsi que la proximité qu’ils ont avec les administrés et les citoyens. Ils sont, à ce titre, un maillon clé des relations avec les populations et du contrôle social. Mais ce système, tel qu’en lui-même, relève de l’administration et, au premier chef, du département régalien de l’Intérieur. Le nouveau visage institutionnel du Maroc consacré par la Constitution de 2011 se fonde également sur la régionalisation et, plus globalement, sur le référent de la démocratie participative. Or, en l’état, celle-ci ne trouve pas de place dans la mise en oeuvre et l’accompagnement du processus de déconfinement. Les élus locaux et régionaux en sont absents.
 

Certains expliquent que l’on a voulu éviter des intérêts électoralistes et politiciens. Un argument peu recevable puisque la composition des comités nouvellement institués sont pratiquement entre les mains de l’Etat et de ses représentants. D’autres, sans le dire ouvertement, s’inscrivent plutôt dans un schéma culturel, voire «technocratique». Un palier supplémentaire dans la reconquête progressive d’un périmètre qui avait été quelque peu cantonné depuis des années par une transition démocratique qui avait remis au premier plan les partis politiques. Il faut dire que si l’Etat est la seule institution en mesure de faire face à des circonstances exceptionnelles, c’est parce que c’est sa mission d’assurer la continuité de la vie sociale par tous les moyens mobilisables. Il est armé à cette fin: par ses fonctions d’ordre public et de sécurité -en l’espèce sanitaire; mais aussi par ses ressources humaines et son maillage territorial à travers l’ensemble du Royaume.
 

Au final, les élus, déjà absents lors du confinement -ce qui était compréhensible en termes fonctionnels-, n’ont pas l’opportunité de retrouver quelque visibilité dans la transition ouverte par le déconfinement. Aux yeux des citoyens, leur perception, déjà sujette à caution pour d’autres raisons encore pesantes, conforte un ressenti populaire peu valorisant. La démocratie participative n’y gagne pas. Cela fait l’affaire de qui? De tout un courant de pensée de plus en plus prégnant, qui entend faire son miel d’une telle situation...
 

Par Mustapha SHIMI sur www.maroc-hebdo.press.ma



Jeudi 10 Décembre 2020

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