Il fut un temps où le concept d’« autoroute de l’eau » paraissait relever de la science-fiction hydraulique. Transférer massivement des millions de mètres cubes d’un bassin fluvial à un autre, sur des centaines de kilomètres, pour alimenter en continu des villes entières : l’idée semblait aussi ambitieuse que coûteuse. Et pourtant, en 2025, cette utopie logistique est devenue réalité au Maroc. Un an après la mise en service de la première autoroute de l’eau entre le Sebou et le Bouregreg, les résultats dépassent toutes les attentes.
Lancée en urgence en 2023 à l’initiative de Sa Majesté Mohammed VI, et coordonnée par le ministre de l’Équipement et de l’Eau Nizar Baraka, cette infrastructure stratégique répond à un besoin aussi vital qu’incontournable : sécuriser l’alimentation en eau potable de Rabat, Casablanca et Mohammedia, une zone où vivent entre 10 et 12 millions de Marocains. Dans un contexte de sécheresse répétée et de pression démographique, le nord du pays, plus riche en ressources hydriques, devait devenir le fournisseur des régions plus arides et urbanisées du centre.
Concrètement, le projet s’est déployé en deux grandes phases. La première, qualifiée d’urgente, consistait à connecter le bassin du Sebou au barrage Sidi Mohammed Ben Abdellah via une conduite de 70 kilomètres. La seconde, actuellement en cours, vise à prolonger cette ligne vers le bassin de l’Oum Er-Rbia sur 340 kilomètres supplémentaires. Cette nouvelle dorsale hydrique constitue l’épine dorsale d’un futur réseau national de transfert d’eau entre les bassins.
Les résultats sont spectaculaires. En une seule année, 468 millions de mètres cubes d’eau ont été transférés, dépassant de loin les prévisions initiales, qui tablaient sur 350 à 400 Mm³/an. Cela représente une moyenne de 39 m³/seconde et les projections pour 2025 sont encore plus ambitieuses : 15 m³/seconde, soit 514 millions de m³. Ces chiffres donnent le vertige, mais ils traduisent aussi un tournant historique dans la gestion de l’eau au Maroc. Désormais, l’eau ne dépend plus uniquement du ciel ou des nappes : elle circule comme une marchandise précieuse, à travers des tuyaux et des vannes, selon une cartographie rationnelle des besoins et des excédents.
Mais cette prouesse technique n’est pas exempte de limites. D’abord, les coûts : ce type d’infrastructure demande des investissements gigantesques, tant en construction qu’en entretien. Ensuite, la dépendance énergétique : même si une partie du réseau est alimentée par des sources renouvelables, la pompe constante de l’eau sur de telles distances nécessite une puissance continue. Enfin, la question écologique : détourner les eaux d’un bassin vers un autre n’est jamais neutre, ni pour les écosystèmes ni pour les usages locaux, notamment agricoles.
Et pourtant, face à l’urgence, peu d’alternatives aussi efficaces s’imposent. La récente amélioration des réserves d’eau, liée à une saison pluvieuse favorable depuis septembre 2024, a permis d’assurer l’approvisionnement pour un an et trois mois. Mais cette embellie reste inégale selon les régions. D’où l’intérêt stratégique des autoroutes de l’eau : elles permettent d’atténuer les déséquilibres géographiques en redistribuant l’eau de manière solidaire.
À l’avenir, d’autres liaisons pourraient voir le jour, notamment vers Marrakech, le Souss et l’Oriental. Le Maroc invente ainsi, à sa manière, une diplomatie interne de l’eau, où les régions les mieux dotées deviennent garantes de la survie des autres.
Les autoroutes de l’eau ne sont pas seulement des canalisations géantes. Elles sont l’illustration d’une pensée politique moderne : l’eau n’est plus gérée localement, elle est planifiée à l’échelle du territoire national, avec la même rigueur qu’un réseau autoroutier ou électrique. Dans un pays menacé par la sécheresse, cette fluidité planifiée pourrait bien être la clé d’un avenir résilient.
Lancée en urgence en 2023 à l’initiative de Sa Majesté Mohammed VI, et coordonnée par le ministre de l’Équipement et de l’Eau Nizar Baraka, cette infrastructure stratégique répond à un besoin aussi vital qu’incontournable : sécuriser l’alimentation en eau potable de Rabat, Casablanca et Mohammedia, une zone où vivent entre 10 et 12 millions de Marocains. Dans un contexte de sécheresse répétée et de pression démographique, le nord du pays, plus riche en ressources hydriques, devait devenir le fournisseur des régions plus arides et urbanisées du centre.
Concrètement, le projet s’est déployé en deux grandes phases. La première, qualifiée d’urgente, consistait à connecter le bassin du Sebou au barrage Sidi Mohammed Ben Abdellah via une conduite de 70 kilomètres. La seconde, actuellement en cours, vise à prolonger cette ligne vers le bassin de l’Oum Er-Rbia sur 340 kilomètres supplémentaires. Cette nouvelle dorsale hydrique constitue l’épine dorsale d’un futur réseau national de transfert d’eau entre les bassins.
Les résultats sont spectaculaires. En une seule année, 468 millions de mètres cubes d’eau ont été transférés, dépassant de loin les prévisions initiales, qui tablaient sur 350 à 400 Mm³/an. Cela représente une moyenne de 39 m³/seconde et les projections pour 2025 sont encore plus ambitieuses : 15 m³/seconde, soit 514 millions de m³. Ces chiffres donnent le vertige, mais ils traduisent aussi un tournant historique dans la gestion de l’eau au Maroc. Désormais, l’eau ne dépend plus uniquement du ciel ou des nappes : elle circule comme une marchandise précieuse, à travers des tuyaux et des vannes, selon une cartographie rationnelle des besoins et des excédents.
Mais cette prouesse technique n’est pas exempte de limites. D’abord, les coûts : ce type d’infrastructure demande des investissements gigantesques, tant en construction qu’en entretien. Ensuite, la dépendance énergétique : même si une partie du réseau est alimentée par des sources renouvelables, la pompe constante de l’eau sur de telles distances nécessite une puissance continue. Enfin, la question écologique : détourner les eaux d’un bassin vers un autre n’est jamais neutre, ni pour les écosystèmes ni pour les usages locaux, notamment agricoles.
Et pourtant, face à l’urgence, peu d’alternatives aussi efficaces s’imposent. La récente amélioration des réserves d’eau, liée à une saison pluvieuse favorable depuis septembre 2024, a permis d’assurer l’approvisionnement pour un an et trois mois. Mais cette embellie reste inégale selon les régions. D’où l’intérêt stratégique des autoroutes de l’eau : elles permettent d’atténuer les déséquilibres géographiques en redistribuant l’eau de manière solidaire.
À l’avenir, d’autres liaisons pourraient voir le jour, notamment vers Marrakech, le Souss et l’Oriental. Le Maroc invente ainsi, à sa manière, une diplomatie interne de l’eau, où les régions les mieux dotées deviennent garantes de la survie des autres.
Les autoroutes de l’eau ne sont pas seulement des canalisations géantes. Elles sont l’illustration d’une pensée politique moderne : l’eau n’est plus gérée localement, elle est planifiée à l’échelle du territoire national, avec la même rigueur qu’un réseau autoroutier ou électrique. Dans un pays menacé par la sécheresse, cette fluidité planifiée pourrait bien être la clé d’un avenir résilient.