Les cafés littéraires : ces bulles de culture qui fleurissent au Maroc


Rédigé par Salma Chmanti Houari le Lundi 6 Octobre 2025

Il y a dans l’air un parfum de café et de papier. Entre deux gorgées d’espresso et trois pages griffonnées, une nouvelle génération de Marocains redécouvre le plaisir simple de la lecture… mais autrement. Le café littéraire, ce lieu hybride entre salon, librairie et refuge artistique, s’impose doucement dans le paysage urbain du royaume. De Casablanca à Tanger, il attire les rêveurs, les curieux, les étudiants, les artistes, et tous ceux qui veulent parler de livres sans chuchoter.



Une mode qui sent bon l’encre et le cappuccino

Ces dernières années, les cafés littéraires ont fleuri un peu partout. À Rabat, le “Kulte Gallery & Editions” réunit auteurs et lecteurs autour de débats chaleureux ; à Casablanca, “Le 18 Café Culturel” mêle art visuel et lecture publique ; à Marrakech, des événements poétiques se glissent dans les ruelles du Guéliz.

Ce n’est plus seulement un lieu où l’on commande un latte, mais un espace de conversation, de lenteur, de découverte. Dans une société souvent happée par la vitesse et le numérique, ces lieux offrent une parenthèse analogue, une respiration. Ici, on parle de tout : du dernier roman marocain traduit en français, de la poésie d’Abdellatif Laâbi, ou du livre qu’on n’a jamais terminé mais qu’on jure de reprendre.


Un retour à l’humain dans une époque d’écran

Le café littéraire séduit parce qu’il réintroduit une chose rare : le temps partagé.
On y rencontre des lecteurs de tout âge, parfois des écrivains en herbe, des photographes, des enseignants, des voyageurs. Les discussions dépassent souvent le simple thème du livre pour s’élargir à la société, aux idées, aux rêves. C’est une micro-communauté éphémère, mais sincère.
 

Ce qui attire surtout, c’est cette authenticité tranquille. On n’y vient pas pour “paraître cultivé”, mais pour s’autoriser un moment d’échange sans filtre. Dans un monde saturé d’opinions éclatées sur les réseaux, le café littéraire revalorise la parole calme, la contradiction élégante, l’écoute.


Un renouveau culturel local

Il y a aussi dans ce phénomène un parfum de renaissance culturelle marocaine. Les jeunes générations veulent recréer du lien entre littérature, art et quotidien. Beaucoup d’initiatives locales émergent : petits clubs de lecture, soirées “slam & poésie”, ventes de livres d’auteurs marocains auto-édités, cafés thématiques dans les médinas ou au bord de mer.
 

Ces lieux participent à rendre la culture plus accessible. Pas besoin d’être universitaire pour y parler de littérature; une tasse de café suffit. Et pour certains, c’est même un tremplin : plusieurs auteurs marocains aujourd’hui connus ont fait leurs premiers pas dans ces cercles ouverts, où les mots circulent librement.


Le charme d’un style de vie “slow”

Au fond, le café littéraire, c’est plus qu’un lieu : c’est un état d’esprit.
Il traduit une envie de ralentir, de redonner du sens aux instants simples. Commander un café, lire quelques pages, noter une idée, écouter quelqu’un lire à voix haute… c’est tout un rituel. On y trouve une esthétique de la lenteur, presque méditative, qui contraste avec le bruit du dehors.
 

Certains y viennent chaque semaine, d’autres une fois par mois, mais tous repartent avec quelque chose : un livre recommandé, une phrase marquante, ou simplement une impression de calme retrouvé. C’est aussi cela, la beauté du phénomène : un retour au plaisir discret de l’instant présent.


Et demain ?

Le café littéraire marocain reste encore un espace en construction. Mais il prend racine.
Des écoles, des librairies, des collectifs d’auteurs s’y intéressent. Les municipalités commencent même à les inclure dans leurs projets culturels. Et à mesure que la lecture numérique se banalise, ces lieux physiques gagnent en valeur symbolique : ils deviennent des havres d’authenticité dans un monde pixelisé.
 

Peut-être que demain, chaque quartier aura son petit coin où l’on viendra lire, écouter, débattre ou simplement respirer le parfum du papier neuf. Une révolution douce, presque invisible, mais ô combien précieuse.


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Lundi 6 Octobre 2025
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