Les écoles de management au Maroc : entre quête d’excellence et dépendance aux accréditations


le Lundi 6 Octobre 2025

Par Dr Az-Eddine Bennani

En tant que quelqu’un qui a assisté à l’introduction du système des accréditations en France, qui n’a pas été étranger à la construction de ce que l’on appelait à l’époque les “Sup de Co” devenues aujourd’hui les écoles de management et qui a également assisté à leur évolution depuis plus de trois décennies, je souhaite partager un regard lucide sur cette course mondiale à la certification académique.



Une mécanique d’influence plus qu’un gage de qualité.

Les accréditations internationales (EQUIS, AACSB, AMBA, etc.) ont été conçues à l’origine pour garantir la qualité académique et la rigueur scientifique. Mais dans la réalité, elles se sont transformées en instruments d’influence et de standardisation.

Aujourd’hui, beaucoup d’écoles ne peuvent plus rien entreprendre sans l’aval de ces organismes, dont la gouvernance ignore souvent la réalité du terrain, qu’il s’agisse de la formation ou de la recherche. Ce système, censé valoriser la diversité des approches, a fini par uniformiser les modèles pédagogiques, freinant l’innovation, la liberté académique et l’adaptation locale.

Le Maroc, nouveau marché des accréditations.

Je trouve dommage que certaines écoles de management au Maroc reproduisent les erreurs du passé, sans tirer les leçons des dérives observées en Europe. Ces accréditations sont devenues un business lucratif : visites, rapports, renouvellements, tout se monnaye. Pour ces organismes, le Maroc représente désormais un marché stratégique, un espace de croissance après la saturation du marché européen.

Leur discours sur la qualité et l’internationalisation cache souvent une stratégie économique : celle de l’expansion d’un système fermé, fondé sur la dépendance financière et symbolique.

Les vraies références mondiales n’en ont pas besoin.

Il suffit d’observer les grandes universités qui façonnent la pensée mondiale. Harvard et le MIT (Massachusetts Institute of Technology) ne détiennent aucune accréditation EQUIS, AACSB ou AMBA. Et pourtant, elles figurent chaque année en tête des classements mondiaux. Leur excellence repose sur la confiance dans leurs propres standards, la liberté académique, la qualité de la recherche et une vision stratégique claire, non sur l’approbation d’un organisme extérieur.

Pour un modèle marocain souverain d’excellence.

Le Maroc doit s’ouvrir, dialoguer et se comparer, mais sans aliéner sa souveraineté académique. Plutôt que de courir après des labels coûteux et parfois déconnectés, il serait plus constructif de bâtir un modèle marocain d’excellence, fondé sur nos valeurs, nos besoins et nos ambitions. L’enjeu n’est pas d’obtenir une accréditation, mais de créer un système d’enseignement supérieur souverain, capable d’innover, de produire du savoir et de contribuer réellement au développement du pays.

Par Dr Az-Eddine Bennani




Lundi 6 Octobre 2025
Dans la même rubrique :