Les recettes fiscales explosent, mais à quel prix pour les contribuables ?

Analyse, 5 questions de l'opposition et 5 questions de la majorité


Rédigé par le Mardi 22 Octobre 2024

Le Projet de Loi de Finances 2025, bien que salué pour ses efforts en matière de relance économique et d'accroissement des recettes fiscales, s'accompagne d'une hausse généralisée des impôts et taxes. Cette politique, qui vise à renforcer les capacités budgétaires de l'État, risque de peser lourdement sur les ménages et les entreprises, avec des effets potentiellement néfastes sur la consommation et l'investissement à long terme.



PLF 2025 : Une fiscalité lourde qui freine l'élan de la relance économique

Le Projet de Loi de Finances (PLF) 2025, malgré des prévisions optimistes et des ambitions en matière de mobilisation des recettes fiscales, marque un tournant inquiétant pour les ménages et les entreprises marocaines. Derrière une croissance spectaculaire des recettes fiscales de 18,47 %, se cache une augmentation généralisée des impôts et des taxes, qui risque de pénaliser lourdement la consommation et l'investissement, deux moteurs essentiels de la relance économique.

Le PLF 2025 prévoit des recettes fiscales atteignant 368,8 milliards de dirhams (MMDH), une hausse notable de 18,47 % par rapport à l'année précédente. Bien que cela témoigne d'une gestion efficace des mécanismes de recouvrement, cette croissance repose sur une augmentation significative de presque tous les impôts et taxes, et ce, malgré les réaménagements fiscaux annoncés.

Ainsi, l’impôt sur le revenu (IR) progresse de 15,37 %, atteignant 61 MMDH. Si cette hausse est justifiée par l'amélioration de la masse salariale, elle démontre également que la réforme fiscale prétendument favorable aux contribuables ne compense pas les effets négatifs d'une pression fiscale accrue sur les classes moyennes et les foyers les plus vulnérables. Cette augmentation va peser sur la consommation des ménages, ce qui pourrait freiner la dynamique économique à court terme.

De plus, l'impôt sur les sociétés (IS) enregistre une augmentation de 21,4 %, avec des recettes atteignant 74,1 MMDH. Alors que le gouvernement se félicite de cette hausse en raison des bénéfices des entreprises, elle met en lumière un fardeau fiscal grandissant pour les entreprises, notamment les PME. Cette pression fiscale accrue risque de ralentir l'investissement privé, alors même que la relance post-pandémie repose sur la compétitivité des entreprises et leur capacité à innover.

L'augmentation de la Taxe sur la Valeur Ajoutée (TVA), qui atteint 19,88 % pour la TVA à l'intérieur et 11,39 % pour celle collectée à la douane, pose un réel problème pour les ménages. Avec une TVA intérieure estimée à 44,9 MMDH en 2025, cette hausse reflète certes la reprise de la consommation intérieure, mais elle pourrait avoir un effet boomerang. En effet, en augmentant la TVA, le gouvernement risque d’étouffer la demande domestique, qui est l’un des piliers de la croissance économique. Les ménages, particulièrement ceux à faibles revenus, verront leur pouvoir d'achat diminuer, ce qui limitera leurs dépenses et freinera la relance.

Par ailleurs, les taxes intérieures de consommation (TIC) sur les produits énergétiques et les tabacs sont en nette progression, avec une hausse de 16,87 % pour les produits énergétiques et de 9,6 % pour les tabacs. L’augmentation des prix des carburants, déjà source de mécontentement, risque de renforcer l'inflation et d'ajouter une pression supplémentaire sur les consommateurs et les petites entreprises dépendantes des coûts énergétiques.

Le PLF 2025 prévoit une augmentation spectaculaire des droits de douane de 35,7 %, pour atteindre 21 MMDH. Cette hausse est le résultat d'une politique protectionniste visant à favoriser les produits locaux tout en taxant plus lourdement les biens importés. Si cette stratégie peut soutenir l'industrie nationale à court terme, elle comporte des risques. L'augmentation des prix des biens importés, souvent essentiels pour les consommateurs marocains, pourrait pénaliser leur accès à certains produits de base et affecter leur niveau de vie. De plus, dans un contexte de mondialisation où le commerce international joue un rôle majeur dans le développement, cette politique protectionniste pourrait se retourner contre le Maroc en décourageant les investisseurs étrangers.

La hausse généralisée des impôts et taxes, tout en étant présentée comme une nécessité pour soutenir la relance économique et financer les projets d’infrastructure, risque en réalité de produire l’effet inverse. En augmentant la pression fiscale sur les ménages et les entreprises, le gouvernement crée un climat d’incertitude qui décourage l’investissement privé et freine la consommation.

Alors que le PLF 2025 table sur des réformes fiscales pour améliorer les performances économiques, il semble ignorer l’impact négatif d’une telle politique sur les moteurs mêmes de la croissance. Le pouvoir d'achat des ménages, déjà mis à mal par la pandémie et la hausse des prix des biens essentiels, sera encore plus affecté par cette augmentation des taxes. Quant aux entreprises, en particulier les PME, elles risquent de voir leur compétitivité diminuer face à des coûts de production toujours plus élevés, ce qui ralentira l'innovation et la création d'emplois.

Le PLF 2025, bien qu’ambitieux en matière de mobilisation des recettes fiscales, repose sur une stratégie risquée d’augmentation généralisée des impôts et taxes. Si le gouvernement espère renforcer ses capacités budgétaires pour financer des projets essentiels, cette politique pourrait, en fin de compte, étouffer la relance économique en pesant sur le pouvoir d'achat des ménages et en freinant l'investissement des entreprises. Une révision en profondeur de cette stratégie fiscale est nécessaire pour assurer une relance inclusive et durable, sans compromettre la dynamique économique du pays.

Si j"étais parlementaire de l'opposition, j'aurai posé ces 5 questions à Madame la Ministre des finances

Madamer la Ministre, avec une augmentation des recettes fiscales de 18,47 %, pouvez-vous expliquer comment cette hausse généralisée des impôts et taxes, en particulier sur l'impôt sur le revenu et la TVA, pourrait encourager la consommation des ménages, alors que les classes moyennes et les plus vulnérables sont déjà fortement impactées par la hausse du coût de la vie ? Vous avez mentionné la croissance des recettes fiscales comme un signe de réussite, cependant, l'augmentation de l'impôt sur les sociétés de 21,4 % risque de pénaliser particulièrement les PME, moteurs de l'emploi et de l'innovation au Maroc. Quelles mesures spécifiques comptez-vous prendre pour éviter que cette fiscalité accrue n'étouffe leur compétitivité et leur capacité à investir ? La hausse de la TVA, tant à l'intérieur qu'à la douane, semble particulièrement problématique pour les ménages à faible revenu. Comment le gouvernement justifie-t-il cette augmentation, sachant qu'elle pourrait directement réduire le pouvoir d'achat des citoyens et étouffer la demande domestique, facteur essentiel de la relance économique ? En ce qui concerne l’augmentation des taxes sur les produits énergétiques, qui connaissent déjà une flambée des prix, comment prévoyez-vous d’atténuer les effets inflationnistes de cette politique, notamment pour les petites entreprises et les consommateurs qui subissent de plein fouet l’impact de ces hausses ? Concernant les droits de douane, votre politique protectionniste vise à soutenir l’industrie nationale. Cependant, dans un contexte de mondialisation, ne craignez-vous pas que cette hausse de 35,7 % des droits de douane ne pénalise à la fois les consommateurs marocains, en limitant leur accès à des biens essentiels, et décourage les investisseurs étrangers qui pourraient voir cette mesure comme un obstacle à l’ouverture du Maroc ?

Si j"étais parlementaire de la majorité, j'aurai posé ces 5 questions à Madame la Ministre des finances

Madame la Ministre, pouvez-vous nous expliquer comment la hausse de 18,47 % des recettes fiscales, tout en augmentant la pression fiscale, contribuera à financer des projets stratégiques essentiels pour le développement du pays, notamment dans les infrastructures et les services publics ? La politique fiscale du PLF 2025 prévoit une augmentation de l’impôt sur le revenu et sur les sociétés. Comment le gouvernement entend-il utiliser ces recettes supplémentaires pour soutenir les entreprises, en particulier les PME, et stimuler l’innovation et l’emploi dans le contexte post-pandémie ? L’augmentation de la TVA, bien que critiquée, vise à soutenir la consommation intérieure et les investissements publics. Quelles mesures d'accompagnement sont envisagées pour protéger les ménages à faibles revenus et atténuer les impacts sur leur pouvoir d'achat, afin de maintenir un équilibre entre relance économique et justice sociale ? La hausse des taxes sur les produits énergétiques et les tabacs semble nécessaire pour renforcer les capacités budgétaires de l’État. Pouvez-vous détailler comment cette augmentation s’inscrit dans une vision plus large de transition énergétique et de santé publique, et comment elle pourrait à long terme bénéficier aux citoyens marocains ? La politique protectionniste concernant les droits de douane, avec une hausse de 35,7 %, est un choix stratégique pour soutenir l’industrie locale. Comment cette stratégie s’intègre-t-elle dans la vision du gouvernement de renforcer la souveraineté économique du Maroc tout en attirant des investisseurs étrangers dans un environnement commercial mondialisé ?
 

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Mardi 22 Octobre 2024
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