Un taux global de remplissage de 40,2 %, mais des écarts inquiétants
Les chiffres sont tombés ce 12 mai : les barrages marocains affichent un taux de remplissage moyen de 40,2 %. Mais derrière cette moyenne nationale se cache une fracture hydrique de plus en plus visible entre le Nord, plutôt bien arrosé, et le Sud, toujours en souffrance.
D’après les dernières données du ministère de l’Équipement et de l’Eau, les retenues des barrages marocains ont stocké un total de 6,73 milliards de mètres cubes. C’est mieux que l’an dernier à la même date, avec une hausse de 28,7 %, soit un gain de plus de 1,5 milliard de m³. Une amélioration qui s’explique par les précipitations régulières dans certaines zones, notamment au Nord du pays, et les apports issus des reliefs montagneux. Le Loukkos, le Sebou et le Bouregreg affichent des taux de remplissage supérieurs à 60 %, apportant un relatif soulagement aux populations locales et aux agriculteurs.
Mais cette embellie est loin d’être généralisée. En plongeant vers le Centre et le Sud, les chiffres deviennent préoccupants, voire alarmants. Le bassin de l’Oum Er-Rbia, pourtant l’un des plus stratégiques du Royaume, stagne à 12,45 % de sa capacité. Le Souss-Massa ne fait pas mieux, avec un maigre 21,98 %. Quant aux régions comme le Drâa-Oued Noun ou le Guir-Ziz-Rhéris, elles peinent elles aussi à dépasser les 35 %. Ces zones, déjà fragiles sur le plan hydrique, s’enfoncent un peu plus dans la crise, notamment en raison de la rareté des pluies et de la récurrence des périodes de sécheresse.
Ce déséquilibre nord-sud n’est pas qu’une question de météo. Il révèle aussi les limites d’un modèle de gestion de l’eau qui peine à s’adapter à la réalité climatique du Maroc. L’agriculture intensive, très gourmande en eau, continue d’engloutir la majorité des ressources dans les zones les plus sèches, sans que les infrastructures ne suivent. Cette situation menace directement la sécurité hydrique, alimentaire, et donc sociale, du pays. Face à cette urgence, les autorités avancent plusieurs solutions : généraliser les stations de dessalement, surtout sur les côtes atlantiques, renforcer l’interconnexion entre les bassins pour mieux redistribuer l’eau, et rationaliser la consommation dans les secteurs les plus voraces, notamment l’agriculture.
L’été approche, et avec lui, le risque de restrictions d’eau, notamment dans les zones les plus critiques. Les regards sont tournés vers le ciel, mais surtout vers les décisions du gouvernement. Des arbitrages sont attendus dans les prochaines semaines, entre distribution prioritaire, soutien aux agriculteurs, et relance des projets d’infrastructures. Une chose est sûre : le Maroc joue une partie décisive sur le front de l’eau. Ce printemps 2025 pourrait bien être un tournant dans la manière de penser et gérer notre or bleu.