Maroc : dette extérieure 68 milliards, sous contrôle mais pas à l’abri des vents contraires


Rédigé par Lycha Jaimssy MBELE le Lundi 8 Décembre 2025

Selon les derniers éléments compilés dans le rapport international sur la dette et les bases de données de la Banque mondiale, l’encours de la dette extérieure du Maroc a légèrement reculé en 2024 pour se situer autour de 68 milliards de dollars. Si les indicateurs de soutenabilité restent globalement rassurants, la trajectoire met en lumière des fragilités coût du refinancement, pression fiscale et sensibilité aux chocs commerciaux qui méritent une vigilance soutenue.



Le chiffre dit tout, ou presque : l’encours de la dette extérieure du Maroc est estimé à 67,99 milliards de dollars fin 2024, en recul après un point haut observé en 2023. Cette baisse met un terme, du moins pour l’année, à la dynamique haussière entamée depuis 2021. 
 
Mais attention aux raccourcis. Derrière ces montants se cache une composition qui influence fortement la résilience : la majeure partie de la dette marocaine est à long terme soit environ 57,2 milliards de dollars et une large part de cet encours est associée au secteur public et aux dettes garanties par l’État. Les créanciers officiels, multilatéraux et bilatéraux, restent des partenaires majeurs du Royaume.


Une soutenabilité qui tient… pour l’instant

Les indicateurs-clés donnent des motifs de relative confiance : la dette extérieure représente près de 99% des exportations et autour de 45% du RNB selon les méthodes internationales des ratios généralement considérés comme soutenables à ce niveau. Le service de la dette (remboursements + intérêts) reste contenu en proportion des exportations et du RNB, même s’il a augmenté en 2024. Ces données expliquent pourquoi les agences de notation et les institutions internationales qualifient la situation de maîtrisée plutôt que critique. 
 

Sur le terrain, cette soutenabilité se traduit par des flux financiers nets positifs : en 2024, le Maroc a enregistré des entrées nettes, notamment via des investissements en capitaux propres, ce qui a compensé en partie le recours limité à l’endettement extérieur pur. Ces éléments forment une soupape utile face à l’environnement financier international plus contraignant.


Des risques réels qui appellent des choix politiques

Pour autant, la situation n’est pas exempte de risques. Le rapport international sur la dette fait apparaître plusieurs menaces qui concernent directement le Maroc : l’incertitude du commerce mondial (qui peut peser sur les recettes à l’export), le coût élevé du refinancement sur les marchés internationaux et une pression possible sur la capacité fiscale si les recettes publiques n’évoluent pas au rythme des besoins d’investissement et du service de la dette. Ces vulnérabilités sont partagées par nombre de pays à revenu faible et intermédiaire et n’épargnent pas la région MENAP. 
 

Sur un plan plus concret, l’envolée des taux mondiaux observée récemment renchérit les échéances à venir et rend plus coûteux le renouvellement des emprunts à l’international une donnée que les responsables marocains surveillent de près, d’autant que certaines émissions obligataires internationales figurent désormais parmi les sources de financement.

Le Maroc entre dans une zone de confort relatif : la dette extérieure est contenue et gérable aujourd’hui, mais l’environnement extérieur ne laisse aucune marge d’erreur. La clé pour transformer ce « sous contrôle » en position durable réside dans la capacité des autorités à conjuguer discipline budgétaire, développement d’un marché financier domestique attractif en dirhams, et croissance inclusive qui élargit l’assiette fiscale. En clair : maîtriser l’endettement tout en investissant un numéro d’équilibriste que le Royaume doit réussir pour préserver son avenir économique.





Lundi 8 Décembre 2025
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