Mistral AI, une souveraineté numérique française en vente ?


Rédigé par La rédaction le Vendredi 18 Juillet 2025

Mistral AI bientôt rachetée par Apple ? La rumeur à six milliards d’euros relance le débat sur la souveraineté numérique française et les ambitions européennes dans l’intelligence artificielle.



​L’Europe face aux titans de l’IA : un retard chronique

Depuis plus d’une décennie, les capitales européennes assistent, parfois impuissantes, à l’ascension fulgurante des GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft) et des champions chinois (Baidu, Tencent, Alibaba). Dans la course à l’intelligence artificielle, les États-Unis et la Chine se taillent la part du lion. L’Europe, elle, peine à exister.

La faute à une désindustrialisation numérique, à des investissements trop prudents, à un éclatement des efforts de recherche, et à une culture réglementaire plus prévenante qu’innovante. Alors quand la France annonce en fanfare la naissance de Mistral AI, un laboratoire 100 % souverain, 100 % européen, piloté par des cerveaux passés par Meta et Google DeepMind, c’est un frisson d’espoir qui parcourt le Vieux Continent.

​"Nous, on a Mistral" : le mantra macronien

Depuis sa fondation en 2023, Mistral AI est devenu l’emblème d’une intelligence artificielle “libre, ouverte et européenne”. Soutenue par des capitaux majoritairement français (Xavier Niel, Eric Schmidt, Cédric O…), elle développe des modèles de langage open source réputés puissants, capables de rivaliser avec ceux d’OpenAI ou d’Anthropic.

À chaque discours présidentiel sur la souveraineté numérique, Emmanuel Macron cite Mistral AI. Comme un totem. Une exception française capable de prouver que, oui, l’Europe peut encore compter dans la bataille mondiale de l’IA générative.

Mais à peine a-t-on commencé à y croire que la rumeur enfle : Apple lorgnerait sur Mistral AI.

​Apple à l’affût ? Une rumeur à six milliards d’euros

Selon des sources non confirmées, mais relayées dans plusieurs cercles technologiques, Apple envisagerait un rachat de Mistral AI pour un montant de l’ordre de six milliards d’euros. Une somme qui pourrait séduire les investisseurs. Et fragiliser l’argument souverainiste.

Ce bruit de couloir tombe à un moment stratégique : Apple, longtemps en retrait sur le terrain de l’intelligence artificielle générative, est sous pression pour combler son retard face à Microsoft (investisseur majeur dans OpenAI) et Google. Depuis l’annonce de l’intégration de ChatGPT à Siri, la firme à la pomme semble décidée à muscler son jeu IA.

Mistral, avec ses modèles performants, son aura open source et sa promesse éthique, apparaît comme une proie idéale. Et ce, même si ses fondateurs n'ont cessé de répéter leur volonté de rester indépendants et européens.

​Un enjeu de souveraineté… ou de rentabilité ?

Le dilemme est cruel : accepter une acquisition qui valorise l’entreprise à un niveau jamais atteint dans la French Tech, ou résister pour préserver l’indépendance stratégique de l’Europe dans une technologie aussi sensible que l’IA.

Si Mistral cède aux sirènes de Cupertino, c’est tout le discours français sur la souveraineté numérique qui s’effondre. Une France qui se veut leader, mais qui vend à la première levée de fonds conséquente ? Une Europe qui se gargarise de valeurs, mais qui confie ses pépites aux géants de la Silicon Valley ?

Pour certains analystes, cette opération serait une trahison en règle des promesses faites à la nation. Pour d’autres, c’est juste la dure loi de l’économie de l’innovation : les start-ups se créent pour être achetées, et seuls les GAFAM ont les moyens d’absorber des pépites à plusieurs milliards.

​Mistral open source : une armure suffisante ?

Les partisans de l’open source brandissent un contre-argument : même si Apple rachetait Mistral, les modèles déjà diffusés sous licence Apache ou MIT ne pourraient pas être « refermés » ou privatisés. L’écosystème pourrait continuer à s’en nourrir.

Mais cette défense reste partielle. Car ce qui fait la richesse d’un laboratoire comme Mistral, ce n’est pas seulement le code, c’est l’équipe. C’est l’ambition, la vision stratégique, la feuille de route à long terme. Or, un rachat change tout : les talents migrent, les priorités aussi.

​Un signal faible… ou un tournant historique ?

Si la rumeur se confirme, ce ne serait pas qu’un simple fait divers tech. Ce serait un symbole. Celui d’un continent qui parle haut mais vend bas. D’une génération de start-up européennes qui ne trouvent pas en Europe les ressources ni la confiance suffisantes pour grandir sans s’adosser à des géants extérieurs.

Et ce serait aussi un revers politique pour Emmanuel Macron, qui a fait de l’autonomie technologique un pilier de son discours international, tout en défendant la création d’un « Airbus de l’IA » à l’échelle européenne.

​Une souveraineté à géométrie variable ?

Dans l’arène mondiale de l’intelligence artificielle, la souveraineté ne se décrète pas, elle se construit avec patience, cohérence et détermination. Mistral AI incarne une tentative prometteuse. Mais si cette rumeur de rachat par Apple se concrétise, elle montrera aussi à quel point les fondations européennes sont fragiles, et combien il reste à faire pour qu’un champion français reste… vraiment français.

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Vendredi 18 Juillet 2025
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