Le Cameroun en pause : Moi Paul Biya j'y suis j'y reste !
C’est un tweet qui n’aura surpris que les distraits : Paul Biya, président de la République du Cameroun depuis 1982, a annoncé ce dimanche 13 juillet qu’il serait, une fois de plus, candidat à sa propre succession. À 92 ans, l’homme fort de Yaoundé semble vouloir défier les lois de la biologie autant que celles de la démocratie. Le scrutin est prévu pour le 12 octobre. La messe, elle, semble déjà dite.
De fait, Paul Biya ne dirige plus : il préside. Président, chef du parti, chef des armées, chef du protocole... l’homme incarne à lui seul la verticalité absolue du pouvoir. À ceux qui osaient douter de son retour en piste, il a répondu par une formule ciselée : « Ma détermination à vous servir est à la mesure de l’acuité des défis auxquels nous sommes confrontés. » Traduction libre : je reste, parce que le pays ne peut pas survivre sans moi.
À ce stade, on pourrait croire à un sketch si ce n’était la réalité de plus de 28 millions de Camerounais pris en otage par le temps, la peur... et une Constitution à géométrie variable. Cette longévité institutionnelle, aussi rare que douteuse, place Biya au sommet du palmarès des présidents à vie. Après tout, Joe Biden a 81 ans, Donald Trump fait campagne entre deux procès, et Emmanuel Macron croit encore pouvoir appeler Vladimir Poutine pour « éviter la guerre ». Comparé à eux, Paul Biya fait figure d’influenceur junior de la stabilité républicaine.
D’ailleurs, avec ses quarante-deux ans de règne, il dépasse allègrement Louis XIV, mais avec moins de fontaines. Il aura vu défiler neuf présidents français, cinq papes, la chute du mur de Berlin, deux Coupes du monde gagnées par la France, et l’émergence du wifi. À ce niveau-là, on ne parle plus de longévité, mais de fossilisation institutionnelle. Brushing impeccable, voix monocorde, et escapades médicales suisses : le président gouverne à distance, mais avec une constance digne d’un métronome.
Cependant, cette année, quelques fissures sont apparues dans la façade. Deux de ses anciens ministres, Issa Tchiroma Bakary et Maïgari Bello Bouba, ont annoncé leur candidature. Une audace rare, presque insolente, dans un système politique habitué à l’allégeance silencieuse. Officiellement, il s’agit de dissidences. Officieusement, ce pourrait être des répétitions générales pour de futures alliances, car au Cameroun, on critique parfois le roi le matin pour mieux redevenir ministre le soir.
Dans ce contexte, l’opposition tente d’exister. Maurice Kamto, opposant historique, revient dans la course après avoir été brièvement incarcéré pour avoir « cru » qu’il avait gagné la présidentielle de 2018. Cabral Libii, quant à lui, tente d’incarner la jeunesse et le renouveau. Mais face à une Commission électorale sous contrôle, des médias domestiqués et une administration verrouillée, cette compétition relève plus de la chorégraphie que de l’affrontement démocratique.
Pourtant, les candidatures restent ouvertes jusqu’au 21 juillet. Ce détail permet de maintenir une illusion de pluralisme, un vernis électoral à usage diplomatique. En réalité, chacun sait que les institutions sont prêtes, le personnel mobilisé, et le résultat déjà anticipé. Le suspense ne porte pas sur le vainqueur, mais sur le score final et l’efficacité de la mise en scène.
Il convient également de replacer le cas Biya dans un cadre régional plus large. Il appartient à ce club discret mais robuste des présidents à vie d’Afrique centrale. Après Idriss Déby (paix à son âme), Denis Sassou Nguesso et Teodoro Obiang Nguema, il perpétue cette tradition postcoloniale où la stabilité se confond avec l’immobilisme et la paix avec le silence imposé. À Yaoundé, l’économie vacille, l’éducation stagne, la santé se délite, mais la présidence tient bon.
En somme, Paul Biya ne cherche plus à convaincre. Il incarne une fonction éternisée, une présidence sans couronne, un pouvoir si ancien qu’il semble s’être confondu avec le paysage. À 92 ans, certains écrivent leurs mémoires. D’autres s’accrochent à la présidence comme à une transfusion d’éternité. Au Cameroun, on appelle cela la stabilité.
L’unique véritable suspense désormais est de savoir si Paul Biya quittera le pouvoir vivant, canonisé ou embaumé. Car tant que Dieu, la patrie et le fauteuil sont alignés, il semble bien décidé à rester assis.
De fait, Paul Biya ne dirige plus : il préside. Président, chef du parti, chef des armées, chef du protocole... l’homme incarne à lui seul la verticalité absolue du pouvoir. À ceux qui osaient douter de son retour en piste, il a répondu par une formule ciselée : « Ma détermination à vous servir est à la mesure de l’acuité des défis auxquels nous sommes confrontés. » Traduction libre : je reste, parce que le pays ne peut pas survivre sans moi.
À ce stade, on pourrait croire à un sketch si ce n’était la réalité de plus de 28 millions de Camerounais pris en otage par le temps, la peur... et une Constitution à géométrie variable. Cette longévité institutionnelle, aussi rare que douteuse, place Biya au sommet du palmarès des présidents à vie. Après tout, Joe Biden a 81 ans, Donald Trump fait campagne entre deux procès, et Emmanuel Macron croit encore pouvoir appeler Vladimir Poutine pour « éviter la guerre ». Comparé à eux, Paul Biya fait figure d’influenceur junior de la stabilité républicaine.
D’ailleurs, avec ses quarante-deux ans de règne, il dépasse allègrement Louis XIV, mais avec moins de fontaines. Il aura vu défiler neuf présidents français, cinq papes, la chute du mur de Berlin, deux Coupes du monde gagnées par la France, et l’émergence du wifi. À ce niveau-là, on ne parle plus de longévité, mais de fossilisation institutionnelle. Brushing impeccable, voix monocorde, et escapades médicales suisses : le président gouverne à distance, mais avec une constance digne d’un métronome.
Cependant, cette année, quelques fissures sont apparues dans la façade. Deux de ses anciens ministres, Issa Tchiroma Bakary et Maïgari Bello Bouba, ont annoncé leur candidature. Une audace rare, presque insolente, dans un système politique habitué à l’allégeance silencieuse. Officiellement, il s’agit de dissidences. Officieusement, ce pourrait être des répétitions générales pour de futures alliances, car au Cameroun, on critique parfois le roi le matin pour mieux redevenir ministre le soir.
Dans ce contexte, l’opposition tente d’exister. Maurice Kamto, opposant historique, revient dans la course après avoir été brièvement incarcéré pour avoir « cru » qu’il avait gagné la présidentielle de 2018. Cabral Libii, quant à lui, tente d’incarner la jeunesse et le renouveau. Mais face à une Commission électorale sous contrôle, des médias domestiqués et une administration verrouillée, cette compétition relève plus de la chorégraphie que de l’affrontement démocratique.
Pourtant, les candidatures restent ouvertes jusqu’au 21 juillet. Ce détail permet de maintenir une illusion de pluralisme, un vernis électoral à usage diplomatique. En réalité, chacun sait que les institutions sont prêtes, le personnel mobilisé, et le résultat déjà anticipé. Le suspense ne porte pas sur le vainqueur, mais sur le score final et l’efficacité de la mise en scène.
Il convient également de replacer le cas Biya dans un cadre régional plus large. Il appartient à ce club discret mais robuste des présidents à vie d’Afrique centrale. Après Idriss Déby (paix à son âme), Denis Sassou Nguesso et Teodoro Obiang Nguema, il perpétue cette tradition postcoloniale où la stabilité se confond avec l’immobilisme et la paix avec le silence imposé. À Yaoundé, l’économie vacille, l’éducation stagne, la santé se délite, mais la présidence tient bon.
En somme, Paul Biya ne cherche plus à convaincre. Il incarne une fonction éternisée, une présidence sans couronne, un pouvoir si ancien qu’il semble s’être confondu avec le paysage. À 92 ans, certains écrivent leurs mémoires. D’autres s’accrochent à la présidence comme à une transfusion d’éternité. Au Cameroun, on appelle cela la stabilité.
L’unique véritable suspense désormais est de savoir si Paul Biya quittera le pouvoir vivant, canonisé ou embaumé. Car tant que Dieu, la patrie et le fauteuil sont alignés, il semble bien décidé à rester assis.
Paul Biya, Cameroun : président à vie, réélection, démocratie en crise, opposition fragile, Constitution malléable, monarchie républicaine, stabilité politique, fossilisation institutionnelle.**
Rédigé par Hajar Dehane