Pourquoi l’Occident ne cesse-t-il de s’immiscer dans les affaires arabes ?


Rédigé par le Dimanche 5 Octobre 2025

L’histoire du monde moderne s’écrit trop souvent à partir des vainqueurs, gommant les héritages, les violences et les contradictions qui fondent pourtant nos réalités contemporaines. Le cas des États-Unis en est une illustration frappante.



Quand l’histoire cachée éclaire le présent :

Nation née dans la douleur de la colonisation et de l’esclavage, façonnée par une idéologie raciale héritée de l’Europe chrétienne, l’Amérique s’est imposée comme la première puissance mondiale en déployant un empire singulier : sans colonies officielles, mais avec une toile serrée de domination économique, militaire et culturelle.

Derrière l’épopée du « rêve américain » se cache une histoire où la suprématie blanche, le fondamentalisme religieux et la logique impériale se rejoignent pour justifier conquêtes et inégalités. Ce triple héritage continue de peser lourd, qu’il s’agisse de la marginalisation des peuples autochtones, de l’effacement des apports arabes et musulmans à l’histoire mondiale, ou encore du soutien indéfectible aux logiques coloniales en Palestine.

L’une des constantes du récit américain – et occidental au sens large – a été l’effacement. Effacement des civilisations indigènes, dont les réalisations architecturales et sociales sont systématiquement minorées ou ignorées. Effacement aussi de la contribution arabe et musulmane au savoir universel, volontairement exclue des programmes scolaires occidentaux. Cette mise sous silence n’est pas innocente : elle nourrit un imaginaire où « l’autre » devient soit invisible, soit perçu comme arriéré, justifiant l’ingérence et l’exploitation.

Dans ce schéma, le monde arabe et musulman a été construit comme un « orient » hostile ou exotique, jamais comme un partenaire égal. L’effacement historique produit l’ignorance, et l’ignorance légitime la domination.

L’Amérique, pays officiellement laïc, est profondément traversée par la ferveur évangélique. Celle-ci joue un rôle déterminant dans sa politique étrangère, notamment au Moyen-Orient. Pour une partie des chrétiens fondamentalistes, l’existence d’Israël relève de la prophétie biblique, un préalable nécessaire à la « fin des temps ». Soutenir l’État hébreu n’est donc pas seulement un choix géopolitique mais aussi une conviction théologique.

Ce soutien inconditionnel s’articule avec une autre réalité : l’antisémitisme européen qui a, paradoxalement, favorisé la naissance du sionisme en poussant les Juifs à chercher refuge ailleurs, au prix du déplacement des Palestiniens. L’histoire de la Reconquista espagnole, où christianisme et hiérarchie raciale se sont entremêlés, a fourni les bases idéologiques de cette logique : classer, exclure, expulser.

Contrairement aux empires européens qui plantaient leurs drapeaux sur des territoires lointains, l’empire américain s’est construit autrement : par la domination économique, les coups d’État discrets, la pression diplomatique et l’installation de bases militaires. L’Amérique n’a pas toujours cherché à occuper durablement, mais à contrôler les flux – pétrole, finance, routes maritimes – et à garantir sa prééminence par l’influence.

De l’Amérique centrale au Moyen-Orient, les exemples abondent. En Palestine comme ailleurs, le soutien à certains régimes ou mouvements a répondu à la même logique : préserver un ordre mondial qui serve avant tout les intérêts de Washington.

Quand l’histoire effacée nourrit les conflits d’aujourd’hui..

Le conflit israélo-palestinien est l’illustration la plus éclatante de cet héritage colonial et impérial. Là où l’Europe a bâti une solution sur l’exclusion et la dépossession, les États-Unis ont pris le relais comme protecteurs et parrains, liant leur politique étrangère à des considérations religieuses et stratégiques.

Cette posture, renforcée par la manipulation des peurs – islamophobie, rejet des migrants, désignation constante d’ennemis extérieurs – s’avère payante sur le plan intérieur. Elle divise, elle mobilise, elle détourne l’attention des fractures sociales internes. Mais elle fragilise la démocratie américaine et mine sa crédibilité sur la scène internationale.

Si l’histoire est faite de cycles – essor, déclin, renaissance – l’oubli délibéré condamne à répéter les erreurs. Reconnaître les apports des civilisations arabes et musulmanes, redonner leur place aux peuples autochtones, questionner le rôle du fondamentalisme religieux dans la politique américaine : autant de pas nécessaires pour sortir de la spirale des dominations.

À l’heure où les crises mondiales se multiplient – guerre, climat, migrations, inégalités – aucune société ne peut prétendre bâtir un avenir stable en s’appuyant sur l’effacement ou la hiérarchisation des peuples. L’Amérique comme le reste du monde doivent accepter une évidence : nous partageons une histoire commune, faite de brassages et d’influences réciproques. Ignorer cela, c’est s’exposer à un futur de conflits sans fin.

L’Amérique s’est construite sur des contradictions : nation de liberté fondée sur l’esclavage, empire sans colonies officielles mais présent partout, démocratie nourrie de divisions raciales et religieuses. Aujourd’hui encore, ces paradoxes façonnent son rapport au monde, notamment au Moyen-Orient.

La tâche urgente est de réintroduire la vérité historique dans nos récits, de déconstruire les mythes qui légitiment les dominations, et de bâtir des ponts entre les cultures. Sans cela, le cycle des injustices continuera, avec toujours les mêmes victimes : les peuples effacés, colonisés, réduits au silence.

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Un ingénieur passionné par la technique, mordu de mécanique et avide d'une liberté que seuls… En savoir plus sur cet auteur
Dimanche 5 Octobre 2025
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