Pourquoi s’intéresser à un gouvernement que même ses membres boycottent ?




Par Aziz Boucetta

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Cette semaine, le chef du gouvernement Saâdeddine Elotmani a présenté le bilan de son gouvernement, ainsi que le prévoit la loi, la foi et même la constitution (en son article 101 pour être plus précis). Or, lors de cet exercice, toujours sensible, souvent périlleux, peu de ministres étaient là, bien que leurs départements fussent concernés. Mauvais point pour la perception globale de la classe politique par un électorat déjà fort peu amène et passablement irritable.
 

La majorité gouvernementale est composée de cinq partis, qui étaient six avant que le PPS ne soit jeté par-dessus bord et qu’il annonce avoir plongé de lui-même... Outre donc le PJD qui tient le gouvernail de ce paquebot titanisé, on comptera pêle-mêle le RNI, l’UC, le MP et l’USFP. Les ministres du RNI et de l’USFP étaient absents à ce rendez-vous institutionnel d’importance. Les électeurs que nous sommes sont en droit de s’interroger sur les raisons de cette absence…
 

Etaient-ils donc si affairés, nos RNIStes, pour se désintéresser à ce point et collectivement de l’exercice constitutionnel ? Sans doute, mais pas au point de ne pas être au rendez-vous. Etaient-ils souffrants ? On leur souhaiterait un heureux et prompt rétablissement, mais sauf en cas d’épidémie, une maladie ne saurait toucher tous ces absents en même temps… Etaient-ils en déplacement ? On l’aurait su, surtout en ces temps pandémiques. Non, il faut admettre que les raisons sont ailleurs, et de deux natures différentes.
 

D’abord, les RNIstes et USFPistes ont des raisons politiques, celle de s’opposer pour les premiers et de simplement exister pour ce qui reste de l’USFP. Et ce faisant, ils basculent dans une posture politicienne malgré la mise en garde royale rapportée par M. Elotmani, consistant à rappeler aux ministres qu’ils doivent « poursuivre leur mission jusqu’au dernier jour du mandat gouvernemental ». En s’absentant sans raison connue, ils font l’inverse. En sont-ils conscients ?
 

Quant aux ministres de souveraineté, seconde catégorie des absents, on peut s’interroger également sur les raisons de leur villégiature durant la présentation du bilan gouvernemental. On les sait certes occupés, mais la constitution devrait, doit transcender leurs agendas. L’article 101 prévoit cette présentation annuelle du chef du gouvernement devant les membres des deux Chambres du parlement, et cette année, plus que l’année dernière et plus que l’année prochaine, la venue du chef du gouvernement au parlement est cruciale, car nous sommes à deux mois d’élections (forcément et habituellement) cruciales…
 

Et ainsi donc, au-delà du bilan chiffré et technique, que les électeurs sont très rares à consulter avant de votationner, il y a cette mauvaise perception que ces mêmes électeurs auront avant le 8 septembre. Et nul n’ignore que c’est sur cette perception que se prononcent les électeurs.
 

Dans l’intervalle, boycotter pour des raisons politiques la présentation du bilan d’un gouvernement auquel on appartient est une forfaiture, un acte indigne pour ses auteurs et irrespectueux envers la population, voire même irrévérencieux pour le chef de l’Etat qui avait vu venir les choses, quand il a demandé aux ministres de continuer de travailler jusqu’au dernier jour de leur mandat.
 

Irrévérencieux, irrespectueux et… périlleux, car comment convaincre une population déjà désabusée de l’intérêt d’un travail gouvernemental auquel même ses propres membres sont indifférents ? Le Marocain « mérite mieux », dit le RNI dans un slogan voulu puissant. En effet, mais pas pour les mêmes raisons !
 

Rédigé par Aziz Boucetta sur https://panorapost.com



Dimanche 11 Juillet 2021

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