Quand la réalité économique rattrape l’IA : ma vision frugale et souveraine pour le Maroc confirmée


Par Dr Az-Eddine Bennani

Depuis deux ans, le monde court derrière un mirage technologique : celui d’une intelligence artificielle sans limites, capable de tout transformer, de tout accélérer, de remplacer le travail humain et même de définir l’avenir des nations.

Des promesses, des levées de fonds, des mégasystèmes toujours plus coûteux… et un discours global porté par la Silicon Valley qui, pendant un temps, a façonné l’imaginaire collectif.

Mais voilà que les dirigeants mêmes des multinationales — IBM, Google, NVIDIA — viennent de l’avouer : l’équation économique des modèles géants ne tient pas. Exactement ce que j’ai souligné depuis 2023 dans mes articles, mes tribunes et mes livres.

L’heure n’est ni au triomphalisme ni au “je l’avais dit”, mais à la lucidité. Car c’est précisément dans ce virage que se joue l’avenir de pays comme le Maroc et, plus largement, de l’Afrique.



​Le crash silencieux : quand la technique se heurte à l’économie

Depuis mes premiers écrits sur le paradoxe de la productivité appliqué à l’IA, j’ai rappelé une évidence économique que beaucoup ne voulaient pas entendre :

L’IA n’est pas seulement une prouesse technologique, c’est surtout une industrie extrêmement coûteuse énergétiquement, financièrement, matériellement.

Chaque itération de modèles géants demande : des milliards en serveurs et en puces de calcul, des data centers gigantesques, des infrastructures énergétiques dédiées, des coûts d’exploitation exponentiels.

Quand le PDG d’IBM affirme publiquement que « cette trajectoire n’est plus soutenable », il ne fait que confirmer ce que mes analyses annoncent depuis longtemps : la croissance infinie des modèles est une impasse macroéconomique.

Ce que j’ai écrit depuis trois ans : une IA frugale, locale et souveraine
Dans L’intelligence artificielle au Maroc, j’ai défendu une thèse simple et solide : Le Maroc n’a ni l’intérêt ni la capacité de courir derrière l’IA XXL.

Son destin se joue dans une IA frugale, sobre, éthique et souveraine.

​Pourquoi le temps me donne raison

Ce que j’appelais le crash silencieux de l’IA commence à se matérialiser : les coûts deviennent insoutenables même pour les géants, les puces manquent, les infrastructures saturent, les États redoutent la dépendance stratégique, les entreprises ne voient pas encore la productivité annoncée.

Ma vision était en avance : lucidité avant fascination, réalisme avant démesure, stratégie avant spectacle.

Le Maroc, pays-pilote de la sobriété intelligente :

Le Maroc n’a pas besoin d’un méga-data center au coût astronomique. Il a besoin d’un écosystème d’IA frugale, capable de traiter des données locales, entraîner des modèles hybrides et spécialisés, développer des solutions en santé, éducation, agriculture, justice, emploi, garantir la souveraineté informationnelle, réduire la fracture numérique.

​L’histoire de l’IA n’est pas celle de la puissance brute.

C’est celle d’un équilibre fragile entre ambition, économie, énergie, technologie et souveraineté. Et c’est précisément cet équilibre que j’appelle, depuis mes premiers articles, à construire.

Aujourd’hui, les plus grands patrons de la tech confirment une évidence : il faut revenir à la raison. Et cette raison, le Maroc la porte déjà.

Par Dr Az-Eddine Bennani


Mardi 9 Décembre 2025

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