Quand les recettes fiscales liées aux fumeurs et buveurs dépassent l’apport de l’OCP

Quand les fumeurs Marocains financent davantage le Trésor que les phosphates !


Rédigé par La Rédaction le Mercredi 23 Octobre 2024



Le projet de loi de finances 2025 dévoile un panorama fiscal surprenant : Quand le tabac dépasse l’OCP

Alors que le gouvernement marocain vise à réduire le déficit budgétaire à 3,5 % du PIB en 2025, il s’appuie de plus en plus sur des taxes ciblant la consommation de produits tels que l'alcool et le tabac. Cette approche, qui cherche à générer des recettes stables, soulève des interrogations sur la dépendance croissante de l'État envers des sources fiscales controversées. Dans ce cadre, les boissons alcoolisées, les bières et surtout les cigarettes deviennent des piliers fiscaux, au point de rapporter plus que des institutions phares comme l’OCP.

Pour renforcer ses recettes, l’exécutif compte augmenter la taxe intérieure de consommation (TIC) sur les produits comme le tabac manufacturé, l’alcool et la bière. En 2025, ces trois catégories devraient rapporter près de 16,4 milliards de dirhams (MMDH) au Trésor.

Rien que les cigarettes devraient générer environ 13,7 MMDH, tandis que les vins, alcools et bières rapporteraient un peu plus de 2,7 MMDH. Ces chiffres impressionnants, en hausse de 14,49 % par rapport à l’exercice précédent, démontrent à quel point le gouvernement mise sur ces produits pour combler une partie de son déficit budgétaire.

Ce choix de politique fiscale n’est pas anodin. Depuis 2008, année du dernier excédent budgétaire, le Maroc peine à équilibrer ses comptes. Aujourd'hui, face aux défis économiques, l'État privilégie des sources de financement perçues comme stables, évitant ainsi les aléas de recouvrement qui peuvent toucher d’autres secteurs. Mais à quel prix ?

Le point le plus marquant du projet de loi de finances 2025 est que les recettes provenant de l’imposition du tabac manufacturé dépassent, et de loin, celles générées par l’OCP, entreprise-phare de l’économie marocaine. En effet, les revenus liés au tabac devraient atteindre 13,7 MMDH, contre seulement 7,5 MMDH pour le groupe OCP. Ce décalage important – de 6,2 MMDH – illustre une transformation des priorités fiscales du gouvernement, où des produits de consommation comme le tabac, pourtant nuisibles à la santé publique, deviennent des contributeurs majeurs aux finances publiques.

Ce paradoxe économique suscite de nombreuses interrogations. Comment un secteur comme celui du tabac, qui a des conséquences négatives sur la santé et la qualité de vie des Marocains, peut-il surpasser l’apport d’un fleuron de l’économie nationale ? Cette situation met en lumière une contradiction de taille : l’État marocain se retrouve à dépendre de revenus issus de la consommation de produits nocifs, tout en vantant les efforts d’assainissement de ses finances publiques.

Si l’augmentation des taxes sur les produits de grande consommation garantit des recettes importantes et régulières, elle ne manque pas d’inquiéter les observateurs. En effet, cette approche pourrait avoir des effets négatifs sur la société à long terme. La hausse des prix des cigarettes, de l’alcool et de la bière pourrait notamment encourager le développement de marchés parallèles ou d'activités de contrebande, fragilisant ainsi les efforts de recouvrement fiscal.

De plus, cette politique fiscale met en lumière une dépendance croissante du Maroc vis-à-vis de sources de financement peu durables. L’essor des recettes fiscales liées au tabac et à l’alcool, alors même que l’OCP, symbole de la richesse nationale, voit ses bénéfices stagner, pose une question cruciale : est-ce une solution viable pour l’avenir économique du pays ? Ce choix ne risque-t-il pas de créer une dépendance toxique, tant pour les finances publiques que pour la santé de la population ?

Le PLF 2025, en misant sur ces taxes, reflète une vision à court terme des finances publiques, mais il manque de garanties quant à la viabilité de cette stratégie sur le long terme. Le défi pour le gouvernement Akhannouch sera donc de trouver des alternatives fiscales, capables de générer des recettes tout en évitant de trop dépendre de produits nuisibles à la population.

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Mercredi 23 Octobre 2024
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