Rabat-Berlin : plus qu’un simple partenariat bilatéral




Rédigé par Said Temsamani

Depuis 2022, avec l’adoption de la Déclaration conjointe de Rabat, les relations maroco-allemandes ont changé de nature. Elles sont désormais structurées par un Dialogue stratégique régulier, centré sur des thématiques clés : sécurité, économie, climat, migration, et coopération avec l’Afrique. La prochaine session, prévue à Rabat, s’annonce déterminante pour inscrire cette relation dans le long terme.

Mais cette coopération dépasse le strict cadre bilatéral. Pour Berlin, Rabat est une porte d’entrée vers l’Afrique, un allié fiable dans un Maghreb instable, et un partenaire constructif dans les enceintes multilatérales. Pour le Maroc, l’Allemagne représente un poids lourd européen, à la fois moteur économique, acteur politique majeur, et soutien potentiel dans les dossiers sensibles, comme la reconnaissance du plan d’autonomie pour le Sahara.

L’énergie verte au cœur de la convergence

L’un des piliers les plus prometteurs de cette alliance est sans conteste la transition énergétique. Le Maroc a pris une longueur d’avance sur ses voisins en matière d’énergies renouvelables et affiche des ambitions claires sur le développement de l’hydrogène vert. L’Allemagne, en quête de diversification énergétique après la crise russo-ukrainienne, voit dans le royaume un partenaire stable, proche et stratégiquement positionné.
 
Des projets communs commencent à émerger dans le domaine de la production, du transport et de la formation autour des technologies propres. Au-delà des aspects techniques, cette collaboration est appelée à reconfigurer les flux énergétiques entre l’Afrique et l’Europe, dans une logique gagnant-gagnant.

Une diplomatie pragmatique et tournée vers l’Afrique

Sur le plan régional, les deux pays entendent renforcer leur concertation stratégique sur le Sahel, la lutte contre le terrorisme, la gestion des flux migratoires et le développement inclusif. Rabat, fort de son ancrage africain et de ses nombreux partenariats sud-sud, se positionne de plus en plus comme un relai diplomatique pour les capitales européennes désireuses de s’impliquer autrement sur le continent.
 
Berlin, de son côté, cherche à redéfinir sa politique africaine, trop longtemps cantonnée à l’aide au développement. Le Maroc peut ainsi jouer un rôle de facilitateur dans cette nouvelle approche allemande, en promouvant une coopération plus équilibrée et plus respectueuse des priorités africaines.

Une alliance discrète mais stratégique

La relation entre Rabat et Berlin n’est pas spectaculaire, ni bruyante. Elle se construit dans le temps long, sur des bases solides et des intérêts croisés. Elle illustre un changement de paradigme : celui d’une coopération nord-sud qui ne repose plus sur l’asymétrie, mais sur le partage de responsabilités et la construction commune de solutions.
 
Dans un monde multipolaire, où les alliances se réorganisent, cette dynamique pourrait bien devenir un modèle de référence pour d’autres pays africains cherchant à sortir des dépendances traditionnelles, tout en s’insérant dans des chaînes de valeur régionales et mondiales. 

Le Maroc et l’Allemagne n’ont peut-être pas les projecteurs braqués sur eux, mais ils sont, à leur manière, en train de réécrire les règles du partenariat euro-africain. Et cela, à l’heure actuelle, vaut bien plus qu’un simple alignement diplomatique.


Mardi 8 Juillet 2025

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