Rafah, l’ultime bataille


Rédigé par le Dimanche 11 Février 2024

Le sort de la guerre menée par Israël contre la résistance palestinienne, dans la Bande de Gaza, sera déterminé par l’ultime bataille de Rafah.



Le premier ministre israélien, Benjamin Netanyahou, est déterminé à lancer une offensive sur Rafah, ville du Sud de la Bande de Gaza frontalière avec l’Egypte, où se trouve l'unique point de passage entre Gaza et le reste du monde et qui est, actuellement, pilonnée par l’artillerie israélienne.

« Il est impossible d’atteindre l’objectif de la guerre sans éliminer le Hamas et en laissant quatre bataillons du Hamas à Rafah », a déclaré un Netanyahou qui craint un arrêt des hostilités dans les conditions présentes plus que tout autre chose.

Le premier ministre israélien a appelé à mobiliser à nouveau les réservistes afin de mener une opération « massive » contre le dernier refuge, au Sud de la Bande de Gaza, des réfugiés palestiniens qui ont fui les bombardements et les combats au Nord.

Deux objectifs ont été fixés à l’armée israélienne pour son offensive contre Rafah : détruire le Hamas et évacuer la population qui s’y trouve, soit quelques 1,3 millions de Palestiniens. Aucun des deux n’est réalisable.

Nettoyage ethnique

Après quatre mois de guerre contre le Hamas, non seulement l’armée israélienne n’est pas parvenue à l’éliminer, mais à travers ses exactions à l’encontre des populations civiles de Gaza, elle lui a même assuré une large base démographique pour ses futurs recrutements.

Est-ce une erreur de la part de Tel-Aviv ? De toute évidence, non. Peu importe aux dirigeants sionistes de renforcer, par leurs crimes de guerre, le capital de sympathie du Hamas auprès des Palestiniens de la Bande de Gaza, puisque l’objectif est de se débarrasser définitivement de tous ses habitants.

Le projet sioniste d’un Etat exclusivement juif en terre de Palestine ne saurait aboutir sans chasser le peuple palestinien de l’ensemble de ses territoires, en le repoussant vers la Jordanie et le désert du Sinaï, en Egypte.

Ce second objectif, le plus stratégiquement important pour Netanyahou et ses alliés de l’extrême droite sioniste, nécessite, cependant, l’approbation des autorités égyptiennes. 

L’armée israélienne, qui exige un accord politique avec Le Caire à ce sujet, avant d’envoyer la troupe à l’assaut de Rafah, semble en être tout à fait consciente.

L’obstacle égyptien

L’Egypte a clairement laissé comprendre que toute tentative de prise de contrôle par l’armée israélienne du « corridor de Philadelphie », une étroite bande de 100m de large sur 14kms de long qui sépare l’Egypte de la frontière avec la Bande de Gaza, va entraîner le gel de l’accord de paix conclu entre l’Egypte et Israël, en 1979.

Selon les termes dudit accord, ni l’armée israélienne, ni celle égyptienne, ne peut opérer à l’intérieur de cette zone tampon sans l’accord de l’autre. 

Le Caire a envoyé une quarantaine de chars et des véhicules blindés sur zone, un message limpide adressé à Tel-Aviv que le déplacement forcé des habitants de la Bande de Gaza vers le désert du Sinaï n’est pas une option acceptable pour l’Egypte.

D’autant plus que Washington, pourtant soutien inconditionnel d’Israël, n’est pas très enthousiaste, non plus, pour une attaque contre Rafah.

Le secrétaire d’État américain, Antony Blinken, a récemment déclaré que : « mener une telle opération maintenant (à Rafah), sans planification et sans réflexion, dans une zone abritant un million de personnes serait un désastre ».

D’autres chats à fouetter

Les Etats-Unis verraient bien, en principe, Israël parvenir à refouler les Palestiniens de la Bande de Gaza vers le désert du Sinaï. Mais pas dans l’immédiat.

L’administration Biden a, maintenant, conscience de s’être laissée entraînée par Netanyahou et sa bande de sionistes révisionnistes dans un conflit désormais élargi à l’ensemble du Moyen-Orient.

A travers tout le Moyen-Orient, des entités non-étatiques soutenues par l’Iran mènent la vie dure aux troupes américaines stationnées dans la région. 

Washington a beau réagir durement aux attaques des milices irakiennes du Hashd Chaabi contre leurs bases en Irak, elle n’est pas pour autant capable d’inverser le courant d’opinion, largement majoritaire, réclamant le départ des troupes américaines.

Quant aux soldats américains présents en Syrie, Washington et les médias occidentaux aux ordres évitent de trop en parler.

Il n’existe, en effet, aucune justification légale de l’occupation américaine des champs pétroliers syriens, qu’elle exploite et en commercialise, d’ailleurs, la production en contrebande.

Des navires américains sont, d’autre part, mobilisés en mer Rouge pour tenter de sécuriser le trafic maritime à travers le détroit de Bab El Mandab, sérieusement perturbé par les attaques des Houthis yémenites.

Jusqu’à présent, les bombardements menés par les Etats-Unis et la Grande Bretagne contre des positions houhies, au Yémen, n’ont pas réussi à stopper les attaques contre les navires d’Israël et ses alliés occidentaux.

Insoluble dilemme

Au registre des échecs diplomatiques consécutifs au soutien aveugle des Etats-Unis aux crimes de guerre d’Israël dans la Bande de Gaza, l’Arabie saoudite, que l’on disait proche de s’embarquer à bord des Accords d’Abraham, conclus entre Israël et des pays arabes, est revenue à sa précédente position.

Pas d’accord avec Israël sans la création effective d’un Etat palestinien. La paix contre les territoires. Cependant, il est devenu de notoriété publique que les Israéliens ne veulent pas du tout en entendre parler.

L’attaque du Hamas, le 7 octobre, n’a fait que remettre en lumière cet insoluble dilemme. 

Cela fait beaucoup pour l’administration Biden, et ce en pleine année électorale. 

Il serait, toutefois, peu avisé de parier sur le bon sens commun des dirigeants américains et prédire qu’ils feront suffisamment pression sur Netanyahou et ses alliés sionistes hystériques afin de les empêcher de commettre l’irréparable à Rafah.

Tiers parties

A Rafah, va se dérouler la bataille ultime de la guerre de Gaza. Que cette bataille concrètement ait lieu ou pas, la carte géopolitique du Moyen Orient en sera profondément marquée.

Depuis leur base navale à Tartous, en Syrie, les Russes voient dans l’actuel contexte au Moyen Orient l’opportunité de porter un coup dur à la présence américaine dans cette région hautement stratégique.

En arrière-plan, les Chinois tracent les plans du développement du Moyen Orient d’après-guerre de Gaza, dans une répartition des tâches entre Moscou et Pékin qui met à nu l’affaiblissement des Etats-Unis.




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Dimanche 11 Février 2024
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