Lors du gigantesque défilé militaire célébrant les 80 ans de la fin de la Seconde Guerre mondiale, un moment anodin devient surréaliste. Vladimir Poutine se promène aux côtés de Xi Jinping — et Kim Jong-un — lorsque, sans le vouloir, ils sont entendus discuter d’organes, de longévité et d’immortalité. L’un des interprètes traduit ainsi en chinois : « La biotechnologie évolue continuellement. Les organes humains peuvent être transplantés sans cesse. Plus on vit longtemps, plus on rajeunit — voire, on peut atteindre l’immortalité »
Xi, hors champ, enchaîne : « Certains prédisent qu’au cours de ce siècle, les humains pourraient vivre jusqu’à 150 ans »
Ce lapsus filmé a été diffusé en direct par la CCTV chinoise, vue par près de 1,9 milliard de personnes en ligne et plus de 400 millions à la télévision
Lorsque la question leur a été posée, Poutine a confirmé l’échange — évoquant les progrès « des moyens médicaux modernes, y compris chirurgicaux liés au remplacement d’organes » qui donneraient l’espoir d’une vie active prolongée d’une manière « différente de ce qu’elle est aujourd’hui »
Xi, hors champ, enchaîne : « Certains prédisent qu’au cours de ce siècle, les humains pourraient vivre jusqu’à 150 ans »
Ce lapsus filmé a été diffusé en direct par la CCTV chinoise, vue par près de 1,9 milliard de personnes en ligne et plus de 400 millions à la télévision
Lorsque la question leur a été posée, Poutine a confirmé l’échange — évoquant les progrès « des moyens médicaux modernes, y compris chirurgicaux liés au remplacement d’organes » qui donneraient l’espoir d’une vie active prolongée d’une manière « différente de ce qu’elle est aujourd’hui »
Gardons les pieds sur terre : que dit la science ?
Passer de discussions anecdotiques à un âge avancé ou à l’immortalité, c’est confondre l’émerveillement scientifique avec le fantasme humain le plus ancien. Un chirurgien américain spécialisé dans la transplantation, le Dr James Markmann, rappelle que si les greffes sauvent des vies, « il n’existe aucune preuve scientifique qu’elles favorisent l’immortalité, ni que l’on puisse atteindre 150 ans grâce à cela »
Donner du sens à la discussion des deux dirigeants ne signifie pas les discréditer. Dans plusieurs pays, notamment la Russie, Poutine a placé l’allongement de la vie au cœur de projets scientifiques nationaux : des programmes axés sur le rajeunissement cellulaire, les neurotechnologies, la régénération d’organes ont été initiés, soutenus par sa fille Maria Vorontsova, endocrinologue de formation
De son côté, Xi se trouve en tête d’un régime dont le parti fait de la biotechnologie un pilier stratégique de croissance — mais sans déclarations aussi frontales sur l’immortalité
Donner du sens à la discussion des deux dirigeants ne signifie pas les discréditer. Dans plusieurs pays, notamment la Russie, Poutine a placé l’allongement de la vie au cœur de projets scientifiques nationaux : des programmes axés sur le rajeunissement cellulaire, les neurotechnologies, la régénération d’organes ont été initiés, soutenus par sa fille Maria Vorontsova, endocrinologue de formation
De son côté, Xi se trouve en tête d’un régime dont le parti fait de la biotechnologie un pilier stratégique de croissance — mais sans déclarations aussi frontales sur l’immortalité
Poutine et Xi — tous deux âgés de 72 ans — n’ont jamais dégagé l’envie de céder le pouvoir. Xi a supprimé les limites de mandats en 2018, ouvrant la voie à une présidence à vie. Poutine, de son côté, a remodelé la Constitution russe pour effacer ses mandats précédents et maintenir sa mainmise au Kremlin jusqu’en 2036
Le thème de la longévité devient alors à la fois allégorie et programme implicite : souhaiter vivre jusqu’à 150 ans, c’est peut-être simplement signifier qu’on envisage de durer dans l’histoire, comme dans le pouvoir.
Si la science ne permet pas — aujourd’hui — de promettre 150 ans de vie, encore moins l’immortalité, cette confession impromptue nous rappelle la tension tragique de tout pouvoir : émousser la finitude.
Ce qui semble de la science-fiction est surtout un miroir. Celui d’un monde où la biotechnologie provoque autant d’espoirs que de dérives éthiques — et où les dirigeants parlent de vie éternelle non pour le peuple, mais pour eux-mêmes. C’est dans ce glissement que réside le vrai terrain de l’enquête.
L’histoire continue, la science avance — et nous, lecteurs vigilants, pouvons savourer l’absurde, questionner le possible, et garder intacte l’hypothèse : peut-être un jour vivrons-nous plus longtemps ; mais pour l’instant, réinventer le pouvoir semble déjà suffire à nourrir ces rêveries d’un autre temps.
Le thème de la longévité devient alors à la fois allégorie et programme implicite : souhaiter vivre jusqu’à 150 ans, c’est peut-être simplement signifier qu’on envisage de durer dans l’histoire, comme dans le pouvoir.
Si la science ne permet pas — aujourd’hui — de promettre 150 ans de vie, encore moins l’immortalité, cette confession impromptue nous rappelle la tension tragique de tout pouvoir : émousser la finitude.
Ce qui semble de la science-fiction est surtout un miroir. Celui d’un monde où la biotechnologie provoque autant d’espoirs que de dérives éthiques — et où les dirigeants parlent de vie éternelle non pour le peuple, mais pour eux-mêmes. C’est dans ce glissement que réside le vrai terrain de l’enquête.
L’histoire continue, la science avance — et nous, lecteurs vigilants, pouvons savourer l’absurde, questionner le possible, et garder intacte l’hypothèse : peut-être un jour vivrons-nous plus longtemps ; mais pour l’instant, réinventer le pouvoir semble déjà suffire à nourrir ces rêveries d’un autre temps.