Ce n’est pas un hasard si, au SIAM 2025, on parle beaucoup de “territoires”. Le mot est à la mode. Il sent bon la transversalité, le “terrain”, l’ancrage. Mais derrière ce concept un peu flou se cache une réalité très concrète : le monde rural bouge, résiste, invente — souvent sans faire de bruit.
Les oasis ? En mutation. Les montagnes ? En adaptation. Les zones de bour ? En expérimentation. Partout, des dynamiques locales s’organisent pour répondre à un triple défi : moins d’eau, moins de jeunes, moins de services. Et pourtant, la vie continue. Mieux : elle se transforme.
À Msemrir ou à Figuig, des chercheurs de l’IAV et du CIRAD cartographient des logiques d’adaptation hydrique que personne ne voit sur les rapports d’experts. À l’ombre des grands plans nationaux, des communautés gèrent des canaux, réorganisent la production, réinventent des modèles économiques basés sur l’agroécologie, le pastoralisme ou la cueillette.
Ces initiatives sont fragiles, souvent informelles, parfois bancales. Mais elles existent. Et elles racontent une autre histoire que celle des grands projets structurants. Une histoire de micro-résilience, de bricolage stratégique, d’innovation douce. Au SIAM, on les appelle “dynamiques territoriales”. Mais elles sont surtout des stratégies de survie dignes et ingénieuses.
Encore faut-il qu’on les écoute. Car trop souvent, les politiques agricoles ignorent la finesse des contextes locaux. On applique des modèles standardisés sur des sols trop hétérogènes. Résultat : les dynamiques rurales avancent… sans l’État. Ou contre lui.
L’avocat du diable : territoires, pièges à subventions ?
Attention à ne pas romantiser les “territoires”. Depuis que le mot est tendance, il sert parfois d’alibi pour masquer l’impuissance politique. On peint une carte, on met des labels, on crée un comité. Mais souvent, derrière le vernis participatif, les décisions clés restent centralisées. Pire : les territoires deviennent des réceptacles passifs de projets pilotés d’en haut. Le risque ? Que la “dynamique locale” ne soit qu’un habillage. Un cache-misère rural. Et que l’on oublie que sans droits fonciers solides, sans infrastructures, sans égalité d’accès aux ressources, un territoire reste… un décor.