Tirer, pointer, râler... recommencer




​Par El Hassane Kamal, journaliste stagiaire à LODJ Média

La pétanque, c’est un peu comme le thé à la menthe : tout le monde en a déjà goûté, mais chacun a sa recette. Il y a ceux qui pointent, ceux qui tirent, et ceux qui ne font que commenter, généralement, souvent très fort, surtout quand ce n’est pas leur tour…

Je ne vais pas vous mentir : avant d’écrire cette chronique, ma dernière interaction avec une boule de pétanque remontait à un après-midi au Stade Marocain, où j’avais davantage de chances de toucher le barbecue que le cochonnet. Et pourtant, me voilà à parler d’un sport que je croyais réservé aux retraités en claquettes, ceux qu’on aperçoit sur les places, en cercle, à discuter plus qu’à jouer. Quelle erreur.

Derrière cette tranquillité apparente, la pétanque est une véritable jungle. Un savant mélange de géométrie, de philosophie et de mauvaise foi. Car oui, on peut très bien rater une boule d’un bon mètre cinquante et déclarer avec fierté :
« Je voulais gêner, c’était stratégique ! »
Et ça passe. Comme au football, lorsqu’un joueur rate une passe et crie : « Laisse, laisse ! », pour faire croire que c’était prévu.

Mais ici, pas de carton rouge. Juste des regards. Et parfois une sanction plus subtile, plus cruelle : faire Fanny. Pour ceux qui l’ignorent, faire Fanny, c’est perdre 13 à 0. L’humiliation suprême. Pas de VAR, pas de temps additionnel. Tu prends une raclée nette et, si la tradition est respectée, tu dois embrasser les fesses d’une statue nommée Fanny. Oui, oui. Nous sommes bien loin du fair-play FIFA.

Et pourtant, malgré cette pression psychologique, la pétanque est un sport qui fait du bien. Elle muscle en douceur, rapproche les générations, offre une excuse idéale pour sortir, marcher, réfléchir, râler, mais avec élégance. Au Maroc, elle n’est pas aussi populaire que le football ou le padel (nouveau roi des week-ends de trentenaires), mais elle avance tranquillement, comme une boule bien lancée : lentement, mais sûrement.

Il y a même des championnes comme Latifa Ouba, surnommée la « dame de fer », non pas parce qu’elle a tiré sur un tesponsable (quoique…), mais parce qu’elle a fièrement porté les couleurs du pays jusqu’aux compétitions internationales. Une pionnière qui prouve qu’à la pétanque, ce n’est pas la force qui compte, mais la finesse. Un soupçon de concentration. Et beaucoup de conversations.

Ce que j’ai surtout compris, c’est que la pétanque, c’est l’art de prendre son temps, même pour viser un centimètre. Et dans un monde où tout va trop vite, c’est peut-être ça, le vrai luxe : rater en paix, avec dignité… et un verre de thé à portée de main.

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Vendredi 8 Aout 2025

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