​Safi endeuillée : penser la ville résiliente pour que l’irréparable ne se reproduise plus




Dr Az-Eddine Bennani

Safi est aujourd’hui une ville meurtrie. Avant toute analyse ou proposition, j’exprime mes plus vives condoléances aux familles des victimes et ma profonde compassion à l’ensemble des habitantes et habitants de Safi. Je leur souhaite un immense courage face à cette épreuve douloureuse. Je tiens également à remercier les autorités locales et nationales, les forces de sécurité, les services de secours et l’ensemble des acteurs mobilisés pour leur engagement et l’aide apportée aux populations sinistrées.

Mais au-delà de l’émotion et du recueillement, une question s’impose : avons-nous collectivement fait tout ce qu’il fallait pour prévenir, anticiper et limiter une telle tragédie ?

Depuis plusieurs années, dans mes travaux sur la ville intelligente et résiliente, je défends une idée centrale : une ville moderne se mesure à sa capacité à protéger ses citoyens face aux chocs climatiques, industriels ou sociaux. Safi, comme d’autres villes marocaines, est exposée à des risques connus. Ce qui fait défaut, ce sont encore trop souvent des dispositifs d’anticipation, d’alerte et de coordination.

Le numérique et l’intelligence artificielle peuvent jouer ici un rôle décisif. Lorsqu’ils sont pensés de manière sociale et frugale, ils deviennent des outils de protection civile. Systèmes d’alerte précoce, capteurs environnementaux, cartographies dynamiques des zones à risque, alertes ciblées aux populations, plateformes de coordination des secours : ces solutions existent et sont adaptées au contexte marocain.

Dans plusieurs villes à travers le monde, notamment Sendai, Rotterdam ou Medellín, ces dispositifs ont permis de réduire significativement le nombre de victimes et l’ampleur des dégâts. La résilience n’est pas un luxe, c’est un choix politique.

La catastrophe de Safi doit être un électrochoc. J’en appelle à ce qu’un budget spécifique soit réservé pour encourager les investisseurs, les startups, les universités et les collectivités territoriales à déployer des dispositifs numériques et d’intelligence artificielle dans les douze régions du Royaume.

Prévenir coûte moins cher que reconstruire, mais surtout, prévenir permet de sauver des vies humaines. L’intelligence artificielle sociale et frugale que je défends n’est pas une IA de contrôle, mais une IA de protection, une IA qui alerte, qui anticipe et qui sauve.

Que la douleur de Safi ne soit pas vaine. Qu’elle nous engage à bâtir des villes plus intelligentes, plus humaines et plus résilientes.


Vendredi 19 Décembre 2025

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