📈 Automobile : retour en fanfare
Le mois de juin 2025, à lui seul, a été particulièrement dynamique : 23 298 véhicules ont été vendus contre 17 368 en juin 2024, soit une hausse mensuelle de +34,14 %. Ces chiffres confirment une reprise forte et durable du marché, dans un contexte économique pourtant encore fragile.
Cette performance est largement portée par les ventes de véhicules particuliers (VP), qui constituent le cœur du marché. Avec 21 309 unités écoulées en juin 2025 (contre 15 855 en juin 2024), le segment enregistre une hausse spectaculaire de +34,40 %. De leur côté, les véhicules utilitaires légers (VUL) ne sont pas en reste avec 1 989 unités vendues, soit une augmentation de +31,46 % par rapport à la même période de l’année précédente.
Sur l’ensemble du premier semestre 2025, les véhicules particuliers ont totalisé 99 309 ventes, en hausse de +34,11 %. Quant aux VUL, ils connaissent une progression encore plus marquée avec 12 717 unités écoulées, soit une hausse de +54,37 %. Ce regain témoigne d’un fort redémarrage de l’activité économique et logistique, où les petites entreprises et les commerçants renouent avec l’investissement.
🔍 Un marché tiré par plusieurs facteurs
Plusieurs éléments expliquent cette reprise vigoureuse du marché automobile marocain : Apaisement de l’inflation : Les tensions sur les prix s'étant atténuées, les ménages retrouvent davantage de visibilité pour investir dans un véhicule neuf. Accès élargi au crédit : Les conditions de financement proposées par les banques et les sociétés de crédit auto sont redevenues attractives, avec des taux stabilisés. L’élargissement de l’offre : Les constructeurs automobiles multiplient les gammes et configurations adaptées au marché marocain (compactes urbaines, hybrides, SUV familiaux). Effet d’attente dissipé : Le ralentissement des années précédentes, causé notamment par la pandémie et les tensions géopolitiques, avait gelé une partie de la demande, qui se libère aujourd’hui. Malgré cet engouement, la part des véhicules électrifiés reste marginale. Le Maroc a certes amorcé une politique d’incitation à l’électrification, notamment à travers le soutien aux bornes de recharge et l’exonération de la vignette pour les modèles zéro émission. Mais pour l’heure, les véhicules thermiques classiques continuent de dominer largement le marché.
La baisse des prix de certains modèles d’entrée de gamme et les offres de reprise contribuent à maintenir cette dynamique favorable au thermique. Toutefois, les constructeurs se préparent à une bascule progressive, sous la pression des engagements environnementaux nationaux et internationaux.
Même si le communiqué de l’AIVAM ne donne pas le détail des parts de marché par constructeur dans ce résumé, les tendances passées laissent penser que Dacia, Renault, Hyundai ou encore Peugeot conservent leurs places dominantes, notamment dans le segment des voitures particulières. L’agressivité tarifaire, les campagnes promotionnelles et l’élargissement de l’offre SUV expliquent en partie ces performances.
Dans le segment des utilitaires, les marques comme DFSK, Fiat Professional et Renault Pro+ devraient également profiter de cette embellie, avec une demande renforcée dans les secteurs du transport de marchandises, du e-commerce et de la logistique alimentaire.
Ces chiffres, bien qu’impressionnants, ne sont pas isolés. Le Maroc se positionne de plus en plus comme un hub automobile régional, autant pour la fabrication que pour la consommation. Avec Tanger Med comme plateforme logistique stratégique, les flux de véhicules s’accélèrent aussi bien à l’import qu’à l’export. De plus, les unités de production de Stellantis à Kénitra et de Renault à Tanger participent à dynamiser l’ensemble de la filière.
Le marché intérieur devient ainsi plus mature, plus structuré, et commence à attirer de nouveaux entrants, y compris dans les gammes asiatiques et les modèles électriques, à l’image de BYD, Chery ou MG.
Cette euphorie pourrait-elle être de courte durée ? Certains analystes préviennent qu’une croissance aussi rapide peut cacher des déséquilibres temporaires. La concentration des ventes sur quelques grandes villes (Casablanca, Rabat, Marrakech) et la dépendance à des stocks limités pourraient créer des goulots d’étranglement. À cela s’ajoute le risque d’un retournement économique mondial, qui pourrait ralentir les importations et affecter le pouvoir d’achat.
Mais à court terme, tous les voyants sont au vert. Le marché semble bien parti pour dépasser les 200 000 unités d’ici fin 2025, un cap symbolique qui rappellerait les années de boom du début des années 2010.
Malgré ces chiffres enthousiasmants, l’accès à la voiture neuve reste encore très inégal au Maroc. La majorité des ventes est concentrée dans les grandes agglomérations, tandis que les régions rurales ou les petites villes continuent de dépendre du marché de l’occasion. De plus, les jeunes actifs et les classes moyennes peinent encore à accéder à des véhicules neufs sans recourir à un crédit long et contraignant.
La démocratisation réelle du marché passera donc par une politique publique plus ambitieuse : subventions ciblées, accompagnement des jeunes acheteurs, et développement d’une vraie offre locale d’entrée de gamme. Seule une telle stratégie permettrait de faire de la voiture un levier d’inclusion, et non un symbole de fracture sociale.