Cette architecture commence à transformer plusieurs domaines :
Et c’est justement ce basculement de la reconnaissance à l’anticipation qui rejoint profondément notre propre manière marocaine de penser, apprendre, transmettre et produire.
Dans De l’aiguille au digital, j’ai montré que l’intelligence artisanale marocaine est une intelligence de la projection. Le Maâlam ne se contente pas de répéter un geste : il voit l’ouvrage terminé avant de commencer.
Le tissu, la tension du fil, la posture de la main constituent un état présent ; le mouvement de l’aiguille est l’action ; la forme imaginée est l’état futur anticipé. Il ne copie pas : il prévoit. Cette logique est exactement celle d’une architecture JEPA. L’IA prédictive n’est donc pas une rupture culturelle : elle est la continuité numérique de notre intelligence du geste.
Cette même logique est au cœur de ce que j’ai conceptualisé comme l’entreprise intelligente.
Le modèle ne se contente pas de classifier ces éléments : il prévoit les rendements probables, les périodes optimales de stock ou de vente, et les marges économiquement soutenables. La valeur créée reste localement, car l’apprentissage se fait sur les données du territoire, avec des modèles enracinés dans les réalités marocaines.
Le même principe s’applique à l’agriculture intelligente. Le paysan marocain lit le ciel, écoute le vent, sent la terre. Sa connaissance est une connaissance d’anticipation incarnée. Une IA JEPA apprend ces relations à partir d’observations réelles et devient un allié du geste agricole, non un substitut techniciste. L’IA n’impose rien, elle accompagne.
Dans la santé, le projet T@C@RE a montré que la prévention repose sur la capacité à anticiper les dégradations cliniques.
L’enjeu stratégique pour le Maroc est donc le suivant : passer d’une IA importée et imitative à une IA incarnée et projective.
La souveraineté numérique ne se mesure pas au nombre de serveurs, mais à la maîtrise de nos modèles de représentation du monde. La souveraineté cognitive ne se joue pas dans la capacité à exécuter des commandes, mais à anticiper la transformation du réel.
À l’ère de l’intelligence artificielle prédictive, nous sommes appelés à redevenir ce que nous avons toujours été : un pays du geste intelligent, un pays où la pensée précède l’ouvrage, où l’avenir se façonne avant d’être accompli. La technologie ne nous manque pas. Ce qui nous manque est la conscience claire que notre modèle d’intelligence est déjà là, vivant, transmis, prêt à être prolongé.
Par Dr Az-Eddine Bennani












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