Des pistes pour un transfert des charges et de la fiscalité sur le travail


Rédigé par La Rédaction le Mercredi 29 Janvier 2025

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Le Maroc, dans sa quête de consolidation d’un État social durable, ne peut se contenter de réformer la fiscalité du travail sans explorer d’autres sources de revenus fiscales et économiques. Une redistribution équilibrée des charges exige des solutions innovantes et adaptées à son contexte socio-économique.

Voici plusieurs pistes complémentaires pour transférer les charges fiscales tout en garantissant un financement pérenne des politiques sociales.

1. Fiscalité environnementale : Le « pollueur-payeur »

Le Maroc, engagé dans une transition écologique, peut renforcer la taxation sur les activités polluantes pour financer ses politiques sociales :

Taxe carbone : Introduire un système de taxation des émissions de CO₂, en ciblant les secteurs les plus polluants comme l’industrie lourde, les transports ou l’énergie fossile.
Taxes sur les plastiques et déchets industriels : Ces prélèvements encourageraient l’innovation écologique tout en générant des recettes fiscales dédiées au financement de projets sociaux.

Cette fiscalité peut également stimuler la transition vers des énergies renouvelables et renforcer l’image du Maroc comme leader écologique dans la région.

2. Taxation numérique : Profiter de la révolution digitale

Le secteur numérique, en pleine expansion, constitue une opportunité pour diversifier les revenus fiscaux :

Taxe sur les services numériques (Digital Service Tax) : Taxer les activités des grandes plateformes numériques opérant sur le marché marocain (publicité en ligne, e-commerce, services digitaux).
Fiscalité sur les crypto-monnaies : Encadrer et taxer les transactions et activités liées aux crypto-actifs, un marché en plein essor.

Ces mesures permettraient d’adapter la fiscalité aux mutations économiques et d’inclure les nouvelles richesses dans la redistribution.

3. Contribution des secteurs sous-fiscalisés :

Certaines branches économiques restent encore sous-imposées par rapport à leur poids réel :

Secteur agricole commercial : Bien que l’agriculture de subsistance doive rester exonérée, une fiscalité progressive pourrait s’appliquer aux grandes exploitations agricoles, notamment celles exportant des produits à forte valeur ajoutée.
Secteur informel : Mettre en place des mécanismes d’intégration fiscale progressifs pour les activités informelles, en simplifiant les procédures administratives et en proposant des incitations.

Ces actions permettraient de réduire les inégalités fiscales et d’élargir la base d’imposition.

4. Valorisation du patrimoine foncier et immobilier

Taxe sur la spéculation foncière et immobilière : Réduire la rétention des terrains non bâtis et encourager leur mise en valeur pour les projets sociaux ou économiques.
Taxe sur les biens de luxe : Appliquer une fiscalité différenciée sur les propriétés de luxe (résidences secondaires, villas haut de gamme).

Ces mesures permettraient d’utiliser le foncier comme levier de financement des infrastructures sociales, tout en limitant les inégalités.

5. Diversification des revenus parafiscaux

Le Maroc pourrait renforcer les contributions volontaires ou obligatoires sur des secteurs stratégiques :

Taxe de solidarité sur les bénéfices élevés : Une contribution temporaire ou permanente sur les entreprises réalisant des marges exceptionnelles, notamment dans les secteurs protégés ou rentiers.
Parafiscalité sur le tourisme de luxe : Instaurer des taxes supplémentaires sur les services touristiques haut de gamme, qui pourraient alimenter un fonds de développement social.

6. Partenariats public-privé (PPP) pour financer les infrastructures sociales

Plutôt que de dépendre exclusivement des ressources fiscales, le Maroc pourrait mobiliser des fonds privés via des PPP ciblés pour financer des projets dans la santé, l’éducation, ou le logement social. Cela allègerait la pression fiscale tout en répondant aux besoins des citoyens.

7. Réduction des niches fiscales injustifiées

De nombreuses niches fiscales profitent à des entreprises ou secteurs sans réelle justification économique ou sociale. Une révision de ces exemptions pourrait dégager des ressources substantielles, tout en rétablissant une justice fiscale.

8. Fiscalité comportementale : Encourager des choix responsables

Taxes sur les produits nocifs : Tabac, alcool, boissons sucrées ou aliments ultra-transformés pourraient être davantage taxés pour financer les politiques de santé publique.
Incinérations de déchets médicaux et industriels : Une taxation des filières nécessitant des traitements coûteux.

Ces politiques, bien ciblées, permettraient de financer des services publics tout en améliorant les comportements sociaux et sanitaires.

9. Optimisation et lutte contre l’évasion fiscale

Enfin, aucun système fiscal durable ne peut fonctionner sans une lutte efficace contre l’évasion fiscale :

Renforcer les capacités de l’administration fiscale pour mieux détecter les fraudes.
Améliorer la transparence financière via des échanges d’informations internationaux.

Une meilleure collecte fiscale est souvent aussi efficace qu’une augmentation des taxes.

Vers un modèle fiscal inclusif et durable

Ces pistes, combinées à une réforme globale du système fiscal marocain, permettraient de garantir le financement de l'État social sans alourdir excessivement les charges sur les revenus du travail. La réussite de ces mesures repose toutefois sur une acceptation sociale, nécessitant un dialogue ouvert entre les citoyens, les entreprises et l’État.

 

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Mercredi 29 Janvier 2025
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