L’après-ChatGPT : l’ère du savoir disponible
Mais accumuler du savoir ne signifie pas apprendre. Beaucoup connaissent désormais le mot « IA », sans pour autant comprendre ce qu’elle est vraiment, ni mesurer son impact profond sur l’économie, l’emploi, la culture ou la société. L’IA est devenue un thème à la mode, un objet de discours, parfois un slogan. Mais l’apprendre, lui, demande du temps, de l’expérience, de la confrontation au réel et de la pratique.
Apprendre l’IA, c’est comprendre ses mécanismes, ses limites, ses usages concrets, et en tirer des leçons pour transformer nos institutions et nos vies. C’est un processus lent, exigeant, qui s’inscrit dans le temps long de l’expérimentation, celui du learning by doing que je défends depuis mes premiers travaux sur la stratégie et la gouvernance du numérique.
Le savoir : une ressource que la machine maîtrise mieux que nous
Comme je l’ai démontré dans mes travaux sur le paradoxe de la productivité et sur l’alignement stratégique (thèse, 1998 et HDR, 2005), le savoir ne crée de valeur que lorsqu’il s’inscrit dans un système apprenant, c’est-à-dire lorsqu’il se transforme en action, en apprentissage et en compétence. Autrement dit : le savoir n’est utile que lorsqu’il est vécu.
Apprendre : transformer le savoir en sens et en action
« On n’apprend pas l’IA en l’écoutant ; on l’apprend en l’utilisant, en la testant, en la critiquant, en la vivant. » C’est ce que j’appelle l’intelligence systémique : une boucle vivante entre savoir, action et retour d’expérience, où la compétence se construit dans la durée et non dans la seule exposition à l’information.
Le cas des écoles de commerce : du savoir abstrait à la compétence vécue
Or, la compétence dont les entreprises ont besoin ne découle pas de la récitation d’un savoir codifié, mais de la capacité à apprendre, à relier et à innover dans l’incertitude. La vraie valeur d’un diplômé ne réside pas dans ce qu’il sait, mais dans sa faculté à apprendre vite et à transformer le savoir en action utile.
Ce passage du savoir à la compétence correspond précisément à l’évolution que j’ai décrite dans le paradigme numérique : le savoir y est matière première, l’apprentissage en est le moteur, et la compétence, le produit vivant.
La compétence : création de valeur économique et sociale
Une économie de la compétence repose donc sur le sens, non sur la simple accumulation d’informations. C’est la maîtrise de l’usage des savoirs et non leur possession qui détermine la performance durable d’une entreprise, d’une école ou d’une nation.
Le modèle marocain et africain : apprendre pour exister
Apprendre l’IA ne doit pas signifier l’adopter passivement, mais la comprendre, la questionner et l’adapter à nos besoins culturels, économiques et sociaux. C’est à la Médina de Rabat, lors des Cafés IA, que cette vision prend forme : un lieu où l’on apprend ensemble, entre générations et métiers, à faire du numérique un outil de sens et de souveraineté.
Sans données, pas d’IA ; sans apprentissage, pas d’humanité
Depuis ChatGPT, le monde s’est passionné pour le savoir. À présent, il nous faut redécouvrir l’art d’apprendre : apprendre lentement, par la pratique, par l’expérience, par le dialogue. C’est là que se joue la véritable distinction entre l’humain et la machine. « Ce n’est pas la réponse qui éclaire, mais la question », disait Socrate. Et à l’ère de l’IA, nous pouvons ajouter : « Ce n’est pas la donnée qui fait sens, mais l’intelligence qui apprend à la comprendre. »
Par Dr Az-Eddine Bennani












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