Dans un exposé devant la Chambre des représentants, la ministre déléguée chargée de la Transition numérique et de la Réforme de l’administration, Amal El Fallah Seghrouchni, a dressé le bilan des progrès récents : plus de 35 000 entreprises ont été créées par voie électronique via la plateforme nationale dédiée, un chiffre qui illustre la montée en puissance de la numérisation des démarches administratives pour les entrepreneurs marocains. 
 

Ce chiffre, loin d’être anecdotique, marque un tournant : il montre que pour une frange grandissante d’acteurs économiques, l’administration se rapproche des réalités du 21ᵉ siècle. Je me souviens de ma première tentative de création d’entreprise il y a une dizaine d’années – papier après papier, visite après visite au guichet – un parcours du combattant qui a découragé plus d’un projet prometteur. Aujourd’hui, cette création en ligne, c’est un signal fort envoyé au monde de l’investissement et aux jeunes porteurs de projet : le Maroc veut faciliter l’initiative économique.
 

Le Portail national des services numériques, lancé en février 2025, rassemble désormais plus de 600 prestations digitales, couvrant aussi bien les citoyens que les entreprises et les administrations. Parmi elles, des procédures complexes et autrefois longues – comme la demande de certains certificats – sont transformées en démarches qui se complètent en quelques clics. 
 

Pourtant, la transition numérique ne se résume pas à un simple catalogue de services. La ministre a insisté sur l’importance de conformité légale et de sécurité : environ la moitié des processus numériques sont déjà alignés avec les lois marocaines sur la protection des données personnelles (loi n°09-08) et la cybersécurité (loi n°05-20), soit plus de 120 services sécurisés selon les normes en vigueur. 
 

Ce souci de protection n’est pas anodin dans un monde où la confiance des usagers devient aussi importante que la technologie elle-même. Une démarche qui, si elle s’intensifie, pourrait renforcer le capital social autour des services publics numériques et encourager une plus large adoption par les citoyens, notamment les plus sceptiques.

Parallèlement à la simplification des formalités, le Maroc prépare une étape majeure du plan Digital Maroc 2030 : la feuille de route “Maroc IA 2030”, attendue en janvier prochain. Elle s’appuie sur le réseau national de centres d’excellence “Jazari Institute”, destiné à devenir le principal moteur de l’innovation en intelligence artificielle.
 

L’ambition est claire : instaurer une coordination nationale pour faire de l’IA un levier de performance pour l’administration publique, la recherche et le développement technologique. Ce type d’infrastructure pourrait être un catalyseur pour les startups, les chercheurs et les institutions académiques, en favorisant l’émergence de solutions adaptées aux besoins locaux tout en renforçant la compétitivité internationale du Maroc.
 

Une autre donnée mérite d’être soulignée : selon les autorités, le Royaume a progressé de 14 points dans l’état de préparation à l’intelligence artificielle à l’horizon 2025, se hissant à la 87ᵉ place mondiale, et à la 8ᵉ position parmi les pays du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord. 

Cependant, tout n’est pas parfait. Certains acteurs du secteur soulignent que malgré ces avancées, une grande partie des procédures reste partiellement numérisée, et l’expérience utilisateur peut encore être améliorée. Cela rappelle que la modernisation administrative n’est pas seulement technologique : elle est culturelle, exigeant un effort continu de formation et d’adaptation des pratiques.
 

Cette transformation numérique, si elle est menée avec rigueur et inclusivité, peut être un moteur de croissance durable pour le Maroc. Elle rapproche les citoyens de l’administration, ouvre de nouvelles perspectives pour les entrepreneurs et inscrit le pays dans une dynamique économique mondiale tournée vers l’avenir.
 

En filigrane, c’est une promesse celle d’un Maroc qui simplifie, protège, innove et prépare sa jeunesse aux défis numériques du XXIᵉ siècle. Un pari ambitieux, peut-être, mais en pleine réalisation.