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À défaut de convaincre, autant obliger : quand l’opposition marocaine rêve du vote obligatoire


Rédigé par le Mardi 9 Septembre 2025



Au Maroc, l’abstention électorale reste l’ombre portée de la démocratie représentative. Plus d’un électeur sur deux choisit l’absence plutôt que l’urne. Dans ce vide grandissant, le Parti du progrès et du socialisme (PPS) a choisi de sortir une vieille arme du placard : rendre le vote obligatoire. L’idée, couchée noir sur blanc dans son mémorandum du 28 août adressé au ministère de l’Intérieur, sonne comme une solution miracle. Mais elle révèle surtout un malaise profond : celui d’une opposition incapable de convaincre les Marocains de participer librement, et qui en vient à rêver de les contraindre.

Le paradoxe des libertés brandies et bridées

Il y a un parfum d’ironie dans cette proposition. Le PPS et d’autres formations d’opposition ont bâti leur légitimité politique sur la défense acharnée des libertés individuelles et collectives, face à un État central accusé de contrôle excessif. Aujourd’hui, les mêmes voix plaident pour transformer le droit de vote en devoir impératif, sanctionné en cas d’abstention. La liberté politique, jadis totem de l’opposition, se retrouve ainsi instrumentalisée : vous êtes libres… mais obligés d’exercer cette liberté. C’est le paradoxe du « démocrate discipliné », où l’on défend l’ouverture tout en serrant le carcan.

Une réponse facile à une crise profonde

Le vote obligatoire apparaît comme une rustine posée sur une fracture plus grave : la perte de confiance entre citoyens et institutions. L’abstention n’est pas un caprice civique, c’est un symptôme. Elle dit la défiance, la lassitude, parfois même la colère. En la traitant par l’obligation, on confond la cause et la conséquence. On remplit les urnes de bulletins contraints, mais on ne remplit pas les cœurs de conviction. À quoi bon faire voter par obligation si l’offre politique ne séduit pas ?

La faisabilité juridique et ses zones grises

D’un point de vue technique, instaurer un vote obligatoire supposerait une révision du Code électoral, mais aussi l’instauration de mécanismes de contrôle et de sanction. Amendes ? Privation de certains droits civiques ? Les pistes sont floues et politiquement explosives. Dans un pays où l’administration peine déjà à gérer les listes électorales, comment contrôler efficacement les millions d’électeurs ? Et surtout, est-il légitime d’introduire une pénalisation de l’abstention dans un contexte où la participation a toujours été présentée comme un acte volontaire de citoyenneté ?

Un effet boomerang pour la crédibilité politique

À vouloir obliger, l’opposition prend le risque de creuser encore plus le fossé qui la sépare de l’opinion. Car les Marocains, loin d’être insensibles à la politique, savent reconnaître quand on tente de maquiller un déficit de légitimité par une mesure coercitive. Le danger est double : vider le vote de son sens en le transformant en formalité administrative, et renforcer le cynisme ambiant — celui qui murmure que « les partis sont tous les mêmes » et que le choix des urnes ne change pas le quotidien.

Convaincre plutôt que contraindre

Loin d’un gadget juridique, la véritable bataille est ailleurs : réinventer l’offre politique, parler vrai, répondre aux angoisses sociales, donner envie de croire à la politique. Convaincre, c’est accepter l’effort patient d’une pédagogie citoyenne. Obliger, c’est avouer sa faillite à inspirer. En proposant le vote obligatoire, l’opposition trahit son propre récit, celui d’un Maroc où la liberté devait primer sur la contrainte.

En guise de conclusion

À un an des législatives, la tentation du raccourci révèle surtout le vide de la réflexion stratégique. Le vote obligatoire pourrait remplir les urnes mais il ne remplirait pas le contrat de confiance. Et sans confiance, la démocratie reste une coquille vide. L’opposition marocaine ferait mieux de raviver la flamme citoyenne par le débat et l’innovation politique, plutôt que de transformer l’acte électoral en obligation administrative. Car à défaut de convaincre, contraindre n’est pas un progrès démocratique : c’est une défaite morale.

Le vote obligatoire est un système dans lequel la participation aux élections est une obligation légale pour les citoyens, avec des sanctions prévues en cas de non-respect. Cette mesure, appliquée dans des pays comme la Belgique et l'Australie, vise à accroître la participation électorale et à garantir une meilleure représentativité démocratique, bien qu'elle soit l'objet de débats. En France, le vote est un devoir civique mais n'est pas rendu obligatoire par la loi, ce qui permet aux citoyens de s'abstenir sans être sanctionnés





Mardi 9 Septembre 2025

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