Chaque année, on nous vend le rêve d’un été marocain ensoleillé, riche en découvertes, où les familles se retrouvent, se reposent, profitent. Mais pour des millions de Marocaines et Marocains, la réalité est tout autre. Les vacances au Maroc sont devenues un parcours du combattant, une suite de galères, de frustrations et d’arnaques à répétition. Et pendant ce temps, tout le monde fait semblant de ne rien voir.
Locations hors de prix, services minables
Dès le mois de juin, les plateformes de location sont prises d’assaut. Les prix flambent sans aucune régulation, atteignant parfois des sommes absurdes pour des appartements modestes ou des maisons sans confort. Des studios à 1.000 DH la nuit à Martil, des appartements à 1.500 DH à Saïdia sans eau chaude ni climatisation, des logements insalubres à Agadir ou Essaouira présentés comme des havres de paix… La spéculation a pris le dessus sur le bon sens.
Et que dire de la qualité des services ? Wifi en panne, propreté inexistante, promesses non tenues, hôtes injoignables : on paie cher pour des prestations dignes d’un service au rabais. Aucune protection du consommateur, aucun contrôle. Les familles, souvent avec enfants ou personnes âgées, se retrouvent piégées, contraintes d'accepter, ou de repartir, sans remboursement.
Arnaques partout, confiance nulle part
Le cauchemar ne s’arrête pas là. Sur les plages, les "mafias de parasols" règnent en maître. Impossible de poser sa serviette sans se faire agresser verbalement ou physiquement. Chaque mètre carré est loué à prix d’or. Et les autorités ? Elles ferment les yeux. Résultat : les plages publiques, censées être un bien commun, sont littéralement confisquées au profit d’intérêts privés.
Même scénario pour les parkings sauvages, les vendeurs à la sauvette, les soi-disant "guides touristiques", les faux rabatteurs de restaurants ou de hammams. Le sentiment général est celui d’être pris pour une vache à lait. On se fait arnaquer au quotidien, sans filet, sans recours.
Transports, routes, restaurants : l’enfer du quotidien
Sur les routes, c’est l’apocalypse. Bouchons interminables, transports interurbains vétustes et bondés, taxis qui doublent leurs tarifs, trains en retard, climatisation en panne… Le trajet, qui devrait être synonyme d’excitation ou de repos, se transforme en torture.
Et une fois arrivé·e ? Les restaurants augmentent leurs prix, sans améliorer leur service. Des additions qui explosent pour une qualité souvent décevante. Il n’est pas rare de payer 100 DH pour un plat froid, mal cuit, servi après une heure d’attente, sans excuse ni geste commercial. Pire encore, certains restaurateurs discriminent : ceux qui parlent arabe sont traités comme des clients de seconde zone, tandis que les touristes étrangers sont choyés.
Les Marocains privés de leur pays ?
Il faut oser poser la question : les Marocain·es sont-ils encore chez eux pendant l’été ? Dans certaines villes balnéaires ou stations de montagne, ils et elles sont traités comme des intrus. Les hôtels, les cafés, les plages, les lieux de détente semblent parfois réservés à une certaine classe sociale, ou à une clientèle étrangère. Et cette logique d’exclusion alimente colère, ressentiment et sentiment d’abandon.
Et pourtant… Le Maroc a tout pour réussir
Le plus tragique dans tout cela, c’est que le Maroc pourrait être un paradis pour ses citoyen·nes, et pas seulement pour les touristes. Nous avons des côtes magnifiques, des montagnes accueillantes, un patrimoine riche, une culture hospitalière, un climat rêvé. Mais rien n’est structuré, rien n’est pensé pour les Marocain·es moyen·nes, qui aspirent simplement à des vacances dignes.
Il est urgent que les autorités locales, les communes, les ministères concernés prennent leurs responsabilités. Il faut réguler les locations, imposer des prix plafonds, renforcer les contrôles, sécuriser les plages, interdire les pratiques mafieuses, sanctionner les abus. Le tourisme ne peut pas être un secteur anarchique où tout est permis, tant que ça rapporte.
Assez de subir. L’été ne doit plus être un privilège !
Les vacances ne doivent pas être une course à la survie ou une source de stress et de colère. Elles sont un droit, un moment de répit, de lien social, de bien-être. Mais aujourd’hui, au Maroc, ce droit est menacé par l’irresponsabilité, la cupidité, l’absence de régulation et de vision.
Ce coup de gueule n’est pas un rejet du pays. C’est au contraire un appel à le sauver, à exiger mieux pour ses citoyen·nes, à remettre de l’ordre, de la justice et du respect dans un secteur qui a trop longtemps échappé à toute règle.
Parce qu’aimer son pays, c’est aussi refuser qu’il devienne invivable.