La présidentielle du 12 octobre n’aura finalement laissé aucun répit au chef de l’État, malgré 43 ans de pouvoir déjà cumulés. Face à lui, Issa Tchiroma Bakary, ancien ministre devenu principal opposant, a enregistré 35,19 % des voix — un score inattendu qui resserre le duel politique dans un pays habitué à des élections verrouillées.
 

Dès la proclamation des chiffres, l’opposant a dénoncé une « mascarade », assurant avoir obtenu « 65 à 70 % » des suffrages. Il conteste l’ensemble du processus électoral qu’il qualifie de « dictature pure et dure ». Autour de son domicile à Garoua, dans le Nord, des manifestations ont dégénéré : plusieurs morts ont été évoqués par l’opposition après des tirs en direction de la foule.
 

Les autorités administratives ont rapporté quatre décès la veille à Douala lors de rassemblements de soutien à Issa Tchiroma Bakary. Les forces de sécurité ont utilisé des gaz lacrymogènes puis tiré à balles réelles pour disperser les protestataires, selon des témoins. Les principaux centres urbains étaient déjà sous restrictions strictes : rassemblements interdits et circulation limitée jusqu’à l’annonce des résultats.
 

Avec une participation de 46,31 %, ce scrutin à un tour montre un pays partagé, fatigué par des décennies d’autoritarisme, et meurtri par le conflit dans les régions anglophones depuis 2016. Derrière le duo de tête, Cabral Libii termine troisième avec 3,41 %, suivi de Bello Bouba Maïgari à 2,45 % et Hermine Patricia Tomaïno Ndam Njoya, seule femme candidate, à 1,66 %. Les huit autres postulants sont restés sous la barre des 1 %.

Pour Paul Biya, cette réélection actée par les institutions ouvre un nouveau quinquennat dans un contexte inflammable : contestation politique accrue, défi sécuritaire permanent, économie fragilisée. À 92 ans, la question de la transition du pouvoir devient plus que jamais un enjeu central pour les Camerounais. L’examen des recours et la validation définitive des résultats par le Conseil constitutionnel dans les prochains jours. Reste aussi à voir comment les autorités géreront les tensions post-électorales et si l’opposant poursuivra son bras de fer.