Dans les allées du SIAM, ça parle toutes les langues : français châtié, anglais diplomatique, arabe rural, espagnol technique. Bienvenue à la grande foire de la coopération internationale agricole. Ici, les stands sont des ambassades, les conférences des sommets, et les brochures des traités. On y signe des protocoles, on y serre des mains, on y échange des semences... et des stratégies.
Le Maroc est un élève appliqué du soft power agricole. Il reçoit, mais il exporte aussi son savoir-faire : irrigation, dattes, structuration de filières, valorisation des produits du terroir. Le pays est à la fois bénéficiaire et partenaire, cible de financement et acteur du développement. Un pied dans l’Afrique, un autre en Méditerranée, la tête dans les agendas globaux (FAO, IFAD, AFD, Union Européenne…).
Au SIAM 2025, la coopération se décline en lettres d’intention, en académies de leadership, en projets multi-pays. On y parle “transition juste”, “résilience partagée”, “solidarité Sud-Sud”. C’est noble. Et souvent sincère. Mais c’est aussi un terrain de jeux géopolitique.
Car derrière chaque don, chaque expertise offerte, chaque PPP, il y a des intérêts. Des marchés à ouvrir. Des technologies à vendre. Des normes à imposer. Des récits à construire. Et des dépendances à entretenir. La coopération agricole, quand elle est bien faite, est une chance. Quand elle est mal calibrée, elle devient un poison lent, déguisé en bonbon.
L’avocat du diable : partenariat ou néo-paternalisme ?
Et si la coopération, parfois, ressemblait à un vieux film qu’on connaît trop bien ? Les experts viennent, forment, partent. Les projets démarrent, séduisent, s’essoufflent. Les pays “amis” proposent des modèles… en oubliant de demander si le terrain en veut. La coopération risque de devenir un miroir flatteur pour les donateurs, et un agenda imposé pour les récepteurs. Le vrai partenariat, c’est celui où le Sud écrit aussi le cahier des charges. Sinon, ça s’appelle une sous-traitance géopolitique.