La lutte de Salamatou : être reconnue vivante après avoir été effacée
Salamatou rencontre son mari, Léon-Pape Segla Adjovi, en 2012, au Bénin. Après leur mariage en 2016, son époux l’amène en France, où elle bénéficie d’un titre de séjour pour regroupement familial. Mais très rapidement, la situation dégénère. Son mari, violent, la maltraite physiquement, la prive de toute autonomie et garde jalousement tous ses documents personnels. Malgré ses souffrances et l’isolement, Salamatou tente de s’intégrer en trouvant un emploi dans un centre aéré à Metz. Mais son mari bloque systématiquement ses démarches administratives, et il lui interdit même de renouveler son titre de séjour.
La supercherie fatale : un acte de décès falsifié
C’est en tentant de récupérer ses papiers que Salamatou découvre l’impensable : son ex-mari a déclaré sa mort en 2018 auprès des autorités béninoises. Avec un faux acte de décès et une facture d'obsèques falsifiée, il a cherché à escroquer une assurance-vie. Et dans le silence des administrations, la fraude passe inaperçue. En conséquence, Salamatou est désormais inscrite comme morte, aussi bien en France qu’au Bénin. Cette situation la prive de tous ses droits : accès à des soins médicaux pour son cancer, recherche d'un logement ou d’un emploi, et même toute reconnaissance officielle de son existence.
La lutte pour exister
Malgré tout, Salamatou persiste à chercher justice. Elle dépose une plainte pour violences conjugales en 2019, mais celle-ci n’est pas d’abord reconnue. Ce n’est qu’en 2022, après de nombreuses démarches et une nouvelle plainte, que la justice française commence à entendre ses souffrances. Pourtant, la réalité administrative reste impitoyable : bien que les violences soient enfin reconnues, Salamatou reste sous le coup d’une Obligation de Quitter le Territoire Français (OQTF), et son identité n'est toujours pas validée par les autorités françaises.
Aujourd’hui, avec l’aide de l’Association d'Information et d'Entraide Mosellane (AIEM), elle est hébergée dans un hôtel de Metz, mais sa situation reste incertaine. Comment une femme peut-elle être effacée de la société simplement à cause d’un faux acte de décès ? Cette histoire soulève des questions sur les failles administratives et le manque de prise en charge des victimes de violences conjugales, notamment celles étrangères, qui semblent être les dernières à bénéficier d’une véritable protection.
L’histoire de Salamatou Johnson est un exemple frappant de l’impunité qui entoure parfois les violences conjugales, particulièrement lorsque les victimes sont étrangères. Elle soulève une question essentielle : comment une personne peut-elle être effacée de la réalité administrative et de la justice ? Et plus encore, comment une victime de violences, dans un contexte déjà extrêmement difficile, doit-elle lutter contre des moulins à vent administratifs pour exister légalement et humainement ? La reconnaissance de ses droits, qu'ils soient médicaux, sociaux ou même simplement d'existence, est un combat de chaque instant.












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