Ce que j’ai appelé à l’époque le paradigme numérique renvoyait à une mutation profonde : la substitution progressive des logiques humaines de jugement et de sens par des logiques computationnelles.
Autrement dit, ce système n’a pas besoin d’esprits libres, mais d’exécutants dociles. Il ne fabrique pas des citoyens, mais des « crétins » fonctionnels, adaptés à une économie du pilotage et de la répétition. L’éducation n’est plus un acte d’émancipation, mais un processus de formatage cognitif, où l’on apprend à exécuter plutôt qu’à comprendre.
Avec l’essor de l’intelligence artificielle, le paradoxe s’amplifie.
Le défi n’est donc pas technique, mais pédagogique et éthique : voulons-nous une IA qui pense à notre place, ou une IA qui nous aide à penser autrement ? Former à l’ère de l’IA ne peut se limiter à enseigner le codage ou la manipulation des outils. Il s’agit de restaurer la fonction critique de la pensée : apprendre à interroger, à relier, à comprendre les systèmes dans lesquels nous vivons. C’est la seule voie pour sortir du cercle du paradoxe de la productivité : produire du sens plutôt que de la performance.
Les universités, les écoles et les entreprises doivent redevenir des laboratoires d’intelligence collective, où l’on apprend autant à douter qu’à décider.
Ce choix déterminera la nature de notre avenir collectif; entre automatisation du savoir et renaissance de la pensée. La véritable innovation, à l’ère de l’intelligence artificielle, ne réside pas dans la machine, mais dans la réhabilitation de l’esprit critique. C’est elle seule qui permettra de passer d’une fabrique des « crétins » à une fabrique des consciences éclairées.
Par Dr Az-Eddine Bennani












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