La rencontre a ensuite été introduite avec grâce et profondeur par Madame Hayat Dinia, qui a su rappeler avec émotion l’importance de l’œuvre de M. Tazi dans le paysage culturel marocain.
L’événement fut consacré au thème : « De Badis à Fatema, la sultane inoubliable : des femmes fortes et battantes dans le cinéma de M. Abderrahmane Tazi ».
L’analyse brillante de son œuvre fut assurée par Mme Rita El Khayat, psychiatre, anthropologue, écrivaine et peintre, qui a mis en lumière la place essentielle que le réalisateur accorde aux figures féminines dans son cinéma.
Je ne reviendrai pas ici sur les propos très justes et profonds tenus hier par Mme Dinia et Mme El Khayat. Mais je souhaite m’attarder sur trois moments particulièrement marquants de cette rencontre, trois prises de parole de Monsieur Tazi qui méritent d’être entendues, relayées, et inscrites dans notre réflexion collective.
D’abord, ce vœu fort qu’il a formulé avec lucidité et conviction : que le cinéma soit enseigné dans tous les collèges et lycées du Maroc.
Selon lui, cette éducation à l’image dès le plus jeune âge est la condition pour préparer les générations futures à une véritable culture cinématographique, pour créer des publics avertis, critiques et curieux, et pour garantir la pérennité d’un cinéma marocain enraciné dans la société, puisant dans nos traditions, notre langue, nos imaginaires.
Ce plaidoyer, énoncé avec la sagesse de l’expérience, est un appel à bâtir un écosystème cinématographique durable, libre, marocain dans son âme, et moderne dans ses formes.
L’analyse brillante de son œuvre fut assurée par Mme Rita El Khayat, psychiatre, anthropologue, écrivaine et peintre, qui a mis en lumière la place essentielle que le réalisateur accorde aux figures féminines dans son cinéma.
Je ne reviendrai pas ici sur les propos très justes et profonds tenus hier par Mme Dinia et Mme El Khayat. Mais je souhaite m’attarder sur trois moments particulièrement marquants de cette rencontre, trois prises de parole de Monsieur Tazi qui méritent d’être entendues, relayées, et inscrites dans notre réflexion collective.
D’abord, ce vœu fort qu’il a formulé avec lucidité et conviction : que le cinéma soit enseigné dans tous les collèges et lycées du Maroc.
Selon lui, cette éducation à l’image dès le plus jeune âge est la condition pour préparer les générations futures à une véritable culture cinématographique, pour créer des publics avertis, critiques et curieux, et pour garantir la pérennité d’un cinéma marocain enraciné dans la société, puisant dans nos traditions, notre langue, nos imaginaires.
Ce plaidoyer, énoncé avec la sagesse de l’expérience, est un appel à bâtir un écosystème cinématographique durable, libre, marocain dans son âme, et moderne dans ses formes.
Ensuite, à la question posée par une participante : « Monsieur Tazi, pourquoi n’avez-vous réalisé que sept films ? »
Il a répondu, sans détour ni amertume, mais avec une franchise désarmante : « Pendant dix ans, je n’ai pas pu obtenir le moindre soutien. » Une réponse qui en dit long sur les obstacles structurels auxquels nos créateurs sont confrontés, sur les silences institutionnels, les déserts de financement, et parfois l’oubli de celles et ceux qui, pourtant, portent notre culture à bout de bras.
Enfin, il a brièvement évoqué la pression de l’instantanéité imposée par les réseaux sociaux, qui poussent la jeunesse à zapper, commenter, produire et consommer dans l’urgence. « Le cinéma, ce n’est pas ça », a-t-il rappelé. « Le cinéma, c’est une salle, c’est une heure trente, c’est un temps de silence et d’attention. »
Par cette remarque simple mais profonde, il nous invite à retrouver le sens du rythme, de la lenteur, de la construction narrative, à résister à la tentation du tout-effervescent, et à renouer avec l’expérience collective et sensible que seule une salle de cinéma peut offrir.
Au fil des échanges, j’ai découvert, au-delà du réalisateur engagé, un homme avec qui je partage bien plus que le goût du récit.
Comme lui, je suis issu d’une famille originaire de Fès – les Bennani, comme les Tazi, sont de ces familles fassies dites bourgeoises, empreintes d’histoire et de culture. Comme lui, j’ai grandi à Rabat, ville d’adoption de nos parents venus de Fès, et nous avons été élèves au Lycée Moulay Youssef, lui dans les années soixante, moi dans les années soixante-dix.
Cette filiation urbaine et intellectuelle, ce lien discret entre deux trajectoires, donne à notre rencontre une densité particulière.
Mais au-delà du cinéaste de talent, j’ai découvert un homme d’une humanité rare, attentif, drôle, généreux, profondément humble. En l’écoutant évoquer ses films, ses batailles, ses doutes parfois, j’ai vu un artisan de la lumière, un maâlem du 7ème art, tissant chaque plan comme un fragment de mémoire, avec précision, respect et émotion.
Aujourd’hui, à l’heure où le Maroc cherche à penser son avenir numérique et culturel, il est vital de ne pas oublier ces figures qui ont, dès les premières heures, posé les fondations d’un imaginaire national libre, digne et créatif. Abderrahmane Tazi en fait partie. Il n’a pas seulement filmé le Maroc : il l’a compris, il l’a aimé, et il a su nous le transmettre avec tendresse et lucidité.
Et parce qu’il y a des affinités qui échappent au temps, je souhaite de tout mon cœur que cette rencontre humaine, sincère et lumineuse dure aussi longtemps que possible.
Enfin, il a brièvement évoqué la pression de l’instantanéité imposée par les réseaux sociaux, qui poussent la jeunesse à zapper, commenter, produire et consommer dans l’urgence. « Le cinéma, ce n’est pas ça », a-t-il rappelé. « Le cinéma, c’est une salle, c’est une heure trente, c’est un temps de silence et d’attention. »
Par cette remarque simple mais profonde, il nous invite à retrouver le sens du rythme, de la lenteur, de la construction narrative, à résister à la tentation du tout-effervescent, et à renouer avec l’expérience collective et sensible que seule une salle de cinéma peut offrir.
Au fil des échanges, j’ai découvert, au-delà du réalisateur engagé, un homme avec qui je partage bien plus que le goût du récit.
Comme lui, je suis issu d’une famille originaire de Fès – les Bennani, comme les Tazi, sont de ces familles fassies dites bourgeoises, empreintes d’histoire et de culture. Comme lui, j’ai grandi à Rabat, ville d’adoption de nos parents venus de Fès, et nous avons été élèves au Lycée Moulay Youssef, lui dans les années soixante, moi dans les années soixante-dix.
Cette filiation urbaine et intellectuelle, ce lien discret entre deux trajectoires, donne à notre rencontre une densité particulière.
Mais au-delà du cinéaste de talent, j’ai découvert un homme d’une humanité rare, attentif, drôle, généreux, profondément humble. En l’écoutant évoquer ses films, ses batailles, ses doutes parfois, j’ai vu un artisan de la lumière, un maâlem du 7ème art, tissant chaque plan comme un fragment de mémoire, avec précision, respect et émotion.
Aujourd’hui, à l’heure où le Maroc cherche à penser son avenir numérique et culturel, il est vital de ne pas oublier ces figures qui ont, dès les premières heures, posé les fondations d’un imaginaire national libre, digne et créatif. Abderrahmane Tazi en fait partie. Il n’a pas seulement filmé le Maroc : il l’a compris, il l’a aimé, et il a su nous le transmettre avec tendresse et lucidité.
Et parce qu’il y a des affinités qui échappent au temps, je souhaite de tout mon cœur que cette rencontre humaine, sincère et lumineuse dure aussi longtemps que possible.
Je suis honoré d’avoir croisé sa route, d’avoir échangé, partagé, souri avec lui.
Et je sais que cette rencontre marquera durablement ma mémoire d’homme, de chercheur, et de Marocain.
Merci Monsieur Tazi. Votre cinéma est une leçon. Votre parcours est une inspiration. Votre présence, un cadeau.
Mais au-delà de l’hommage, ce moment fut aussi un appel à la vigilance. Car ce que nous avons entendu hier n’est pas qu’un témoignage du passé, mais une alerte sur le présent : celle d’un grand nom du cinéma marocain qui, malgré son talent, a dû attendre, espérer, résister.
Et si un Maâlem comme Tazi a connu dix années sans soutien, qu’en est-il de ces jeunes créateurs anonymes, de ces cinéastes en devenir, porteurs d’histoires fortes, de regards singuliers, mais souvent condamnés au silence faute d’espace, de moyens, ou de reconnaissance ?
C’est pourquoi je retiens surtout cette phrase, simple, presque murmurée, mais qui résonne comme un manifeste : « Le cinéma doit se nourrir de notre société, de notre culture, et parler notre langue. »
Oui, il est temps de replacer le cinéma marocain au cœur de notre projet culturel, non comme un divertissement lointain, mais comme un outil de mémoire, d’identité, de transmission et de liberté. Et pour cela, nous avons besoin de Maâlems, comme Abderrahmane Tazi.
Des maîtres qui filment avec le cœur, qui racontent sans céder, qui bâtissent sans bruit, mais avec une fidélité intacte à ce Maroc complexe, tendre, souvent blessé, mais toujours digne.
Je me permets de rappeler ici que Monsieur Tazi fut aussi l’un des premiers au Maroc à avoir utilisé la caméra numérique, ouvrant discrètement mais résolument la voie à une modernisation des moyens de production.
Et suite à cette rencontre, qui m’a profondément touché et m’a replongé dans l’atmosphère des maisons de la médina de Fès, je me suis posé une question simple, presque naïve :
L’intelligence artificielle aurait-elle pu servir encore davantage le cinéma de Tazi ?
Ma réponse est double : Oui, peut-être, du point de vue de l’accessibilité économique, car l’IA permet de réduire les coûts, d’automatiser certains processus, et de rendre plus faciles certaines étapes de la réalisation. Mais non, pour tout le reste.
Car le cinéma de Tazi est humain, profondément humain, fait pour l’humain et par l’humain. Il transmet ce qu’il pense et ce qu’il ressent. Il ne s’optimise pas : il se vit, il se respire, il se partage.
Longue vie à votre œuvre, cher ami. Et longue vie au cinéma marocain que vous avez contribué à façonner, dans la patience, l’élégance et l’amour du vrai.
Par Dr Az-Eddine Bennani
Merci Monsieur Tazi. Votre cinéma est une leçon. Votre parcours est une inspiration. Votre présence, un cadeau.
Mais au-delà de l’hommage, ce moment fut aussi un appel à la vigilance. Car ce que nous avons entendu hier n’est pas qu’un témoignage du passé, mais une alerte sur le présent : celle d’un grand nom du cinéma marocain qui, malgré son talent, a dû attendre, espérer, résister.
Et si un Maâlem comme Tazi a connu dix années sans soutien, qu’en est-il de ces jeunes créateurs anonymes, de ces cinéastes en devenir, porteurs d’histoires fortes, de regards singuliers, mais souvent condamnés au silence faute d’espace, de moyens, ou de reconnaissance ?
C’est pourquoi je retiens surtout cette phrase, simple, presque murmurée, mais qui résonne comme un manifeste : « Le cinéma doit se nourrir de notre société, de notre culture, et parler notre langue. »
Oui, il est temps de replacer le cinéma marocain au cœur de notre projet culturel, non comme un divertissement lointain, mais comme un outil de mémoire, d’identité, de transmission et de liberté. Et pour cela, nous avons besoin de Maâlems, comme Abderrahmane Tazi.
Des maîtres qui filment avec le cœur, qui racontent sans céder, qui bâtissent sans bruit, mais avec une fidélité intacte à ce Maroc complexe, tendre, souvent blessé, mais toujours digne.
Je me permets de rappeler ici que Monsieur Tazi fut aussi l’un des premiers au Maroc à avoir utilisé la caméra numérique, ouvrant discrètement mais résolument la voie à une modernisation des moyens de production.
Et suite à cette rencontre, qui m’a profondément touché et m’a replongé dans l’atmosphère des maisons de la médina de Fès, je me suis posé une question simple, presque naïve :
L’intelligence artificielle aurait-elle pu servir encore davantage le cinéma de Tazi ?
Ma réponse est double : Oui, peut-être, du point de vue de l’accessibilité économique, car l’IA permet de réduire les coûts, d’automatiser certains processus, et de rendre plus faciles certaines étapes de la réalisation. Mais non, pour tout le reste.
Car le cinéma de Tazi est humain, profondément humain, fait pour l’humain et par l’humain. Il transmet ce qu’il pense et ce qu’il ressent. Il ne s’optimise pas : il se vit, il se respire, il se partage.
Longue vie à votre œuvre, cher ami. Et longue vie au cinéma marocain que vous avez contribué à façonner, dans la patience, l’élégance et l’amour du vrai.
Par Dr Az-Eddine Bennani












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