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L’art occidental de s’auto-saborder


Rédigé par le Lundi 29 Janvier 2024

L’actualité internationale révèle une profonde déchéance morale des pays occidentaux, empêtrés, qui plus est, dans un wokisme répugnant. Loin de se remettre en cause, l’Occident cultive, au contraire, les germes de sa propre destruction.



A lire ou à écouter en podcast :


Le dernier ouvrage de l’anthropologue français, Emmanuel Todd, « La défaite de l’Occident », a été plutôt mal accueilli par les médias occidentaux.

"The Course of Empire", tableau du peintre américain Thomas Cole, 1836
"The Course of Empire", tableau du peintre américain Thomas Cole, 1836
La levée de bouclier est d’autant plus furieuse que l’auteur avait publié, en 1976, un livre intitulé « La chute finale », dans lequel il avait prédit l’effondrement de l’Urss, une prévision qui a fini par se réaliser et forgé la renommée d’Emmanuel Todd.

La thèse sur laquelle s’appuie le livre tellement critiqué de Todd est le nihilisme qui s’est emparé des pays occidentaux, dans une sorte de dégénérescence historique, qui a d’abord vu l’Occident enterrer sa foi religieuse, ensuite les valeurs véhiculées par cette foi, pour aboutir à un néant spirituel, que l’idéologie wokiste a tôt fait d’envahir, la nature ayant horreur du vide.

L’actualité récente ne fait, pourtant, que conforter l’approche de Todd.

Succession de revers

Débarrassé de toute attache morale, si ce n’est la quête effrénée des intérêts matériels immédiats des élites américaines, les Etats-Unis, chefs de file des pays occidentaux, se sont lancés dans de sanglantes aventures militaires, après les attentats terroristes du 11 septembre 2001, en Irak et en Afghanistan, pays qu’ils ont gravement endommagés, sans parvenir pour autant à les dominer.

Chassés d’Asie centrale par des Talibans en sandales et sommairement armés, prenant conscience que le contrôle du Heartland (concept géopolitique développé par le britannique John Mackinder en 1904) n’est plus à leur portée, les Etats-Unis ont réorientés leurs ambitions hégémoniques vers l’Europe orientale.

Une pseudo-révolution a, ainsi, été fomentée, en 2014, en Ukraine, le fameux « Euromaïdan », permettant de placer à Kiev un gouvernement farouchement hostile à la Russie. L’objectif était de changer de régime à Moscou, en installant un clone de Boris Eltsine au Kremlin, et de pouvoir, de la sorte, se remettre à piller les immenses richesses naturelles de la Russie.

L’écueil russe

Les exactions du régime de Kiev à l’encontre des habitants russes ethniques du Donbass ont, effectivement réussi à provoquer la colère du président russe, Vladimir Poutine, qui a envoyé ses troupes envahir l’Est de l’Ukraine, en février 2022.

La stratégie des Etats-Unis, qui consistait à attirer l’armée russe dans un bourbier et, delà, provoquer un écroulement de l’économie russe et, par effet d’entraînement, du pouvoir en place à Moscou, a lamentablement échoué.

Les capacités de résilience de la Russie, de ses forces armées et de son industrie militaire ayant été gravement sous-estimées, les Etats-Unis se sont retrouvées confrontées à une nouvelle défaite, même si par proxy ukrainien interposé.

Autophagie

Manifestation de colère des agriculteurs en France
Manifestation de colère des agriculteurs en France
L’unique succès de Washington dans cette guerre russo-ukrainienne a été d’abîmer les relations économiques entre les pays de l’Union européenne et la Russie. Privés du gaz russe bon marché, les pays européens, principalement l’Allemagne, ont vu la compétitivité de leurs industries les plus énergivores se détériorer et le niveau de vie de leurs populations reculer.

Les Etats-Unis sont non seulement parvenus à vendre aux pays de l’Ue leur gaz de schiste beaucoup plus cher que le gaz naturel russe, mais aussi attirer sur leur territoire les industries européennes qui cherchaient à délocaliser leurs appareils de production là où le coût de l’énergie est moins élevé que sur le vieux continent.

Bref, le suzerain américain, faute de pouvoir continuer à piller en dehors de sa sphère d’influence, s’est mis à dévorer ses propres affidés.

Voyant leurs pays économiquement ébranlés, les élites dirigeantes de l’Ue se sont également retournées contre leurs propres populations, en leur imposant des politiques d’austérité socialement désastreuses.

Et l’on assiste, depuis lors, à des mouvements sociaux de contestation, sévèrement réprimés, dont les derniers en date sont ceux des agriculteurs allemands, et plus récemment français.

Bêtement engagés à soutenir l’Ukraine, et depuis le 7 octobre 2023, Israël, les pays européens n’ont plus assez d’argent pour financer correctement les services sociaux au bénéfice de leurs populations.

La « solution finale »

La guerre génocidaire menée par Israël contre les Palestiniens de la Bande de Gaza entraîne des conséquences encore plus affreuses pour les pays occidentaux, qui cautionnent les agissements criminels de l’entité sioniste.

L’appui sans faille, politique, militaire et financier, accordé par les Etats-Unis et la plupart des pays de l’Ue à Israël, engagé dans un nettoyage ethnique sans vergogne, suscite le dégoût des pays du Sud.

Dans son ordonnance relative à l’application de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide dans la Bande de Gaza et les mesures conservatoires y afférentes, en date du 26 janvier 2024,  la Cour Internationale de Justice (CIJ), qui a reconnu un risque de génocide dans la Bande de Gaza, a été on ne peut plus clair.

Israël est sommé, « conformément aux obligations lui incombant au titre de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide », de prendre six mesures conservatoires.

Il s’agit, entre autres, pour Tel-Aviv de « prévenir la commission, à l’encontre des Palestiniens de Gaza, de tout acte entrant dans le champ d’application de l’article II de la convention, en particulier les actes suivants : a) meurtre de membres du groupe (NDLR : les Palestiniens) ; b) atteinte grave à l’intégrité physique ou mentale de membres du groupe ; c) soumission intentionnelle du groupe à des conditions d’existence devant entraîner sa destruction physique totale ou partielle ; et d) mesures visant à entraver les naissances au sein du groupe ».

Complicité de génocide

Encouragé par les Etats-Unis, qui ont estimé les accusations de génocide à l’encontre d’Israël « sans fondements », et la France, pour qui l’intention de génocide n’est pas avérée, Tel-Aviv n’a, depuis lors, appliqué aucune des mesures préventives ordonnées par la CIJ.

Pire encore, plusieurs pays de l’Occident global, les Etats-Unis, la Grande Bretagne, la France, l'Allemagne, l'Italie, les Pays-Bas, la Finlande, l'Australie et le Canada ont décidé de suspendre leur aide à l’Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (Unrwa).

La raison invoquée est la participation d’employés de cette agence onusienne, créée en 1949, après le premier nettoyage ethnique commis par Israël, à l’attaque du 7 octobre 2023.

Plusieurs observateurs imputent, plutôt, le gel par ces pays de leur financement de l’Unrwa par les déclarations et témoignages de hauts responsables de cette agence onusienne qui ont servi à argumenter la plainte déposée par l’Afrique du Sud auprès de la CIJ.

Le début de la fin

Le même Emmanuel Todd cité au début de cet article avait, dans un entretien, expliqué le peu d’empressement des pays du Sud à condamner, comme les y incitaient les pays occidentaux, l’invasion russe de l’Ukraine par le profond dégoût que suscite le wokisme.

Après cette révélation crue de la déchéance morale de l’Occident global, il va sans dire qu’à chaque fois qu’un responsable américain ou européen tentera de faire la leçon à des dirigeants de pays du Sud sur les Droits humains, il se fera rire au nez.

Il serait erroné de croire que l’influence l’Occident global sur les affaires du monde va s’écrouler dans quelques mois ou quelques années. Mais il est, de toute évidence, fermement engagée sur cette voie, puisqu’il n’arrive pas à se remettre en cause. La perspective d’un effondrement final, au bout de quelques décennies, est, de ce fait, plus que probable.

Comme l’avait si bien dit le poète égyptien, Ahmed Chawqi : « les nations perdurent aussi longtemps que perdure leur moralité, si leur morale disparaît, elles disparaissent également ».





Ahmed Naji
Journaliste par passion, donner du relief à l'information est mon chemin de croix. En savoir plus sur cet auteur
Lundi 29 Janvier 2024

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