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Le Maroc ausculté par la Banque Mondiale : du Doing-Business au Business -Ready


Par Abdeslam Seddiki

La Banque Mondiale vient de publier son « Rapport de suivi de la situation économique du Maroc » et prioriser les réformes pour améliorer le climat des affaires (hiver 2025). Ce rapport semestriel se distingue notamment par l’analyse du climat des affaires appréhendé par la nouvelle méthode B-Ready qui s’est substituée au fameux Doing-business dont le dernier rapport remonte à 2020.

Le classement « Doing Business » de la Banque mondiale, bien qu’influent pendant des années, a été critiqué sur plusieurs points et a finalement été abandonné en 2021 en raison de faiblesses méthodologiques et d’irrégularités sérieuses.

Au niveau méthodologique, l’indice se base sur la législation formelle, sans mesurer réellement l’application des lois sur le terrain, ce qui peut donner une vision déformée de la réalité économique et juridique des pays.

De même, Il privilégie un modèle anglo-saxon de régulation, négligeant les spécificités culturelles et institutionnelles d’autres régions, ce qui rend les comparaisons biaisées. L’entreprise type étudiée est toujours située dans la capitale ou la plus grande métropole, ce qui n’est pas représentatif des conditions dans les régions périphériques.

Au niveau des irrégularités, des enquêtes internes ont révélé que des données ont été manipulées pour favoriser certains pays, ce qui a remis en cause la crédibilité du classement.

La Banque mondiale a aussi été accusée d’avoir vendu des conseils payants pour améliorer le classement, ce qui a alimenté des conflits d’intérêts.

De nombreux pays, notamment en développement, ont réformé leurs lois uniquement pour améliorer leur position dans le classement, parfois au détriment d’autres priorités sociales ou économiques.

Comment se présente la situation du Maroc d’après le nouvel indice Business READY (B-READY) rentré en vigueur à partir de 2024 ? Avant d’y répondre, voyons, brièvement, en quoi consiste ce nouvel instrument de mesure du climat des affaires.



De nouveaux domaines étudiés.

Il examine le cadre réglementaire, la qualité des services publics et l’efficacité de leur mise en œuvre dans la pratique, organisés autour de thèmes jugés essentiels au développement du secteur privé.

Son objectif principal, d’après ses promoteurs, est de servir d’outil de référence pour les gouvernements et le secteur privé, en les orientant vers des réformes visant à stimuler l’investissement, développer l’esprit d’entreprise, créer des emplois et favoriser une croissance économique durable et inclusive.

Le projet examine dix domaines clés couvrant l’ensemble du cycle de vie d’une entreprise, de la création à l’insolvabilité de l’entreprise, en passant par l’accès aux services d’utilité publique, emploi, services financiers, commerce international, fiscalité, règlement des litiges et concurrence du marché.

Cette approche intégrée inclut également des dimensions transversales importantes telles que la durabilité environnementale, l’égalité des genres, et l’impact de la transformation numérique.

Sur une période de trois ans, B-READY étendra progressivement sa couverture géographique, évaluant 50 économies en 2024 (dont le Maroc), 108 en 2025, et 174 en 2026. En fournissant des données désagrégées et transparentes, le projet aide à identifier les atouts et les faiblesses de chaque pays, offrant ainsi une base solide pour des réformes ciblées.

B-READY étend la portée des études sur le climat des affaires. Il couvre désormais des domaines tels que l’emploi, les marchés publics, l’accès à l’eau et à l’internet pour les entreprises, la concurrence, et intègre des considérations environnementales et sociales, notamment les droits du travail et des femmes, la protection des consommateurs et la durabilité environnementale.

Cette approche plus globale permet de mieux comprendre la dynamique économique et les interactions entre les entreprises de toutes tailles, tout en fournissant des informations sur la dimension bien-être du climat des affaires.

Cette approche tient compte du fait qu’il peut y avoir des écarts importants entre les règles de jure et leur mise en œuvre de facto.

Le B-READY se distingue par la combinaison les données de 21 nouveaux questionnaires (contre 11 dans le modèle précédent) avec des enquêtes préexistantes au niveau des entreprises, telles que l’enquête auprès des entreprises de la Banque Mondiale (Enterprise Survey).

Il traite environ 1200 indicateurs et sous-indicateurs. Et pour éviter les écueils du passé, la transparence, la rigueur et l’évolutivité sont de règle.

Une position favorable ….

La première édition de B-READY place le Maroc dans une position favorable, dépassant à la fois les pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure (son propre groupe) et les pays à revenu intermédiaire supérieur (le groupe aspirationnel) dans deux des trois piliers : le cadre réglementaire et les services publics.

En revanche, le pays obtient de moins bons résultats dans la dimension de l’efficacité opérationnelle, légèrement en dessous de la moyenne des économies à revenu intermédiaire de la tranche supérieure et de la tranche inférieure.

Le Maroc présente des avantages dans divers domaines abordés par B-Ready.

Il est à noter que le Maroc surpasse la moyenne des pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure en termes de création et d’implantation des entreprises, où le Maroc dépasse même les économies à revenu élevé, reflétant les progrès réalisés par l’initiative sur le climat des affaires au cours de la dernière décennie.

Il obtient également de meilleurs résultats que les pays à revenu élevé en matière de services d’utilité publique, garantissant un l’accès à l’électricité, à l’eau et à Internet.

Le Maroc surpasse également la plupart de ses pairs en matière de commerce international, bénéficiant d’un accès favorable aux marchés internationaux et de la numérisation des importations/exportations.

… Mais des faiblesses certaines.

En revanche, en comparaison à des pays pairs aspirants, le Maroc présente également certaines faiblesses qui méritent une attention particulière.

Les domaines clés dans lesquels le Maroc est en deçà par rapport à d’autres pays à revenu intermédiaire et à revenu élevé incluent l’emploi, la résolution des litiges et l’insolvabilité des entreprises.

Il est essentiel de noter que les faiblesses observées au Maroc dans ces domaines se concentrent principalement sur les services publics et l’efficacité opérationnelle, plutôt que sur le cadre réglementaire, qui performe généralement bien.

Bien que les scores globaux du Maroc soient proches de la moyenne des économies à revenu intermédiaire supérieur dans plusieurs domaines, tels que les services financiers ou la concurrence sur le marché, cette performance masque une divergence entre la performance du cadre réglementaire élevée et une performance relativement faible en termes de services publics ou d’efficacité opérationnelle.

Dans l’ensemble, cela suggère que, bien qu’il y existe une marge d’amélioration dans certains cadres réglementaires, le Maroc devrait prioriser le renforcement de sa capacité à mettre en œuvre efficacement des politiques visant à améliorer le climat des affaires.

Des améliorations souhaitables.

Le rapport s’est largement étendu sur la problématique de l’emploi en lien avec le manque de dynamisme du secteur privé.

Les tendances à long terme révèlent un défi structurel en matière de création d’emplois.

Au cours de la dernière décennie, la population active du Maroc a augmenté de près de 1,5 %, tandis que la population totale du pays et la population en âge de travailler ont augmenté respectivement de 8,8 et 11,4 % selon le recensement de 2024.

Dans ce contexte, la plupart des indicateurs du marché du travail sont en baisse depuis plusieurs années, en particulier le taux d’activité qui a diminué de près de 4,6 points de pourcentage au cours de la dernière décennie (2,3 points depuis 2019) et le taux de chômage, qui reste supérieur de plus de 4,1 points par rapport aux niveaux d’avant la pandémie.

 Chemin faisant, le rapport a pointé du doigt le faible taux d’activité et d’emploi des femme. En effet, ce taux a considérablement diminué au cours des deux dernières décennies, passant de 30,4 % en 1999 à seulement 19,1 % en 2024, soit l’un des taux les plus bas au niveau mondial.

Sur la base de ce diagnostic, le rapport a identifié un certain nombre de domaines dans lesquels des améliorations seraient possibles et  souhaitables   : 

La performance du système judiciaire,  les services publics numériques et la transparence de l’information pour la création d’entreprises,  les dysfonctionnements observés  dans le cadre réglementaire, la gouvernance et la transparence de la distribution d’électricité, d’eau et d’internet,  les infrastructures du commerce international, la fiscalité notamment la fiscalité environnementale, la transformation numérique, la durabilité environnementale et l’approche genre.  Attendre et voir !!

Par Abdeslam Seddiki



Mardi 9 Décembre 2025


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