Au Maroc, nous avons deux types de gouvernement, ou deux catégories de ministres dans un gouvernement.
Ils survivent aux élections tout autant qu’ils peuvent partir, limogés, à tout moment ; ils relèvent directement du roi, mais siègent en conseil de gouvernement, répondent aux questions au parlement, essuient les critiques de la presse ou de la société, mais ne parlent pour ainsi dire jamais aux médias quoique, par moments, ils devraient... Et puis il y a les autres ministres, ceux qui relèvent d’une logique électorale, sont issus des élections, appartiennent à la majorité, politisés et rompus aux joutes politiques et aux débats enflammés.
Ou du moins sont-ils supposés être tout cela…Ce type de ministres, les Marocains les connaissent depuis l’arrivée du roi Mohammed VI en 1999 ; mais depuis 2021, rien ne va plus.
Les régaliens régalent toujours autant, dans leur logique, leurs résultats et leur mutisme, et ils font le job.
Et puis arrive le gouvernement actuel, le gouvernement du silence assourdissant, dirigé par Aziz Akhannouch. L’homme a incontestablement de grandes qualités humaines, auxquelles manquent cependant l’empathie et la communication. Et ces travers ont été transmis aux autres ministres.
Aujourd’hui, le Maroc tangue socialement : les gens trouvent la vie trop chère, les ruraux rament et ruminent, les jeunes galèrent et fulminent, l’école publique rend l’âme, les hôpitaux ont fini de rendre la leur, l’industrie est sous licence et sous supervision de l’étranger, en dehors de quelques unités, l’habitat s’effondre, l’émigration devient la règle pour ceux qui peuvent et le rêve pour les autres, le tourisme aligne des chiffres qui se veulent bons mais qui ne tiendraient pas à la première (petite) crise… « Le Maroc à deux vitesses » stresse.
Le roi a tiré la sonnette d’alarme contre ce Maroc inégalitaire et inéquitable, la société critique à longueur de réseaux, les services préviennent, les institutions de gouvernance s’alarment… Mais le gouvernement se tait, dramatiquement, douloureusement, irresponsablement.
Les membres du gouvernement préfèrent le confort de la MAP ou des agapes pompeusement appelées conférences/points de presse soigneusement organisées par leurs communicateurs, tout aussi terrifiés de voir leurs grands hommes ou leurs femmes buter sur une question dont ils ont pourtant la réponse. Les ministres RNI et PAM ne se donnent même pas la peine de répondre aux sollicitations des médias, et les ministres Istiqlal hésitent beaucoup, avant de ne rien dire, à l’exception peut-être de Ryad Mezzour et parfois, de plus en plus rarement d’ailleurs, de Nizar Baraka. Les autres chefs de partis au gouvernement sont médiatiquement portés disparus : Où est Aziz Akhannouch, en dehors d’une prestation réglée au cordeau ?
De quoi ont-ils peur, car ils ont peur ?
La ministre de l’Aménagement du territoire, de l’Habitat, etc, et maire de Marrakech réside-t-elle avec nous au Maroc ? Pourquoi le ministre de la Communication ne communique-t-il plus ? Le ministre de l’Eau a-t-il pris l’eau, a-t-il été emporté par les eaux, pourtant rares ? Le ministre du Budget se sent-il toujours simple humain, n’est-il plus un simple mortel ? Et sa consœur, dite ministre des Finances, est-elle perdue dans (et par) les chiffres au point d’en perdre le verbe ? A quoi s’emploie le ministre des Compétences contrariées et de la Petite entreprise qui rend l’âme ? il faut reconnaître qu’il a fait son job sur la grève, mais il ne prend aucun risque inutile… Le ministre de l’Agriculture, de la Pêche maritime ne s’en remet qu’à Dieu et à Lui seul…
A vous tous et toutes qui vous calfeutrez dans vos bureaux feutrés, parlez, expliquez, communiquez… ou partez !
Par ce type de comportement, vous incitez et encouragez les jeunes à partir, pour ne plus revenir ! Et tout cela devient dangereux ! On penserait même que tous ces ministres s’en remettent à leur collègue de l’Intérieur pour calmer les ardeurs et autres fureurs, mais tel n’est pas son rôle premier et ce serait faire injustice à la police que de lui confier la gestion du résultat des manquements du gouvernement, c’est-à-dire les manifestations qui fleurissent ici et là.
Ici, c’est toute une bourgade qui marche résolument vers la préfecture la plus proche pour revendiquer, exiger, ses droits ; là, c’est un sit-in enragé dans le cloaque d’un hôpital de la bonne ville de notre très satisfait chef du gouvernement ; ailleurs, c’est tout un mouvement de protestations et de marches nationales qui a été annulé au dernier moment, grâce à la clairvoyance et à la conscience des jeunes qui ont lancé l’appel. Et, heureux paradoxe, dans une manifestation, les manifestants communiquent bien mieux avec les forces de l’ordre qu’avec les responsables gouvernementaux.
Le Maroc bout, de bout en bout, pour manque de moyens et face à un déficit, une déficience, une défaillance des responsables ; et tout cela, oui, devient dangereux, car avec le Népal aujourd’hui et le Chili hier, avec la Turquie de loin en loin et même les Etats-Unis et l’Europe de plus en plus, les peuples disent : « assez ! », finissant par « s’indigner », comme le leur conseillait le défunt Stéphane Hessel ; et la théorie des dominos n’est plus géographique ou idéologique, mais démographique et numérique.
PAR AZIZ BOUCETTA/PANORAPOST.MA












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