Le comité Nobel salue des travaux “ayant transformé notre compréhension du système immunitaire et ouvert la voie à de nouveaux traitements contre le cancer et les maladies auto-immunes”. « Le prix Nobel de cette année porte sur la manière dont notre corps contrôle un système immunitaire capable de combattre tous les microbes imaginables sans se retourner contre lui-même », a expliqué Marie Wahren-Herlenius, membre du comité Nobel à l’institut Karolinska.
Les trois lauréats ont mis en lumière le rôle des cellules T régulatrices — ou Tregs —, véritables “gardiennes” du système immunitaire. Ces cellules veillent à ce que la défense immunitaire reste ciblée sur les menaces extérieures, sans provoquer de maladies auto-immunes telles que le diabète de type 1, la polyarthrite rhumatoïde ou le lupus. « Sans ce mécanisme de tolérance, le système immunitaire peut devenir son propre ennemi », a résumé le jury.
Chercheur à l’Université d’Osaka, Shimon Sakaguchi, 74 ans, a ouvert la voie en 1995. À l’époque, la majorité des scientifiques pensaient que la tolérance immunitaire ne dépendait que d’un processus appelé tolérance centrale, où les cellules immunitaires dangereuses sont éliminées dans le thymus.
Sakaguchi a démontré qu’un autre mécanisme existait : il a découvert une nouvelle catégorie de cellules immunitaires capables de protéger l’organisme contre les attaques auto-immunes. Ces cellules, baptisées plus tard lymphocytes T régulateurs, jouent un rôle de “frein” du système immunitaire.
En 2001, les Américains Mary E. Brunkow et Fred Ramsdell ont apporté la pièce manquante du puzzle. En étudiant des souris atteintes de graves troubles auto-immuns, ils ont identifié une mutation dans un gène baptisé Foxp3.
Ce gène s’est révélé être le chef d’orchestre de la tolérance immunitaire : sans lui, les T régulatrices ne se développent pas, laissant le système immunitaire sans frein. Les chercheurs ont aussi montré que les mutations du même gène chez l’humain provoquent une maladie auto-immune sévère, le syndrome IPEX.
Deux ans plus tard, Sakaguchi a établi la connexion entre ses propres découvertes et celles de ses collègues américains : Foxp3 contrôle le développement des fameuses cellules T régulatrices.
Ces travaux ont ouvert un champ entier de recherche, inspirant des traitements innovants pour les cancers, les maladies auto-immunes et les greffes d’organes. Aujourd’hui, les thérapies visant à stimuler ou freiner les cellules T régulatrices sont testées dans des dizaines d’essais cliniques à travers le monde. Mary E. Brunkow travaille à l’Institute for Systems Biology à Seattle, tandis que Fred Ramsdell est chercheur principal chez Sonoma Biotherapeutics, une société de biotechnologie basée à San Francisco.
Le Nobel 2025 récompense ainsi trente ans de recherches patientes et complémentaires. Sakaguchi avait levé le voile sur un mystère biologique, Brunkow et Ramsdell ont trouvé la clé génétique qui en explique le fonctionnement. Ensemble, ils ont redéfini la manière dont l’humanité comprend la frontière entre défense et autodestruction.
Pour rappel, le Nobel de médecine 2024 avait distingué Victor Ambros et Gary Ruvkun pour la découverte des microARN, minuscules molécules régulant l’expression des gènes. Les trois lauréats 2025 se partageront un diplôme, une médaille d’or et 11 millions de couronnes suédoises, soit près d’un million d’euros.












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