Une production scientifique qui progresse… sur le papier
En une décennie, la production indexée du Maroc a presque été multipliée par quatre. Un signe encourageant, reflet d’une communauté académique dynamique et d’un réseau universitaire en expansion. Le nombre de doctorants a également fortement augmenté, preuve d’un intérêt renouvelé pour la recherche avancée.
Pourtant, cette croissance quantitative masque d’autres failles : la production moyenne annuelle par enseignant-chercheur reste faible, la valorisation — c’est-à-dire la transformation en licences, brevets, procédés industriels — demeure marginale, et les succès restent ponctuels : quelques innovations pharmaceutiques, des procédés dans les mines, des percées dans les drones. Trop peu pour structurer une économie de la connaissance.
La grande défaillance : le lien manquant avec l’industrie
La fracture la plus critique, selon le CESE, se situe au niveau du "couplage" entre laboratoires et entreprises. Les collaborations sont rares, les projets communs fragiles, et la fameuse "vallée de la mort" de l’innovation — l’étape intermédiaire entre idée et marché — reste fatale à la majorité des découvertes.
À peine 6,8 % des publications scientifiques mentionnent une entreprise, et seuls 75 projets ont été menés en partenariat en 2023. Un chiffre alarmant pour un pays qui ambitionne de monter en gamme dans ses chaînes de valeur.
Un financement structurellement insuffisant
Avec 0,75 % du PIB consacré à la R&D, le Maroc est loin de la moyenne européenne (2,24 %) et mondiale (2,68 %). L’État porte l’essentiel de l’effort, tandis que le privé contribue à peine à hauteur de 30 %.
Plus préoccupant encore : une grande partie des fonds disponibles n’est pas exécutée, freinée par des procédures administratives rigides, un contrôle financier a priori lourd et un déficit de personnel technique.
Une gouvernance fragmentée
Dans le paysage institutionnel marocain, les initiatives se multiplient mais ne se parlent pas. "Maroc Innovation", stratégies numériques successives, programmes du CNRST, cités d’innovation, fonds sectoriels… et désormais un Pacte ESRI 2030 aux ambitions larges.
Le CESE avertit : sans convergence, ces stratégies risquent de se cannibaliser.
Le Conseil national de la recherche scientifique, censé piloter l’ensemble, a tenu… une seule réunion depuis sa création.
Un capital humain sous tension
Plus d’un tiers des enseignants-chercheurs ont plus de 55 ans. Sans renouvellement massif, la pyramide des âges deviendra un mur.
Par ailleurs, le statut du chercheur non-enseignant n’existe pas, les incitations restent faibles, et les doctorants travaillent souvent dans des conditions précaires.
Des forces régionales émergent
Certains conseils régionaux investissent dans l’innovation, l’agriculture ou la diffusion scientifique, mais l’essentiel reste infrastructurel, sans stratégie de valorisation.
Des success stories insuffisantes pour changer d’échelle
L’industrie pharmaceutique, les technologies minières ou les drones militaires démontrent qu’un Maroc innovant est possible… lorsque la convergence est là.
Mais ces exemples restent trop isolés pour constituer un modèle.
Des obstacles administratifs persistants
Le contrôle budgétaire a priori retarde les achats d’équipements, entrave les projets financés, et fait fuir les talents. Dans certaines universités, le taux d’engagement budgétaire ne dépasse pas 30 %.
Que propose le CESE ? Parmi les recommandations :
viser 3 % du PIB en financement à horizon 2030
accélérer la réforme juridique de la loi 01-00
donner aux universités le droit effectif de créer des filiales
créer un statut spécifique du chercheur à temps plein
renforcer le rôle du Conseil national de la recherche
développer des consortiums public-privé type MAScIR
impliquer davantage les régions dans la valorisation technologique
Une urgence stratégique
Le Maroc risque le piège des pays à revenu intermédiaire : croissance sans productivité, industrialisation sans technologie propre. Pour le CESE, la recherche n’est plus une option : elle conditionne la souveraineté, la compétitivité et l’emploi qualifié.
Pourtant, cette croissance quantitative masque d’autres failles : la production moyenne annuelle par enseignant-chercheur reste faible, la valorisation — c’est-à-dire la transformation en licences, brevets, procédés industriels — demeure marginale, et les succès restent ponctuels : quelques innovations pharmaceutiques, des procédés dans les mines, des percées dans les drones. Trop peu pour structurer une économie de la connaissance.
La grande défaillance : le lien manquant avec l’industrie
La fracture la plus critique, selon le CESE, se situe au niveau du "couplage" entre laboratoires et entreprises. Les collaborations sont rares, les projets communs fragiles, et la fameuse "vallée de la mort" de l’innovation — l’étape intermédiaire entre idée et marché — reste fatale à la majorité des découvertes.
À peine 6,8 % des publications scientifiques mentionnent une entreprise, et seuls 75 projets ont été menés en partenariat en 2023. Un chiffre alarmant pour un pays qui ambitionne de monter en gamme dans ses chaînes de valeur.
Un financement structurellement insuffisant
Avec 0,75 % du PIB consacré à la R&D, le Maroc est loin de la moyenne européenne (2,24 %) et mondiale (2,68 %). L’État porte l’essentiel de l’effort, tandis que le privé contribue à peine à hauteur de 30 %.
Plus préoccupant encore : une grande partie des fonds disponibles n’est pas exécutée, freinée par des procédures administratives rigides, un contrôle financier a priori lourd et un déficit de personnel technique.
Une gouvernance fragmentée
Dans le paysage institutionnel marocain, les initiatives se multiplient mais ne se parlent pas. "Maroc Innovation", stratégies numériques successives, programmes du CNRST, cités d’innovation, fonds sectoriels… et désormais un Pacte ESRI 2030 aux ambitions larges.
Le CESE avertit : sans convergence, ces stratégies risquent de se cannibaliser.
Le Conseil national de la recherche scientifique, censé piloter l’ensemble, a tenu… une seule réunion depuis sa création.
Un capital humain sous tension
Plus d’un tiers des enseignants-chercheurs ont plus de 55 ans. Sans renouvellement massif, la pyramide des âges deviendra un mur.
Par ailleurs, le statut du chercheur non-enseignant n’existe pas, les incitations restent faibles, et les doctorants travaillent souvent dans des conditions précaires.
Des forces régionales émergent
Certains conseils régionaux investissent dans l’innovation, l’agriculture ou la diffusion scientifique, mais l’essentiel reste infrastructurel, sans stratégie de valorisation.
Des success stories insuffisantes pour changer d’échelle
L’industrie pharmaceutique, les technologies minières ou les drones militaires démontrent qu’un Maroc innovant est possible… lorsque la convergence est là.
Mais ces exemples restent trop isolés pour constituer un modèle.
Des obstacles administratifs persistants
Le contrôle budgétaire a priori retarde les achats d’équipements, entrave les projets financés, et fait fuir les talents. Dans certaines universités, le taux d’engagement budgétaire ne dépasse pas 30 %.
Que propose le CESE ? Parmi les recommandations :
viser 3 % du PIB en financement à horizon 2030
accélérer la réforme juridique de la loi 01-00
donner aux universités le droit effectif de créer des filiales
créer un statut spécifique du chercheur à temps plein
renforcer le rôle du Conseil national de la recherche
développer des consortiums public-privé type MAScIR
impliquer davantage les régions dans la valorisation technologique
Une urgence stratégique
Le Maroc risque le piège des pays à revenu intermédiaire : croissance sans productivité, industrialisation sans technologie propre. Pour le CESE, la recherche n’est plus une option : elle conditionne la souveraineté, la compétitivité et l’emploi qualifié.
Le diagnostic est clair : le Maroc dispose des briques, mais pas du ciment.
Les talents existent, les infrastructures progressent, le discours politique est cohérent. Ce qui manque encore, c’est un pilotage unifié, une valorisation industrielle structurée, et une montée en puissance du financement privé.
L’innovation n’est pas qu’un slogan. C’est une chaîne. Et pour l’instant, trop de maillons restent fragiles.
L’innovation n’est pas qu’un slogan. C’est une chaîne. Et pour l’instant, trop de maillons restent fragiles.












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