L'ODJ Média

lodj






Réinventer l'école marocaine : de la transmission à l'accompagnement...


Par Aziz Daouda

Les Marocains, et particulièrement les jeunes, éprouvent aujourd'hui un profond malaise vis-à-vis de leur système scolaire. Ils viennent du manifester avec éclat.

Cette réalité, désormais publique, se retrouve tant dans les discussions familiales que dans les diagnostics institutionnels et les débats sociétaux.

Pour pallier les insuffisances d'un enseignement public jugées à bout de souffle, de plus en plus de familles, averties ou aisées, inscrivent leurs enfants dans des institutions privées, parfois étrangères. La classe moyenne, elle aussi, fait de nombreux sacrifices pour suivre ce mouvement.

Ce phénomène reflète une crise de confiance et creuse la fracture sociale : l'école, promue comme moteur d'égalité, se transforme en marqueur d'inégalités.

Cette dérive était déjà pressentie : dès le 1er novembre 1960, le doyen Charles André Julien alertait M. Bennani, directeur du Protocole royal, sur les risques d'une réforme mal conçue qui susciterait de nouveaux problèmes.



Malgré des investissements considérables, les réformes successives se sont souvent limitées à des aspects accessoires :

Infrastructures, uniformes, approches pédagogiques superficielles, organisation des vacances. Trop souvent, elles sont le fruit d'un mimétisme mal inspiré, confiées à des bureaux d'études peu rigoureux et à des fonctionnaires insuffisamment qualifiés.

Les réformes diverses et variées n'ont pas abouti et engendrent un mécontentement croissant. La déperdition scolaire et les différents classements sont là pour illustrer cette situation angoissante.

Si réforme il doit y avoir, et l'urgence est réelle, elle ne doit pas concerner les bâtiments ni la tenue des élèves, ou encore le rythme des vacances, mais s'intéresser au cœur du cursus, à la philosophie éducative, et à la manière d'envisager les rôles de l'élève et de l'enseignant.

L'avenir appartient à un monde dans lequel les jeunes créent leurs propres métiers ; cette tendance devient universelle.

Nous vivons une période inédite de l'histoire humaine, où la jeunesse façonne ses trajectoires professionnelles et personnelles : les jeunes inventent leurs métiers, construisent leurs propres voies, imaginent de nouveaux modèles sociaux.

Aujourd'hui, un adolescent marocain, diplôme ou non, peut concevoir une application, lancer un commerce, bâtir une communauté, influencer les marchés et créer de la valeur inimaginable pour les cadres traditionnels. Le modèle 1337 en est la parfaite illustration.


Désormais, les jeunes n'ont plus de frontières ni de limites mentales.

Ils expriment une énergie faite d'ambition, d'intuition technologique, d'ouverture culturelle et de rêves. Pendant ce temps, le système scolaire reste enfermé dans un schéma du XXᵉ siècle. Le rôle de l'école doit évoluer : il ne s'agit plus de transmettre, mais d'accompagner.
 

L'école marocaine doit cesser d'être un lieu de récitation de connaissances désormais disponible en ligne. L'information est à portée de main, même pour un enfant de dix ans.

Ce n'est pas cela qu'ils attendent : parfois, ils somnolent en classe et retrouvent la nuit l'espace de liberté où ils imaginent le monde qu'ils veulent vivre et construire eux-mêmes.

Sur le plan technologique et dans l'apprentissage des langues, nombre d'entre eux devancent les décideurs et les enseignants.

Les jeunes maîtrisent l'anglais davantage que ce qui leur est proposé à l'école et disposent d'équipements technologiques que l'école est loin de pouvoir leur offrir. Les parents se saignent pour cela.

Les jeunes préfèrent une connexion à un repas.

Les jeunes n'aiment plus l'école telle qu'elle se présente à eux. Ils attendent avant tout d'y trouver:
 

  • quelqu'un qui les écoute ;
  • quelqu'un qui croit en son potentiel ;
  • quelqu'un qui les incite à rêver plus grand, à oser davantage, à créer ;
  • quelqu'un qui leur accorde sa confiance.
 

L'école doit donc devenir un espace d'accompagnement, d'éveil et de construction de projets de vie ; elle doit former des citoyens capables d'imaginer, d'innover, de collaborer, de prendre des risques et pas seulement de mémoriser.
 

Pour cela, le défi majeur de l'État est la formation de formateurs capables de s'adapter aux nouvelles réalités. Il est indispensable de passer de professeurs transmetteurs à des mentors accompagnateurs.
 

La réforme véritable commence donc avec les enseignants.

Ceux d'hier doivent adopter le rôle de mentor, de guide, de catalyseur de talents : un mentor qui pose des questions au lieu d'imposer des réponses, un accompagnant qui aide l'élève à se découvrir, un éducateur qui ouvre des portes plutôt que de dresser des murs.


Les formateurs supposent une nouvelle philosophie :

Intégrer la psychologie positive, le coaching éducatif, les pédagogies actives, la construction de projets, la culture numérique et la créativité. Enseigner n'est plus un métier de transmission, mais d'accompagnement, avec l'autonomie pour moteur d'avenir.

Aujourd'hui, les jeunes n'ont pas besoin de capital financier pour commencer, mais de confiance, d'idées et de compétences. Une bonne connexion fait leur bonheur. Leur atout majeur est leur esprit.

Leur frein reste souvent un manque d'encouragement, l'angoisse d'un système trop rigide, trop vertical, trop éloigné de leur vécu. Ils sont capables de tout, sauf de croire seuls en eux-mêmes.

C'est là que l'école doit intervenir, en devenant ce cocon où émergent des idées et des projets innovants.

Mais pour réussir, il faut avoir le courage politique de mener la grande réforme attendue par la jeunesse.

Le Maroc à l'occasion historique de réinventer son système éducatif, non par la rénovation matérielle, mais par une transformation intellectuelle et spirituelle.

L'école doit devenir le lieu de construction des rêves, d'accompagnement des ambitions, de préparation à la vie par l'innovation et la création.

Elle doit former des individus capables non seulement de s'adapter à un monde en mutation, mais de le transformer, un monde qui avance plus vite que les générations précédentes n'ont pu l'imaginer.

La vraie réforme est celle de l'étincelle, pas du béton. Elle ne s'incarne pas dans les murs, mais dans les esprits.

Elle se construit non dans le passé, mais dans l'avenir que nos jeunes aspirent à inventer, soutenus par notre confiance, rien de plus.

PAR AZIZ DAOUDA/BLUWR.COM




Vendredi 5 Décembre 2025

Billet | Chroniqueurs invités | Experts invités | Quartier libre | Chroniques Vidéo | Replay vidéo & podcast outdoor | Podcast Agora


Bannière Réseaux Sociaux


Bannière Lodj DJ

Avertissement : Les textes publiés sous l’appellation « Quartier libre » ou « Chroniqueurs invités » ou “Coup de cœur” ou "Communiqué de presse" doivent être conformes à toutes les exigences mentionnées ci-dessous.

1-L’objectif de l’ODJ est de d’offrir un espace d’expression libre aux internautes en général et des confrères invités (avec leurs accords) sur des sujets de leur choix, pourvu que les textes présentés soient conformes à la charte de l’ODJ.

2-Cet espace est modéré  par les membres de la rédaction de lodj.ma, qui conjointement assureront la publication des tribunes et leur conformité à la charte de l’ODJ

3-L’ensemble des écrits publiés dans cette rubrique relève de l’entière responsabilité de leur(s) auteur(s).la rédaction de lodj.ma ne saurait être tenue responsable du contenu de ces tribunes.

4-Nous n’accepterons pas de publier des propos ayant un contenu diffamatoire, menaçant, abusif, obscène, ou tout autre contenu qui pourrait transgresser la loi.

5-Tout propos raciste, sexiste, ou portant atteinte à quelqu’un à cause de sa religion, son origine, son genre ou son orientation sexuelle ne sera pas retenu pour publication et sera refusé.

Toute forme de plagiat est également à proscrire.

 







LODJ24 TV
آخر الأخبار
جاري تحميل الأخبار...
BREAKING NEWS
📰 Chargement des actualités...

Inscription à la newsletter

Plus d'informations sur cette page : https://www.lodj.ma/CGU_a46.html

















Vos contributions
LODJ Vidéo