Notre rapport collectif au savoir a été façonné par une histoire qui associe spontanément la légitimité à ce qui vient de l’extérieur, même lorsqu’une expertise marocaine locale ou venant de l’étranger est objectivement plus solide et mieux adaptée.
On voit aussi des webinaires organisés avec des intervenants étrangers uniquement pour attirer du public, alors qu’ils sont parfois nettement moins compétents que les experts marocains.
Les comités scientifiques affichent parfois des noms étrangers non habilités, non publiants ou extérieurs au domaine, simplement parce que leur présence “rassure” et “fait sérieux”.
Le système éducatif a longtemps privilégié la répétition plutôt que l’analyse, la critique ou la création.
Cela a laissé une empreinte profonde dans le numérique et l’IA : des ingénieurs marocains brillants mais trop souvent placés derrière des profils étrangers ; une tendance à importer des méthodes au lieu de produire nos propres cadres ; des intervenants étrangers, parfois très peu qualifiés, invités pour donner du poids symbolique à des formations que des experts marocains locaux ou de la diaspora pourraient assurer avec une qualité bien supérieure.
La confiance ne naît jamais de l’imitation, mais de la création.
Un mécanisme tenace persiste : une expertise marocaine, locale ou issue de l’étranger, n’est pleinement acceptée qu’une fois confirmée par une validation extérieure même lorsque cette validation provient d’acteurs moins qualifiés.
Le pays regorge pourtant de chercheurs, ingénieurs, développeurs, innovateurs frugaux, spécialistes aguerris, talents de la diaspora et experts marocains de stature internationale.
Cette expertise marocaine locale ou venant de l’étranger existe, elle est puissante, mais elle reste trop souvent invisibilisée dans nos rendez-vous, nos programmes et nos décisions. Quand la compétence est invisible, la confiance disparaît. Et quand la confiance disparaît, le complexe d’infériorité prospère.
Sortir de ce complexe nécessite d’abord de retrouver une souveraineté cognitive dans le numérique et l’IA : penser nos modèles, maîtriser nos données, construire nos architectures, contextualiser nos usages, remplacer la logique du prestige par celle de la compétence réelle, et faire pleinement confiance à l’expertise marocaine qu’elle soit locale ou issue de la diaspora.
Cela implique aussi d’enseigner la création plutôt que l’exécution : encourager l’expérimentation, la créativité, l’essai-erreur, l’innovation frugale et la pensée critique.
La confiance se construit dans la production, pas dans la reproduction.
Il est urgent de bâtir un récit national des réussites numériques marocaines :
Ce récit n’est pas un luxe : c’est une nécessité stratégique.
Enfin, restaurer la méritocratie réelle implique de tourner le dos à la pseudo-expertise importée, aux validations superficielles, aux intervenants étrangers non qualifiés, et de remettre au centre la compétence marocaine, la rigueur scientifique, l’intégrité et la souveraineté par le savoir.
Ce que j’ai observé au fil des années est clair : la sous-valorisation de l’expertise marocaine locale ou provenant de l’étranger n’a jamais été liée à un manque de talent. Le talent est là, réel, massif, structurant.
Le problème réside dans un regard qui continue d’accorder trop de crédit à l’étranger, même lorsqu’il est moins qualifié.
Sortir du complexe d’infériorité dans le numérique et l’IA n’est pas un acte individuel. C’est une transformation cognitive, éducative, culturelle, technologique et systémique.
Le jour où nous accepterons pleinement la valeur de l’expertise marocaine où qu’elle soit nous n’aurons plus à importer des illusions à 2 000 dollars de l’heure pour enseigner ce que nos propres talents maîtrisent mieux que quiconque.
Par Dr Az-Eddine Bennani












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