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Tourisme, médias, écrivain : le triangle d’équilibre

CONGRÈS FIJET : «Tourisme et Médias : quelle relation, quel avenir ?


Rédigé par le Dimanche 26 Octobre 2025

Du 19 au 24 novembre 2025 à Fès, le Congrès de la Fédération internationale des journalistes et écrivains du tourisme (FIJET) s’annonce comme un laboratoire d’idées où l’on ne se contentera pas d’échanger des cartes de visite. Les participants y mettront sur la table le triptyque Tourisme–Médias–Écrivain et ses zones de frottement : narration versus promotion, vérité du terrain face aux images léchées, équilibre fragile entre attractivité économique, préservation des patrimoines et honnêteté éditoriale. Au programme implicite : thématiques de durabilité, d’accessibilité, de formation et de transparence ; problématiques de surtouristification, de publireportage déguisé, d’usage responsable de l’IA et de respect des communautés locales. À Fès, ville-palimpseste, ce congrès veut dépasser la carte postale pour interroger la fabrique du récit touristique : qui parle, pour qui, et avec quelles preuves ? Un rendez-vous attendu, critique sans cynisme, pour remettre du sens — et des méthodes — au cœur du voyage.



On ne voyage plus comme avant : on “scroll”, on compare, on réserve – et parfois seulement ensuite, on part. Au cœur de cette économie de l’attention, un triptyque structure la manière dont une destination existe dans l’imaginaire collectif : le tourisme (offre, écosystèmes, territoires), les médias (cadreurs et critiques), l’écrivain (donneur de sens). Quand ces trois forces s’alignent, elles produisent de la valeur, de la vérité et du désir. Quand elles se désalignent, elles fabriquent des cartes postales mensongères, de la surfréquentation… et de la défiance.

​Le tourisme a besoin d’histoires — pas de slogans

Le tourisme n’est pas qu’un secteur économique : c’est une promesse de récit. Un littoral n’est pas seulement des kilomètres de plage, c’est une mémoire de pêcheurs, une cuisine, des gestes, un climat social. Une médina n’est pas qu’un décor : c’est un tissu vivant, avec ses métiers, ses fragilités et ses renaissances.

L’offre touristique performe quand elle sait raconter ce que les chiffres n’attrapent pas : la nuance des saisons, la manière dont une communauté accueille, ce qui se mérite et ce qui se protège. C’est là que médias et écrivains entrent en scène.

​Les médias : la chambre d’écho… et le contre-champ

Un média sérieux n’est ni une brochure, ni un tribunal. Son rôle est double :

Service : donner des informations fiables (accès, coûts, capacités, contraintes), vérifier, contextualiser.
Critique : questionner la durabilité, les impacts, la gouvernance, l’accessibilité réelle pour les habitants et pour les voyageurs moins favorisés.

Dans l’écosystème actuel (plateformes, influence, IA), le média crédible pose des garde-fous : traçabilité des sources, signalement des voyages de presse et partenariats éventuels, distinction nette entre éditorial et publirédactionnel. Sans cette hygiène, le récit touristique se délite en marketing de façade.

​L’écrivain : donner du sens et de la durée

Le journaliste travaille l’actualité ; l’écrivain travaille la couche profonde. Il soigne le temps long, les voix minorées, les lieux “hors-cadre”. Qu’il soit romancier, essayiste ou auteur de récits de voyage, il décante : il prend le temps d’écouter des artisans, d’arpenter un col en hiver, de relire des archives. Il répare aussi ce que la vitesse médiatique écrase : la complexité.

Dans le triptyque, l’écrivain empêche la destination de devenir un simple “produit”. Il rappelle que visiter, c’est habiter brièvement, avec des obligations morales : regard juste, respect, partage.

​Comment la mécanique tourne — et comment elle déraille

Le cycle vertueux du triptyque ressemble à une petite fabrique à cinq étages :

Repérage (territoires, acteurs, enjeux).
Vérification (données, accès, risques, saisonnalité).
Écriture (angles, témoignages, mise en intrigue).
Édition & image (iconographie authentique, droits, légendes précises).
Diffusion & retours (audiences, critiques, écoute des habitants).

Les déraillements typiques :

Publireportage déguisé qui transforme la presse en prolongement d’un service marketing.
Greenwashing (ou “culture-washing”) qui repeint en vert ou en patrimonial des projets non soutenables.
Sursignalement viralo-photogénique menant à la surtouristification de lieux fragiles.
IA générative sans transparence : images trompeuses, descriptions standardisées, appauvrissement du style.

​Le contrat moral avec le lecteur et les habitants

Le triptyque n’est légitime que s’il respecte deux contrats :

Avec le lecteur : honnêteté, exactitude, sens du service.
Avec les habitants : ne pas “extraire” du charme pour vendre de l’illusion ; contribuer à la connaissance, pas à la spoliation.

Concrètement, cela se traduit par une charte simple :

Indiquer les conditions de reportage (invitation, accès spécial, partenariats).
Privilégier les sources locales (guides, associations, opérateurs de petite taille) et les citer.
Documenter l’empreinte écologique et sociale : eau, déchets, foncier, emplois, saisonnalité.
Éviter les “spots secrets” quand leur exposition mettrait en danger l’équilibre local.
Légender les images correctement ; bannir les photos hors contexte.
Déclarer l’usage d’IA quand elle intervient (retouches, synthèses) et en limiter l’emprise stylistique.

​L’apport spécifique de l’écrivain dans l’ère des flux

Dans un monde saturé de contenus, l’écrivain redonne densité : des descriptions qui sentent la pierre humide, des dialogues, des silences. Il compose une mémoire habitable pour le lecteur. Cette densité n’est pas un luxe : c’est une garantie de crédibilité pour les médias et une valeur d’usage pour le tourisme (on choisit mieux, on respecte mieux, on revient mieux).

Réussir l’alliance : qui fait quoi ?

Institutions et opérateurs du tourisme : partager données ouvertes (fréquentation, capacité, contraintes), jouer la transparence sur les chantiers, soutenir la formation des guides et la mise en réseau des petites initiatives.
Médias : enquêter, comparer, cartographier, produire des formats utiles (guides tarifaires, cartes d’accès, FAQ de saison), assumer la critique quand elle s’impose.
Écrivains : prendre le contrepied, “décentrer” le regard, inviter à explorer hors saison, valoriser l’ordinaire (les matins de marché, les ateliers, les gestes).
Lecteurs/voyageurs : devenir co-auteurs responsables (retours argumentés, respect des lieux, choix éclairés).

​Focus “bonnes pratiques” (boîte à outils éditoriale)

Angle : “Que gagne le lecteur à lire ceci avant de partir ?”
Vérif : appeler au moins trois voix locales hors institution.
Impact : une phrase sur l’eau, une sur les déchets, une sur l’accès public.
Accessibilité : prix réels (haute/basse saison), options low-cost, transports alternatifs.
Éthique images : pas de mise en scène trompeuse ; consentement pour les portraits.
Clarté : distinguer “guide pratique”, “récit”, “enquête”.
Transparence : mention des invitations et affiliations.
Sobriété IA : usage déclaré, jamais pour fabriquer de faux souvenirs.

​Et le Maroc dans tout ça ? (un cas d’école possible)

Patrimoines matériels et immatériels, reliefs contrastés, renaissance hôtelière, appétit de mobilité interne : le terrain est idéal pour un journalisme de tourisme exigeant et une littérature de voyage contemporaine. Trois priorités :
1-Mailler le territoire éditorialement (rural/urbain, littoral/haut-pays), afin d’éviter la concentration sur quelques icônes saturées.
2-Donner la parole aux acteurs invisibles (coopératives artisanales, micro-hébergements, mobilités locales).
3-Faire école : chartes de transparence, laboratoires d’écriture, résidences d’auteurs dans les régions — pour que le récit du pays ne soit ni folklorisé ni confisqué.

​Pour une écologie du récit

Le triptyque tourisme–médias–écrivain n’est pas une simple addition d’intérêts. C’est un équilibre dynamique entre attractivité, vérité et sens. Le tourisme y gagne en qualité et en durabilité ; les médias en crédibilité ; l’écrivain en lecteurs qui cherchent plus que des “listicles”.

À l’arrivée, le lecteur-voyageur devient plus conscient, la destination plus respectée, et le pays plus lisible.

Tenir ce cap suppose des règles simples, de la curiosité et un peu de courage : refuser l’ornement creux, assumer les angles, raconter sans trahir. Le reste — l’émotion, l’envie de partir, la fidélité — suivra.

​Et l’IA, cet invité de dernière minute qui restera très longtemps.

Ni baguette magique ni menace existentielle, l’IA est un copilote durable du triptyque. Bien employée, elle accélère la veille, cartographie les flux, transcrit et sous-titre, suggère des angles, classe les images et repère les incohérences factuelles ; l’écrivain y gagne un atelier augmenté (archives, corpus, lexiques), le média un tri pertinent, le tourisme des outils d’écoute et de gestion des pics.

Mais sa condition de séjour est non négociable : transparence d’usage, traçabilité des sources, respect des droits, consentement pour les portraits, signalement des contenus générés, vérification humaine et audit des biais.

On n’externalise ni l’éthique ni l’empathie à un modèle : sans garde-fous, l’IA fabrique clichés, illusions… et soupçon. Gardons-la à table — utile, déclarée, contrôlée — mais jamais à la place de l’hôte.

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Dimanche 26 Octobre 2025

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