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ANGSPE : Le Maroc adopte (enfin) une vraie politique actionnariale


le Lundi 14 Juillet 2025



Quand l’État marocain décide de jouer pleinement son rôle d’actionnaire stratégique

Dans un Maroc en quête de modernisation de ses outils économiques, la création de l’Agence nationale de gestion stratégique des participations de l’État (ANGSPE) marque un tournant historique. Ce n’est pas une énième réforme de façade, mais un véritable changement de paradigme : l’État marocain ne sera plus seulement régulateur ou bailleur de fonds. Il se positionne désormais comme un actionnaire stratège, assumant pleinement son rôle dans la gouvernance, la performance et l’orientation des entreprises publiques.

Depuis son premier Conseil d’administration tenu le 12 décembre 2022, l’ANGSPE ne cesse d’affirmer son rôle. Avec le lancement officiel de la Politique Actionnariale de l’État (PAE), adossée à sept orientations stratégiques adoptées en Conseil des Ministres le 1er juin 2024, une page est tournée. Celle d’une époque où les établissements publics vivaient dans une forme de pilotage éclaté, parfois opaque, souvent inefficace.

Un constat d’échec assumé

Ce changement n’est pas le fruit du hasard. Il s’inscrit dans le prolongement d’un diagnostic sévère établi par les instances de contrôle du Royaume, notamment la Cour des comptes, le Parlement et les inspections sectorielles. Celles-ci ont révélé les dysfonctionnements systémiques des Établissements et Entreprises Publics (EEP) : chevauchement des missions, absence de synergie, gouvernance approximative, dépendance excessive au budget général, et, dans bien des cas, une faible culture de la performance.

Le discours royal du 29 juillet 2020 et celui du 9 octobre de la même année ont tracé la ligne directrice. Le Maroc devait repenser en profondeur le rôle de son secteur public, non plus comme simple exécutant de politiques sociales, mais comme levier structurant de développement. Ce cap, le Nouveau Modèle de Développement l’a ensuite intégré dans ses recommandations.

C’est dans ce contexte que l’ANGSPE est née, via la loi n° 82-20, avec une mission claire : incarner la fonction d’État actionnaire, gérer stratégiquement un portefeuille d’une cinquantaine d’entités représentant plus des deux tiers du chiffre d’affaires du secteur public, et faire émerger une gouvernance digne des standards internationaux.

​Une nouvelle architecture de pilotage

L’originalité du dispositif réside dans la clarté de la séparation des rôles. L’État ne confond plus tutelle technique, régulation et actionnariat. L’ANGSPE agit désormais comme une entité dédiée, dotée d’une feuille de route, de moyens propres et d’une doctrine d’intervention, à savoir la (PAE), qui explicite ses attentes, ses priorités sectorielles ainsi que ses critères de gestion et de rotation du portefeuille.

Cette Politique Actionnariale ne se limite pas à des intentions générales. Elle décline en détail les logiques d’investissement ou de désengagement de l’État selon trois types de secteurs : ceux où la souveraineté est en jeu (énergie, eau, santé, alimentation…), ceux qui sont matures et ouverts à la concurrence, et ceux à potentiel de partenariat mixte avec le privé.

La logique est claire : dans les secteurs stratégiques, l’État renforce sa présence ou modernise ses outils. Dans les secteurs matures, il se désengage pour faire place au privé. Et dans les zones mixtes, il favorise les partenariats public-privé, en s’assurant que la valeur ajoutée sociale et territoriale est au rendez-vous.

​Une gouvernance modernisée, une transparence renforcée

La révolution est aussi dans les modalités de gouvernance. L’ANGSPE a engagé un processus de professionnalisation des conseils d’administration : réduction du nombre de membres, nomination d’administrateurs indépendants, obligation de parité, comités spécialisés, digitalisation du fonctionnement.

Le pilotage ne se fait plus sur la base d’indicateurs opaques ou obsolètes, mais via une consolidation des comptes en normes IFRS, et un dispositif de suivi de la performance économique, sociale, environnementale et territoriale des entités publiques.

Les entreprises publiques, souvent accusées de lourdeurs, sont désormais tenues d’intégrer des logiques de résultats, de transparence, de qualité de service et de reddition de comptes. Le tout dans un esprit de complémentarité avec le secteur privé.

​Une vision d’État stratège et investisseur

Le cœur de la transformation réside dans la vision : celle d’un État qui ne se contente plus de corriger les défaillances du marché, mais qui oriente, investit, et assume ses choix stratégiques. L’État marocain, par l’ANGSPE, veut jouer un rôle dans la réindustrialisation, la transition énergétique, la régionalisation avancée, ou encore l’intégration continentale via l’expansion africaine de ses “champions publics”.

La Politique Actionnariale devient ainsi un levier majeur pour piloter des chantiers comme la digitalisation, la durabilité, la modernisation des infrastructures, ou encore l’inclusion territoriale. À travers des outils comme la contractualisation pluriannuelle, les EEP deviennent des partenaires engagés, et non plus des sous-traitants passifs des politiques publiques.

​Les défis à venir : exécution, exécution, exécution

Mais tout n’est pas gagné. L’ANGSPE devra encore faire ses preuves sur plusieurs fronts. D’abord, sa capacité à résister aux pressions politiques dans la nomination des dirigeants et administrateurs. Ensuite, sa faculté à imposer une véritable culture de performance dans des entités historiquement peu habituées à rendre des comptes.

Le chantier de transformation des établissements publics en sociétés anonymes, prévu dans plusieurs cas, devra être mené avec rigueur et sans compromissions. L’enjeu n’est pas seulement organisationnel, il est culturel : faire émerger une nouvelle élite de management public, capable d’assumer la double logique de service public et d’efficacité économique.

Enfin, le succès de la réforme dépendra de la cohérence entre les différents textes législatifs et la réalité des moyens humains et budgétaires alloués à l’ANGSPE. Sans ces leviers, la réforme pourrait rester en surface.

U​n moment décisif pour l’État marocain

Avec l’ANGSPE et la Politique Actionnariale de l’État, le Maroc entre dans une ère nouvelle. Celle d’un État qui sait ce qu’il possède, ce qu’il veut en faire, et comment y parvenir. C’est une rupture méthodologique, mais aussi une affirmation de souveraineté économique.

Reste à traduire cette vision en résultats tangibles : des entreprises publiques performantes, des services de qualité, des investissements pertinents, et un État redevenu stratège.





Lundi 14 Juillet 2025

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