Une trajectoire d’endettement masquée par la croissance nominale
Si l’on s’en tient aux chiffres officiels, le Maroc semble maîtriser sa dette : 67,7 % du PIB pour la dette du Trésor en 2024, contre 68,8 % en 2023. La dette publique globale reste, quant à elle, sous la barre symbolique des 86 % du PIB. À première vue, la trajectoire est rassurante. Mais cette stabilité n’est-elle pas, en réalité, un effet d’optique ?
Car derrière cette façade arithmétique, les dynamiques en jeu racontent une autre histoire. Depuis quatre ans, la croissance nominale du PIB, dopée par l’inflation, la reprise agricole ou la relance sectorielle, a dépassé la croissance de la dette. Ce différentiel favorable a permis de faire baisser mécaniquement les ratios d’endettement, sans réduction structurelle du déficit ni réforme fiscale disruptive. Une embellie passagère, certes utile, mais profondément fragile.
Car derrière cette façade arithmétique, les dynamiques en jeu racontent une autre histoire. Depuis quatre ans, la croissance nominale du PIB, dopée par l’inflation, la reprise agricole ou la relance sectorielle, a dépassé la croissance de la dette. Ce différentiel favorable a permis de faire baisser mécaniquement les ratios d’endettement, sans réduction structurelle du déficit ni réforme fiscale disruptive. Une embellie passagère, certes utile, mais profondément fragile.
Derrière les chiffres : des choix budgétaires de plus en plus coûteux
Le Maroc a fait des choix ambitieux, voire audacieux : généralisation de la protection sociale, aides directes aux familles, revalorisation des salaires des fonctionnaires, investissements massifs dans les infrastructures sportives (CAN 2025, Coupe du Monde 2030)… Tout cela a un prix. Un prix que le Trésor public tente d’amortir par des dispositifs que l’on qualifie pudiquement de “financements innovants”.
Ces mécanismes, souvent structurés avec des organismes publics comme la Caisse de Dépôt et de Gestion (CDG), la Caisse Nationale de Sécurité Sociale (CNSS) ou la Caisse Marocaine des Retraites (CMR), permettent à l’État de mobiliser des ressources sans alourdir, en apparence, sa dette directe. En 2024, ces recettes dites “autres” ont atteint 35,4 milliards de dirhams, pour un stock cumulé dépassant 107 milliards. Mais dans les faits, il s’agit bel et bien d’une dette, à la différence près qu’elle n’apparaît pas dans les colonnes classiques du budget.
Ces mécanismes, souvent structurés avec des organismes publics comme la Caisse de Dépôt et de Gestion (CDG), la Caisse Nationale de Sécurité Sociale (CNSS) ou la Caisse Marocaine des Retraites (CMR), permettent à l’État de mobiliser des ressources sans alourdir, en apparence, sa dette directe. En 2024, ces recettes dites “autres” ont atteint 35,4 milliards de dirhams, pour un stock cumulé dépassant 107 milliards. Mais dans les faits, il s’agit bel et bien d’une dette, à la différence près qu’elle n’apparaît pas dans les colonnes classiques du budget.
Une dette invisible… mais bien réelle
Ces financements sont exclus des ratios de référence. Ils s’apparentent à une dette hors bilan. Une dette que l’on contracte sans la nommer. Une dette que l’on cache sans l’annuler. Une dette qui, tôt ou tard, devra être honorée.
Ce jeu comptable s’apparente à du “window dressing” budgétaire. Exemple : pour afficher un déficit réduit, on vend des actifs publics (participations, foncier, etc.), en les comptabilisant comme des recettes fiscales. Cette logique n’est pas pérenne. Car que se passera-t-il lorsque le stock d’actifs cessibles s’amenuisera ? Comment l’État honorera-t-il ses engagements différés, notamment ceux concernant les CHU ou les infrastructures olympiques ? Renoncera-t-il à ces actifs ? Ou les reprendra-t-il à crédit ?
Ce jeu comptable s’apparente à du “window dressing” budgétaire. Exemple : pour afficher un déficit réduit, on vend des actifs publics (participations, foncier, etc.), en les comptabilisant comme des recettes fiscales. Cette logique n’est pas pérenne. Car que se passera-t-il lorsque le stock d’actifs cessibles s’amenuisera ? Comment l’État honorera-t-il ses engagements différés, notamment ceux concernant les CHU ou les infrastructures olympiques ? Renoncera-t-il à ces actifs ? Ou les reprendra-t-il à crédit ?
La dette publique : soutenable… jusqu’à quand ?
La soutenabilité ne se résume pas à un ratio. Elle dépend de la capacité d’un État à générer, dans la durée, des excédents budgétaires primaires suffisants pour rembourser sa dette sans recourir à l’endettement nouveau.
Or, pour l’heure, la croissance marocaine repose encore largement sur la commande publique. Les projets d’infrastructure mobilisent massivement les finances de l’État, mais leur rendement économique est souvent critiqué pour son manque d’efficience. Le Haut-Commissariat au Plan comme l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) l’ont déjà souligné : le multiplicateur budgétaire marocain reste trop faible.
De fait, la transition vers une croissance tirée par l’investissement privé tarde à se concrétiser. L’investissement privé reste structurellement inférieur à celui du secteur public, alors qu’il devrait, en principe, le dépasser. Tant que cette bascule ne s’opère pas, le modèle économique reste vulnérable à tout choc exogène.
Or, pour l’heure, la croissance marocaine repose encore largement sur la commande publique. Les projets d’infrastructure mobilisent massivement les finances de l’État, mais leur rendement économique est souvent critiqué pour son manque d’efficience. Le Haut-Commissariat au Plan comme l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) l’ont déjà souligné : le multiplicateur budgétaire marocain reste trop faible.
De fait, la transition vers une croissance tirée par l’investissement privé tarde à se concrétiser. L’investissement privé reste structurellement inférieur à celui du secteur public, alors qu’il devrait, en principe, le dépasser. Tant que cette bascule ne s’opère pas, le modèle économique reste vulnérable à tout choc exogène.
La Coupe du Monde 2030 : catalyseur ou accélérateur de vulnérabilité ?
Le spectre de la “dette 2030” commence à émerger. Et pour cause : l’organisation de la Coupe du Monde, même en partage avec l’Espagne et le Portugal, implique des engagements colossaux en matière de logistique, d’infrastructures, de transports, de sécurité et d’hospitalité.
Certes, les retombées économiques à long terme sont souvent mises en avant. Mais l’histoire récente de grands événements mondiaux montre que ces bénéfices sont souvent surestimés, alors que les coûts réels, eux, explosent. Et si le Maroc n’anticipe pas avec rigueur les modalités de financement de cette aventure sportive, il risque d’y laisser bien plus que des stades.
Certes, les retombées économiques à long terme sont souvent mises en avant. Mais l’histoire récente de grands événements mondiaux montre que ces bénéfices sont souvent surestimés, alors que les coûts réels, eux, explosent. Et si le Maroc n’anticipe pas avec rigueur les modalités de financement de cette aventure sportive, il risque d’y laisser bien plus que des stades.
Que faire ? Les vraies pistes de désendettement
Il ne s’agit pas d’alarmer inutilement. Mais d’inviter à la lucidité. Il faut impérativement clarifier le statut des financements innovants, les intégrer dans les prévisions de dette, et renforcer la transparence budgétaire. Il est aussi urgent de revoir la gouvernance des investissements publics, en mettant l’accent sur leur impact réel.
Enfin, un rééquilibrage en faveur de l’investissement privé est plus que jamais nécessaire. Cela suppose un environnement réglementaire plus prévisible, une fiscalité incitative, et une lutte efficace contre la rente et la bureaucratie.
Sans cela, le Maroc pourrait bien avancer à pas feutrés vers une “dette 2030” sourde mais pesante. Une dette qui, une fois installée, pèsera sur des générations, bien après le dernier coup de sifflet final de la Coupe du Monde.
Enfin, un rééquilibrage en faveur de l’investissement privé est plus que jamais nécessaire. Cela suppose un environnement réglementaire plus prévisible, une fiscalité incitative, et une lutte efficace contre la rente et la bureaucratie.
Sans cela, le Maroc pourrait bien avancer à pas feutrés vers une “dette 2030” sourde mais pesante. Une dette qui, une fois installée, pèsera sur des générations, bien après le dernier coup de sifflet final de la Coupe du Monde.












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