Décryptage d’un débat fondamental pour l’avenir technologique du Maroc.
Question : Le Sommet de Paris sur l’IA a mis en avant l’urgence d’une régulation pour garantir une IA inclusive, éthique et durable. Le Maroc a d’ailleurs signé la Déclaration de Paris dans ce sens. Pensez-vous que cette approche est la bonne pour notre pays ?
Adnane Benchakroun : Je pense que cette volonté de régulation immédiate reflète davantage les préoccupations des pays en avance sur l’innovation ou en retard sur son adoption. Les États-Unis innovent, la Chine reproduit et optimise intelligemment, tandis que l’Europe, qui peine à suivre, cherche à encadrer avant même d’avoir produit quoi que ce soit de compétitif. Pour un pays comme le Maroc, qui est encore en phase d’adoption et de structuration de son écosystème numérique, une régulation précipitée pourrait brider son potentiel d’innovation avant même qu’il n’ait eu le temps d’émerger.
Question : Pourtant, l’objectif de cette Déclaration est aussi de réduire la fracture numérique et d’assurer que l’innovation profite à tous, sans créer de nouvelles inégalités. Ne pensez-vous pas qu’un encadrement clair de l’IA permettrait d’éviter une concentration du marché entre quelques acteurs dominants ?
Adnane Benchakroun : En théorie, oui, mais en pratique, la régulation profite surtout aux acteurs déjà bien établis qui ont les moyens de se conformer aux normes imposées. Les grandes entreprises américaines et chinoises ont déjà une avance considérable. Réguler l’IA aujourd’hui, c’est figer les positions dominantes et empêcher les nouveaux entrants d’émerger. Plutôt que de chercher à réguler à tout prix, le Maroc devrait d’abord se concentrer sur le développement de ses propres capacités en IA, en encourageant la recherche locale, la formation et l’industrialisation de solutions adaptées à nos besoins économiques et sociaux.
Question : La Déclaration de Paris met aussi l’accent sur la nécessité d’une coopération internationale pour encadrer l’IA et éviter des dérives en matière de droits fondamentaux et de sécurité. Ce type d’engagement mondial ne vous semble-t-il pas bénéfique pour un pays comme le nôtre ?
Adnane Benchakroun : La coopération internationale est une bonne chose en soi, mais il faut veiller à ne pas tomber dans une dépendance aux standards imposés par d’autres. La régulation mondiale actuelle est largement poussée par l’Europe, qui cherche à se donner un rôle dans l’IA faute d’avoir su innover à temps. Le Maroc ne devrait pas s’aligner aveuglément sur ces normes, mais plutôt observer et adapter sa stratégie en fonction de son propre rythme de développement. Aujourd’hui, nous sommes encore loin de l’Intelligence Artificielle Générale qui pourrait justifier un encadrement strict. Tant que nous en sommes aux IA génératives et aux modèles spécialisés, nous avons encore le temps d’explorer et de définir nos propres règles sans brider notre croissance.
Question : Mais sans cadre éthique, ne risque-t-on pas de voir apparaître des usages problématiques de l’IA, notamment en matière de désinformation, de surveillance ou de discrimination algorithmique ?
Adnane Benchakroun : Ces problèmes existent, mais la solution n’est pas nécessairement une régulation stricte dès maintenant. Il faut distinguer la régulation qui protège les citoyens de celle qui freine l’innovation. L’encadrement peut se faire progressivement, au fil des avancées technologiques et des défis concrets rencontrés. L’histoire de la technologie nous montre qu’imposer des règles trop tôt peut tuer un secteur avant même qu’il ait prouvé son utilité. Plutôt que de copier les préoccupations européennes, nous devrions nous inspirer de la Chine, qui a su tirer parti de la technologie occidentale tout en construisant ses propres champions industriels.
Question : Finalement, que préconisez-vous pour le Maroc ?
Adnane Benchakroun : Le Maroc doit adopter une approche pragmatique : observer, expérimenter, investir dans ses propres talents et ne pas se précipiter dans une régulation qui pourrait le désavantager sur le long terme. Il faut favoriser un cadre flexible qui encourage l’innovation et la compétitivité avant de parler d’encadrement strict. Tant que l’Intelligence Artificielle Générale n’est pas une réalité, nous avons encore le temps de voir venir.
Cet entretien illustre bien le débat actuel entre la nécessité d’une régulation précoce de l’IA et l’opportunité, pour un pays en rattrapage économique comme le Maroc, d’adopter une approche plus progressive pour maximiser ses chances de développement technologique.
Adnane Benchakroun : Je pense que cette volonté de régulation immédiate reflète davantage les préoccupations des pays en avance sur l’innovation ou en retard sur son adoption. Les États-Unis innovent, la Chine reproduit et optimise intelligemment, tandis que l’Europe, qui peine à suivre, cherche à encadrer avant même d’avoir produit quoi que ce soit de compétitif. Pour un pays comme le Maroc, qui est encore en phase d’adoption et de structuration de son écosystème numérique, une régulation précipitée pourrait brider son potentiel d’innovation avant même qu’il n’ait eu le temps d’émerger.
Question : Pourtant, l’objectif de cette Déclaration est aussi de réduire la fracture numérique et d’assurer que l’innovation profite à tous, sans créer de nouvelles inégalités. Ne pensez-vous pas qu’un encadrement clair de l’IA permettrait d’éviter une concentration du marché entre quelques acteurs dominants ?
Adnane Benchakroun : En théorie, oui, mais en pratique, la régulation profite surtout aux acteurs déjà bien établis qui ont les moyens de se conformer aux normes imposées. Les grandes entreprises américaines et chinoises ont déjà une avance considérable. Réguler l’IA aujourd’hui, c’est figer les positions dominantes et empêcher les nouveaux entrants d’émerger. Plutôt que de chercher à réguler à tout prix, le Maroc devrait d’abord se concentrer sur le développement de ses propres capacités en IA, en encourageant la recherche locale, la formation et l’industrialisation de solutions adaptées à nos besoins économiques et sociaux.
Question : La Déclaration de Paris met aussi l’accent sur la nécessité d’une coopération internationale pour encadrer l’IA et éviter des dérives en matière de droits fondamentaux et de sécurité. Ce type d’engagement mondial ne vous semble-t-il pas bénéfique pour un pays comme le nôtre ?
Adnane Benchakroun : La coopération internationale est une bonne chose en soi, mais il faut veiller à ne pas tomber dans une dépendance aux standards imposés par d’autres. La régulation mondiale actuelle est largement poussée par l’Europe, qui cherche à se donner un rôle dans l’IA faute d’avoir su innover à temps. Le Maroc ne devrait pas s’aligner aveuglément sur ces normes, mais plutôt observer et adapter sa stratégie en fonction de son propre rythme de développement. Aujourd’hui, nous sommes encore loin de l’Intelligence Artificielle Générale qui pourrait justifier un encadrement strict. Tant que nous en sommes aux IA génératives et aux modèles spécialisés, nous avons encore le temps d’explorer et de définir nos propres règles sans brider notre croissance.
Question : Mais sans cadre éthique, ne risque-t-on pas de voir apparaître des usages problématiques de l’IA, notamment en matière de désinformation, de surveillance ou de discrimination algorithmique ?
Adnane Benchakroun : Ces problèmes existent, mais la solution n’est pas nécessairement une régulation stricte dès maintenant. Il faut distinguer la régulation qui protège les citoyens de celle qui freine l’innovation. L’encadrement peut se faire progressivement, au fil des avancées technologiques et des défis concrets rencontrés. L’histoire de la technologie nous montre qu’imposer des règles trop tôt peut tuer un secteur avant même qu’il ait prouvé son utilité. Plutôt que de copier les préoccupations européennes, nous devrions nous inspirer de la Chine, qui a su tirer parti de la technologie occidentale tout en construisant ses propres champions industriels.
Question : Finalement, que préconisez-vous pour le Maroc ?
Adnane Benchakroun : Le Maroc doit adopter une approche pragmatique : observer, expérimenter, investir dans ses propres talents et ne pas se précipiter dans une régulation qui pourrait le désavantager sur le long terme. Il faut favoriser un cadre flexible qui encourage l’innovation et la compétitivité avant de parler d’encadrement strict. Tant que l’Intelligence Artificielle Générale n’est pas une réalité, nous avons encore le temps de voir venir.
Cet entretien illustre bien le débat actuel entre la nécessité d’une régulation précoce de l’IA et l’opportunité, pour un pays en rattrapage économique comme le Maroc, d’adopter une approche plus progressive pour maximiser ses chances de développement technologique.












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