Chaque année, à la même période, on se pose tous les mêmes questions en famille : “Où part-on cet été ?”, “Est-ce que les billets pour la Turquie sont encore abordables ?”, ou encore “Et si on allait voir les cousins en France ?” Mais ce 13 juin, l’ambiance avait un tout autre goût.

Alors que certains finalisaient leurs réservations Airbnb ou faisaient la queue pour renouveler leur passeport, un éclair a traversé les écrans. Non pas météorologique, mais diplomatique, militaire, historique : Israël venait de bombarder l’Iran. Une attaque directe, frontale, contre une autre puissance nucléaire (ou en passe de l’être), qui a immédiatement riposté. Le monde a tremblé. Littéralement.

Depuis le 7 octobre 2023, Gaza n’est plus que ruine et désolation. Des centaines de milliers de civils piégés, sous les bombes, dans l’indifférence d’une communauté internationale éteinte. Mais voilà que l’étincelle s’étend : Liban, Syrie, Yémen... la région entière est en feu. Cette fois, l’embrasement est monté d’un cran avec l’attaque d’envergure contre l’Iran. Et comme dans un jeu de dominos géopolitique, les réponses ne se sont pas fait attendre : salves de missiles, escadrilles de drones, rumeurs de mobilisation.

On parle ici non pas d’une simple escalade, mais d’un tournant. Une rupture dans l’équilibre mondial déjà bien fragile.

Officiellement, Rabat n’a pas encore pris position.
Il ne s'agit donc pas que d'un conflit “lointain”. Le Maroc, par ses alliances, ses intérêts énergétiques, sa proximité diplomatique avec les pays du Golfe, est potentiellement concerné à plusieurs niveaux.

En tant que parent, citoyen, et simple consommateur, ce qui me vient en tête, au-delà de la guerre, c’est le prix à la pompe. Car derrière les frappes et les images de guerre, il y a une réalité brutale : l’Iran est l’un des principaux producteurs de pétrole au monde. Et qui dit guerre sur son territoire dit risques pour l’approvisionnement mondial. Pire encore : si Téhéran met sa menace à exécution de bloquer le détroit d’Ormuz – par où transite près de 20 % du pétrole mondial – c’est tout le système qui vacille.

Déjà, le prix du baril a bondi de 7 % en deux jours. Un chiffre qui, à première vue, paraît abstrait. Mais quand on sait que le Maroc importe l’essentiel de son énergie, cela signifie : hausse des prix à la pompe, des denrées alimentaires, du transport, et donc... de tout. Avec l’inflation de 2022 encore dans les mémoires, les Marocains n’ont pas besoin d’un nouveau choc pour voir leur pouvoir d’achat s’effriter encore.

Dans une situation aussi incertaine, l’erreur serait d’attendre passivement les effets en espérant qu’ils soient minimes. En 2022, la guerre russo-ukrainienne avait déjà déclenché une flambée des prix au Maroc, contenue au prix de sacrifices budgétaires massifs et d’un recours accru aux subventions.

Le gouvernement doit, dès maintenant, communiquer de manière claire et proactive. Préparer des scénarios, renforcer les stocks stratégiques, envisager un dispositif exceptionnel pour amortir les hausses — et surtout, ne pas répéter l’erreur de 2022 : parler trop tard, réagir trop peu.

Ce n’est pas du catastrophisme. C’est du réalisme. Préparer le pays, ce n’est pas céder à la panique, c’est reconnaître les risques et agir avant qu’ils ne nous submergent.

Alors oui, cet été, on partira peut-être quand même. On mangera des sardines à Essaouira, on dansera dans les festivals, on louera une voiture pour aller au bled. Mais quelque chose aura changé. Cette sensation qu’en une nuit, tout peut basculer. Que la planète est une cocotte-minute prête à exploser.

Il y a quelques années, les vacances, c’était sacré. Aujourd’hui, elles coexistent avec l’angoisse sourde d’un monde qui vacille. Un œil sur les applis de météo, l’autre sur les alertes info. Une main sur la crème solaire, l’autre sur les réseaux sociaux pour comprendre ce qui se passe à 4 000 km... et qui pourrait bouleverser notre quotidien ici, chez nous, au Maroc.