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Le Maroc à deux vitesses


Dans son discours du Trône du mardi 29 juillet, Sa Majesté le Roi a instamment appelé à un changement de cap des politiques publiques. La trajectoire poursuivie depuis plus de deux décennies a profondément transformé le Maroc. Elle participait d’une vision adossée à une forte dose de volontarisme réformateur. Mais en même temps, les problématiques des inégalités sociales et territoriales se sont creusées. Ce qui appelle à un autre paradigme. Que compte faire le gouvernement actuel alors qu’il entamera dans deux mois la cinquième et dernière année de sa mandature?



Par Mustapha Sehimi

Les inégalités sociales, un problème de longue date, s’expliquent par une forte concentration des richesses: les 10% les plus aisés détiennent près de la moitié des revenus. Les riches sont de plus en plus riches - une tendance générale - alors que les pauvres sont de plus en plus pauvres. Pourquoi les fruits de la croissance et du développement génèrent-ils une telle situation?

Alors que le taux de pauvreté a presque diminué de moitié entre 2014 et 2024, passant de 13 à 7%, le taux de chômage s’élève à 13,2%, avec 1,6 million de chômeurs. Un chômage qui frappe particulièrement les femmes (20 % contre 11,7 % des hommes). De plus, il est encore plus élevé chez les quelque 300.000 diplômés sans emploi, le tout dans un contexte où le taux d’activité national ne dépasse pas 42%.

Le système éducatif et le taux d’analphabétisme (30%) posent de sérieux défis. Par ailleurs, des disparités d’accès aux soins persistent, car l’Assurance maladie obligatoire (AMO) ne couvre pas plus de huit millions de personnes.

Ces inégalités sont le résultat de plusieurs facteurs cumulatifs: une économie duale où le secteur informel prédomine et offre peu d’emplois stables, ainsi qu’un système de distribution peu équitable, caractérisé par une fiscalité inégale et des aides ciblées insuffisantes. Si le Registre social unifié (RSU) est censé corriger ces lacunes, ses effets concrets ne sont pas encore perceptibles.

Dans ce registre d’un développement qui peine à être équitable, il faut faire référence à un autre grand dossier: celui des inégalités territoriales. Le Souverain en a fait l’un des référents de son discours. En cause? Un développement asymétrique entre les régions côtières urbaines et les territoires de l’intérieur et du monde rural. Les inégalités régionales s’accentuent: des régions développées comme Casablanca-Settat et Rabat-Salé-Kénitra génèrent près de 60% du PIB national, tandis que d’autres, telles que Daraâ-Tafilalet, Fès-Meknès ou Béni Mellal-Khénifra, restent marginalisées.

Dans ces zones, les équipements publics sont en retard et l’accès aux services de base est médiocre. Elles souffrent d’un manque d’attractivité économique, les investissements privés et les zones industrielles étant concentrés sur le littoral atlantique. Cette situation est le reflet de politiques publiques défaillantes, qui ne parviennent ni à attirer les investisseurs en milieu rural, ni à faire avancer la régionalisation.

Quelles réponses institutionnelles sont apportées? En premier lieu, les projets d’inclusion menés par l’INDH (Initiative nationale pour le développement humain) dans les zones vulnérables depuis 2005. Mais cela suffit-il si les plans de développement régionaux (PDR) ne prennent pas en charge des projets structurants pour réduire les écarts?

Il est également important de faire preuve d’une intelligence territoriale renouvelée. L’objectif est de promouvoir et de déployer des projets locaux sur le terrain, en veillant à y associer les populations concernées.

Il est également essentiel de soutenir l’entrepreneuriat en milieu rural. Cette approche stratégique, en favorisant la création d’une classe moyenne, a pour but d’offrir des perspectives aux jeunes et de freiner ainsi l’exode rural.

En 2024, les zones rurales ont enregistré une perte nette de 140.000 emplois. Ce déficit rend impératif un changement de cap des politiques publiques, qui doivent désormais privilégier le développement inclusif. Pour cela, il est nécessaire de revitaliser la régionalisation et de mettre en œuvre plusieurs axes: une gouvernance territoriale plus efficiente, un meilleur ciblage et la mobilisation des acteurs locaux.

Le Maroc de la seconde vitesse n’est pas une fatalité. II concerne des millions d’individus dans les zones reculées, enclavées, montagnardes, qui n’ont pas accès au même progrès social que les territoires plus favorisés. Ce Maroc est celui des «sans voix», de personnes sans réseaux ni moyens d’influence auprès des centres de décision de l’État. Leurs représentants élus dans les collectivités territoriales assument-ils leurs responsabilités?

Une stratégie structurée exige un débat national sur ces axes: la territorialisation des politiques publiques avec des contrats-programmes régionaux, la profonde réforme du système éducatif et de la formation, un modèle économique inclusif au service de l’emploi, le renforcement de la justice sociale et des services de base, une gouvernance participative et efficace, la planification et le suivi des projets, la redevabilité de la gestion des fonds publics et une meilleure intégration des élus locaux, de la société civile et des jeunes.

Un grand challenge d’avenir, de justice sociale et de solidarité nationale.




Vendredi 8 Août 2025

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