Au port de Casablanca, les silos d’engrais, les wagons alignés le long des quais et les cargos prêts à lever l’ancre témoignent de l’importance stratégique des exportations marocaines vers le Brésil. Ces cargaisons d’engrais phosphatés, essentielles à l’agriculture intensive brésilienne, quittent désormais le port plus régulièrement, reflétant la montée en puissance du Maroc comme fournisseur fiable pour un marché agricole exigeant des approvisionnements constants.
Selon les récents chiffres compilés par Arab‑Brazilian Chamber of Commerce (ABCC) à partir des données officielles du ministère brésilien du Développement, de l’Industrie, du Commerce et des Services, les importations brésiliennes d’engrais phosphatés en provenance du Maroc ont atteint 559,18 millions de dollars entre janvier et octobre 2025. Cela représente une croissance de +30,19 % par rapport à la même période en 2024.
Autrement dit : en moins d’un an, le Brésil a renforcé de façon nette ses achats en fertilisants marocains un signe clair que le Maroc s’impose de plus en plus comme fournisseur stratégique pour l’agriculture brésilienne. Cette dynamique est confirmée par la hausse globale des exportations marocaines vers le Brésil, qui atteignent 1,31 milliard de dollars sur la même période, en hausse de 3,6 %.
Le Maroc : fournisseur dominant, échanges stables
Au total, les exportations marocaines vers le Brésil se sont élevées à 1,31 milliard de dollars entre janvier et octobre 2025, en hausse de 3,6 % sur un an — un chiffre porté majoritairement par les envois d’engrais et de produits dérivés. Dans le même temps, les exportations brésiliennes vers le Maroc ont reculé d’environ 5 %, à 1 milliard de dollars, affectées par la baisse des ventes de sucre, de maïs et de bétail. Le flux bilatéral reste donc globalement équilibré : la valeur des échanges s’établit à ~2,3 milliards de dollars, quasi stable (-0,3 %).
Cette montée des achats brésiliens reflète plusieurs réalités : la position de leader du Maroc sur le phosphate mondial (via OCP), la nécessité pour le Brésil d’assurer un approvisionnement stable face aux aléas géopolitiques, et une compétitivité prix-logistique qui rend les fournitures marocaines attractives. Paradoxalement, alors que le Brésil cherche à réduire sa dépendance en investissant dans des capacités locales, la demande extérieure reste élevée, en particulier pour certains types d’engrais phosphatés.
Impacts et enjeux : complémentarité ou dépendance ?
La forte hausse des importations brésiliennes d’engrais marocains renforce la complémentarité agricole entre les deux pays : le Maroc fournit l’intrant essentiel ; le Brésil cultive à grande échelle. Mais ce lien comporte aussi des risques. Une forte dépendance d’un grand importateur à un petit nombre de fournisseurs peut exposer les deux parties : fluctuations de prix, tensions sur les capacités logistiques ou décisions politiques (taxes, quotas) peuvent perturber les chaînes d’approvisionnement.
Autre signal à noter : la chute spectaculaire des exportations brésiliennes de sucre vers le Maroc (-35,2 %) témoigne de mouvements de marché plus larges surproduction, variations de prix mondiaux ou redéploiements commerciaux qui alimentent l’ajustement des balances commerciales bilatérales.
En guise de perspective
Le commerce Maroc-Brésil en 2025 illustre une complémentarité pragmatique : le Royaume fournit l’engrais qui nourrit les récoltes brésiliennes, tandis que le Brésil continue d’exporter ses produits agricoles. Mais l’équilibre tiendra seulement si les deux pays investissent l’un dans la montée en gamme industrielle, l’autre dans la souveraineté d’approvisionnement.












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