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Le plan Trump à Gaza : inquiétudes et...silences


PAR Mustapha SEHIMI - Professeur de droit (UMV Rabat), Politologue

Le président Trump a rendu public, le 29 septembre dernier, un plan de paix en 20 points pour Gaza. Il a été accepté par Israël et avec certaines réserves par Hamas. Il soulève diverses interrogations qu'explique Mustapha Sehimi à propos de son contenu, de ses silences, et de sa mise en œuvre.



Le plan Trump esquisse ce que pourrait être l'avenir de Gaza, à court et moyen terme.

Mustapha SEHIMI
Mustapha SEHIMI
Il s'articule autour de trois volets. Le premier est militaire : conditions de cessation ou plutôt de suspension des hostilités armées. Ce serait l'achèvement de la guerre (point 3) conditionné (abandon définitif de la lutte armée par Hamas, désarmement de ses membres et destruction de toutes ses infrastructures militaires ainsi que de son réseau de tunnels (point 13).

En contrepartie de ce désarmement du Hamas, une amnistie générale de ses membres (point 6). De son côté, Israël s'engage à un retrait progressif de ses troupes et renonce expressément à annexer ou à occuper la zone (point 16). Le deuxième volet est humanitaire : libération de l'ensemble des otages retenus par Hamas (point 4), libération subséquente par Israël de détenus palestiniens (point 5), reprise immédiate de l'aide notamment humanitaire à la population de Gaza (point 7). Enfin, le volet politique marqué par la prééminence des États-Unis plutôt que des Nations Unies: présence internationale à caractère militaire et civil.

Militaire avec le déploiement d'une force multinationale de stabilisation chargée d'assurer la sécurité dans la région et à ses frontières (points 14 à 16). Civile aussi avec la constitution d'un comité " technocratique et apolitique" composé de "Palestiniens qualifiés et d'experts internationaux (point 9), agissant sous la supervision d'un "Conseil de la paix " présidé par... Donald Trump et réunissant diverses personnalités politiques internationales. Le Hamas et l'Autorité palestinienne sont, quant à eux, écartés de l'administration de Gaza (point 13).

Une administration plus étrangère que véritablement internationale en l'absence de mandat onusien.

Une solution transitoire

Le président américain Donald Trump montre un document signé lors du sommet sur Gaza à Charm el-Cheikh, le 13 octobre 2025. 5Photo AFP).
Le président américain Donald Trump montre un document signé lors du sommet sur Gaza à Charm el-Cheikh, le 13 octobre 2025. 5Photo AFP).
Une solution transitoire, face à la catastrophe humanitaire à Gaza; elle est destinée à mener dans l'urgence un projet de "réaménagement" de Gaza. Ce dernier doit être conduit " dans l'intérêt de la population de l'enclave" et sur la base d'un programme de développement économique destiné à "créer des emplois, des opportunités et espoir pour l'avenir" (point 10). Ce nouveau plan américain esquisse cette fois un horizon politique dans lequel " personne ne sera forcé de quitter Gaza" alors qu'il était encore question de les chasser... Une reconstruction de la région donc mais ostensiblement adossée à l'implication des États-Unis et de " groupes internationaux bien intentionnés (point 10).
 

Cela dit, même s'il est envisagé comme la première pierre d'un édifice de paix à construire, le plan soulève de fortes inquiétudes, tant pour ce qui est de son contenu que de ses silences. En premier lieu, il demeure plus qu'équivoque quant à la solution à deux États, récusant toute existence actuelle de l'État palestinien, et ce en dépit de la vaste reconnaissance dont il bénéficie désormais à l'international (157 des 193 États membres de l'ONU). Il appelle seulement l'Autorité palestinienne à un processus de réformes pouvant à terme ouvrir la voie à une éventuelle création d'un État palestinien.


Absence de la Cisjordanie

Benjamin Netanyahou, lui, a clairement indiqué qu'en acceptant la proposition de Washington, il n'avait en aucun cas agréé la création d'un État palestinien. En deuxième lieu, 1'on ne peut que relever  -pour s'en alarmer - l'absence de toute mention de la Cisjordanie dans le document et de la formule très limitative par laquelle Tel Aviv s'engage à ne pas occuper et annexer "Gaza". Le même engagement n'est pas pris d'ailleurs à propos des autres territoires palestiniens.

En dernier lieu, le plan passe sous silence des questions essentielles : celles de la justice transactionnelle et des responsabilités israéliennes. Les membres du Hamas bénéficient d'une amnistie (point 6) mais le document n'envisage pas le sort des dirigeants et des soldats israéliens, en dépit de l'existence actuelle de poursuites devant la Cour pénale de justice (CPI).

Une déclaration de principes

Un tel silence n'est-il pas un déni ? De même, l'obligation d'Israël de réparer les dommages causés aux Palestiniens est ignorée, alors qu'elle a été constatée par la Cour internationale de justice (CIJ) dans son avis consultatif en date du 19 juillet 2024. Plus largement, le texte n'esquisse aucune solution aux problèmes des frontières, du retour des réfugiés ou de la réconciliation. La solution définitive du conflit ne saurait se réduire à un deal politique décidé et imposé par Trump qui serait indifférent aux principes du droit international.
 

Au fond, le plan américain demeure marqué par la généralité de ses termes et par le caractère très partiel de son contenu. Il constitue une déclaration de principes. Et l'acceptation de ses principaux éléments par le Hamas n'est donc que le début d'un long processus. Dans un premier temps, il devra en effet aboutir à la conclusion d'un ou plusieurs accords formalisant les droits et obligations des parties prenantes.

Il faudra ensuite travailler à la mise en œuvre effective de ces accords, à la fois par les belligérants et par les États chargés de contribuer à l'administration de Gaza et à la force internationale de stabilisation.

PAR MUSTAPHA SEHIMI/QUID.MA




Jeudi 16 Octobre 2025

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